• Il est temps de créer une instance et de promulguer une loi électorale Veut-on vraiment encore d'une Instance indépendante des élections ? Si c'est le cas qu'attend la Constituante pour promulguer la loi assurant sa création conformément à l'article 28 de la loi fondamentale d'organisation provisoire des pouvoirs ? Comment les membres de l'instance centrale et des instances régionales, les cadres qui avaient eu le grand mérite d'assurer l'actualisation partielle des listes électorales et autres membres qui ont relevé le défi d'organiser avec succès les élections du 23 octobre, jugent-ils leur situation qui prête à la confusion ? Que faire de ce savoir faire accumuler durant la première expérience d'élections démocratiques dans le pays ? L'Instance Régionale Indépendante des Elections de Tunis 1, a réuni hier, des membres de la structure nationale et d'autres venant des quatre coins du pays pour tenter de répondre à ces questions. Abdeljaoued Harazi, président de l'IRIE de Tunis 1 explique l'immobilisme relatif et apparent de l'ISIE,en partie par le texte qui l'avait créée. En plus avec la dynamique qui a suivi les élections du 23 octobre, les regards se sont braqués sur le Gouvernement et les délibérations de la Constituante. Il a rappelé que l'ISIE qui avait commencé son travail dans un climat plein de polémiques et de soupçons, l'a achevé dans la satisfaction générale. Certes, la « petite constitution », organisant les pouvoirs dans cette deuxième période transitoire, a bien annoncé dans son article 28 qu'une instance supérieure indépendante des élections sera créée par une loi, mais depuis plus de trois mois, rien n'a été fait. Le Gouvernement est en place depuis un mois. « Les choses ne sont pas claires », affirme Abfeljaoued Harazi. L'initiative prise hier, était en route bien avant la déclaration de Béji Caïd Essebsi, qui en homme d'Etat averti, a bien insisté sur la réactivation immédiate de l'ISIE. C'est un acquis national à préserver et consolider. Sami Ben Slama, a précisé qu'il aurait aimé que l'initiative de la réunion fusse prise par l'instance centrale. « Nous avons commencé notre travail, le mois de mai 2011, sans calcul, dans des conditions matérielles précaires, avec tout simplement une table et quelques chaises. Le 23 octobre vous avez vu ce qu'il y avait. L'ISIE est un grand acquis de la Révolution. Elle était une garantie de la transition démocratique » dira-t-il, en ajoutant avec un pincement au cœur « malheureusement, nous remarquons qu'il n'y a aucune volonté de sauvegarder l'ISIE ». C'est la première institution créée après la Révolution. « Il existe une volonté délibérée pour la détruire. On dirait que cette instance est en train de se dissoudre progressivement. Dans une année, les dirigeants actuels peuvent prétexter que nous n'avons pas d'instance consacrée aux élections », prévient-il. Aujourd'hui, nous n'avons ni loi électorale, ni la moindre initiative pour créer une instance pour les élections. Sami Ben Slama avait bien déclaré depuis longtemps qu'il existe une intention de reconfier l'organisation des élections au ministère de l'Intérieur. En l'absence d'instance, c'est le ministère de l'Intérieur qui prendra en charge les élections. Mourad Ben Moualla, rappelle les conditions exceptionnelles dans lesquelles a été formée l'ISIE. Les conditions de travail étaient très difficiles et les délais de quatre mois très courts. A circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles. Aujourd'hui, il faut revoir le cadre juridique et trouver une solution au problème de ceux qui ne se sont pas inscrits volontairement. Presque la moitié du corps électoral n'est pas actualisée. L'actualisation des listes électorales est un travail qui ne peut attendre. Si on veut s'en tenir aux critères internationaux, et au cas où l'on a l'intention d'organiser des élections dans un an, il ne reste plus de temps à perdre. Il faut réviser le code électoral et commencer à travailler. Beaucoup de lacunes ont été constatées dans l'ancienne loi électorale. C'était dans des conditions exceptionnelles. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Il faut dépasser ces anomalies. L'installation d'une instante peramanente pour les élections a été approuvée au sein de la Constituante. Il faut commencer à s'y atteler de façon indépendante des rendez-vous électoraux. La révision des textes est un besoin urgent. Administration indépendante Zaki Rahmouni, membre de l'instance centrale appelle à un vrai bilan de l'action d'inscription des électeurs. Dans beaucoup de régions cette opération ne s'est pas bien déroulée. Il met en garde sur le fait qu'il n' y a aucune visibilité à propos du registre des inscrits. « Dans une année ou deux la situation sera beaucoup plus catastrophique du point de vue technique », dira-t-il., en ajoutant : « il faut avoir une structure permanente qui s'occupe de l'inscription indépendamment de la direction politique ». L'ISIE aurait dû avoir le courage de déclarer que le registre des inscrits contient beaucoup de défaillances. Par ailleurs, rappelle Zaki Rahmouni, « l'Instance est un ensemble d'individus qui avaient la volonté d'être neutres. La confiance a été retrouvée entre l'électeur et les instances de l'Etat. Cette confiance est en train de s'effriter. Il faut la reconquérir. Il faudra un débat national sur cette question urgente » Anouar Belhassen, trésorier de l'ISIE, parlera avec beaucoup d'émotion. « Nous avons travaillé jours et nuits avec beaucoup d'abnégation, dans des conditions difficiles. J'aurais aimé, après le 23 octobre que le bilan de l'action de l'ISIE, soit fait à partir de la base ». Pour saisir l'importance du travail de l'ISIE, il faut comparer les deux situations avant et après le 23 octobre. Il se rappelle des premiers moments du travail de l'ISIE. « On nous a donné quelques textes que nous avons commencé par lire de façon collective le 10 mai. Nous avons transformé les textes en programmes de travail, sans avoir aucune expérience des élections. Le seul moteur galvanisateur était le nationalisme et l'enthousiasme ». Au siège de la Rue de Rome les inscriptions avaient commencé le 11 juillet. Même les recrutements se faisaient rapidement. Les membres élus travaillaient avec les éléments recrutés. Il fallait huit ou neuf mois. Le travail a été réalisé en quatre mois. Plus de 3000 personnes ont été recrutées. Soixante mille travaillaient dans les bureaux de vote. L'Instance est une institution à préserver. L'après élections est aussi important que les élections elles mêmes. Il faut sauvegarder les archives de l'ISIE, pour que la passation avec la prochaine instance se fasse dans les règles de l'art. L'ISIE a acquis beaucoup de savoir faire, qu'il ne faut pas dilapider. « Nous devons être fiers de notre expérience », conclut-il. Il faut une feuille de route claire . L'ISIE doit continuer à exercer comme administration indépendante, tout en gardant la même distance vis-à-vis de tous. Le vaiqueur d'aujourd'hui, peut être vaincu demain. Abdeljaoued Harrazi a précisé que des invitations ont été adressées au président de l'Assemblée Nationale Constituante (ANC), ses deux adjoints ainsi qu'à nombreux constituants, personne n'a daigné participer à cette rencontre.