Etablir des critères pour qu'un document soit considéré confidentiel Mohamed Abbou : « Tout fonctionnaire qui refusera de délivrer un document administratif, s'exposera à des sanctions », selon Mohamed Abbou Le droit d'accès à l'information est une composante essentielle d'une véritable démocratie où la transparence est la règle. Jouir de ce droit le plus absolu est une logique de plus en plus répandue dans le monde. Plusieurs structures internationales et régionales de défense des droits de l'Homme ont appelé à la reconnaissance de l'importance fondamentale de ce droit et insisté sur la nécessité de mise en place d'une législation apte à le garantir en pratique. Plusieurs gouvernements ont adopté de nouvelles constitutions reconnaissant explicitement ce droit. En Tunisie un décret-loi n° 2011-41 du 26 mai 2011 reconnaît le droit d'accès aux documents administratifs des organismes publics. Les textes d'application sont pour bientôt. Un séminaire régional est organisé depuis hier et durera deux jours à Tunis pour débattre de la mise en œuvre de cette politique et du rôle de la société civile et des médias dans la diffusion des informations. Mme Inger Anderson Vice-présidente à la Banque mondiale a affirmé, lors du point de presse organisé, conjointement aux travaux du séminaire que « l'ouverture de l'administration est importante à l'économie. Le développement en dépend. Avec la promulgation de la loi garantissant le droit d'accès à l'information, la Tunisie rejoint les autres nations. L'étape suivante est la plus importante. Elle concerne la mise en œuvre de cette législation. C'est un petit pas dans le chemin qui sera suivi par la Tunisie ». La Banque Mondiale avec l'Union européenne, l'Allemagne, la France et la Banque Européenne d'Investissement (BEI), soutiennent ce processus. Elle insiste sur le fait que ce n'est pas une entreprise aisée. « Tous devront changer de pratiques et tout le monde devra y mettre du sien ». Elle reconnaît que la législation est le fondement de tous les droits. Mais le plus important est la volonté politique. Et il faudrait que les citoyens s'exercent à bénéficier de ce droit. Certains pays ont certes légiféré, mais sans la prise en pratique réelle et sans une participation effective du public rien ne marchera. Les citoyens sont les seuls à même de s'enhardir et de faire évoluer les mentalités. La Vice-présidente à la Banque mondiale rappelle que « le monde entier observe la Tunisie qui devrait servir de modèle pour le reste du monde et le monde arabe en particulier ». D'ailleurs, la Banque mondiale n'a pas manqué de tirer les leçons du passé quand elle parlait de mauvaise gestion en lieu et place de la corruption. « Nous irons vers des discussions plus transparentes avec des messages moins techniques et plus clairs. Mohamed Abbou, ministre auprès du Chef du Gouvernement chargé de la Réforme administrative qualifie la loi du 26 mai 2011, de progressiste reflétant les choix de la Tunisie postrévolutionnaire, la Tunisie qui lutte contre la corruption. Là la transparence et le droit d'accès à l'information sont une étape fondamentale pour éradiquer la corruption. « C'est un moyen de pression sur le Gouvernement pour qu'il ne cache pas ses décisions », affirme le ministre qui ajoute que les textes d'application ont été préparés. Ils reconnaissent au citoyen le droit de demander les documents administratifs et de les avoir gratuitement ou contre un prix dérisoire. « La Tunisie est ouverte. L'application de la loi et l'exercice des libertés ne sont pas garantis uniquement par la loi. Au cas où le fonctionnaire refuse de délivrer un document il s'expose à des mesures disciplinaires ». Les sanctions disciplinaires commencent par l'avertissement jusqu'à la mise à l'écart du fonctionnaire. Il va de soi que les documents à caractère confidentiel ne peuvent être délivrés. Il en est de même pour les documents de propriété intellectuelle, les données personnelles et ceux qui touchent à la sécurité. Il faudra établir les critères pour qu'un document puisse être classé confidentiel. C'est à la justice de les déterminer. Le ministre promet des séances de recyclage et de formation aux fonctionnaires après la promulgation des textes d'application. Concernant les lourdeurs administratives, le ministre rappelle que « la Tunisie ne part pas de zéro. Un projet s'étalant sur neuf mois, permettra de supprimer les autorisations chaque fois qu'il devient possible de le faire. Cela améliorera le climat des affaires. La priorité actuellement est l'OpenGov qui aide à la lutte contre la corruption ». Adrianus Koersenruijter, chef de la Délégation de l'Union européenne rappelle que « la transparence est un droit fondamental pour n'importe quel citoyen, étant donné qu'il paie l'administration par le biais des impôts ». Il ajoute que l'histoire a montré que l'administration est réticente à l'ouverture. En Europe ce processus a commencé récemment. « La Tunisie a la chance d'être une jeune démocratie dirigée par d'anciennes victimes de la dictature ». L'ambassadeur avait précisé que « la promulgation des décrets-lois consacrant le droit à l'accès à l'information constitue un pas décisif vers la construction d'une administration plus transparente et plus ouverte sur les citoyens. Le passage de la 142ème place à la 92ème de l'index de démocratie de l'Economist Intelligence Unit témoigne de l'impacte déjà visible de telles actions sur l'image du pays ». Une étude réalisée par la Commission européenne en 2011 révèle que les gains gagnés de la réutilisation de l'information générée par le service public s'élèveraient à plus de 40 milliards d'euros par an pour l'UE. Des bénéfices concrets sont générés par l'ouverture de l'administration.