Souvenez-vous : ces impitoyables gardiens de la Révolution du régime des Ayatollahs, milices minutieusement resautées et suréquipées en imposant à la police officielle et à l'armée elle-même. Cette Révolution a-t-elle fait tout ce chemin, subi toutes ces convulsions, donné naissance à de vraies élections démocratiques le 23 octobre dernier, pour qu'aujourd'hui des hordes caciques en plus des hordes salafistes, instaurent la loi du Talion, l'équilibre de la terreur et provoquant ces déflagrations dans le souci d'intimider les femmes et les hommes libres mais qu'on veut purifier, selon le vieux mode opératoire des groupuscules au service d'une superstructure, à savoir la rédemption par la violence et elle seule. Qui a mis en place ces ligues de protection de la Révolution ? Aux ordres de qui se conforment-elles ? Aux ordres de l'establishment, c'est évident. Un establishment qui n'en finit pas de fuir en avant, qui a utilisé le 23 octobre le processus démocratique pour aussitôt – classique !- le noyauter. Les forces de l'ordre tunisiennes et l'armée sont suffisamment loyales et bien équipées pour prendre en main la sécurité dans le pays. Car les commanditaires de la violence politique, s'appuient davantage sur les milices que sur les tribunes idéologiques. C'est cela le « Pouvoir ». Ça ne se lâche pas. Et à chaque dictature ses procédés. Avec Ben Ali c'était la police. Avec ceux-là, ce sont les bras armés bientôt érigés en milices « institutionnelles » ingrédient de base des systèmes fascistes comme ce fut avec Mussolini, et des dictatures totalitaires et guerrières comme le furent les comités populaires de Kadhafi. Mais attention : quand il y a mort d'homme il faut bien se dire que c'est une étincelle. Et lorsqu'on en arrive à ce genre de pratiques, l'Histoire ne fait plus de casuistique. Elle est là pour nous prévenir des risques potentiels d'affrontements encore plus sanglants, qui, eux, plantent de décor d'une guerre civile. Non les Tunisiens refusent de se laisser faire. Ils refusent la violence. Ils tiennent à leur République, à leur démocratie mais ne se laisseront pas gouverner et intimider par des milices.