La loi du talion. La banalisation du dénigrement. La systématisation de la violence. Si, aujourd'hui, on en arrive à agresser physiquement un juge – ainsi que sa très chère mère – et dont le seul tort c'est d'être juge et, donc, tenu d'appliquer la loi, c'est que les valeurs morales se sont effondrées, qu'il n'y a plus de règles sociales et que la loi de la jungle s'installe. Il est vrai que le grand redéploiement des forces de sécurité est en train de remettre de l'ordre dans les cités. Mais il y a beaucoup de malfrats encore en circulation ; beaucoup de gangs, bien organisés, tissant une espèce de toile de la terreur. Oui, on cherche à terroriser les Tunisiens. Et à plus forte raison lorsqu'un juge, noble métier, connu pour sa droiture tel que M. Ibrahim Mejri paye de son intégrité physique une démence vengeresse. Mais ce n'est toujours là que la face visible de cette banalisation de la violence contre les juges contre les avocats, contre les enseignants. Car au-delà de l'écume des choses, bien des corps de métiers comme celui de la magistrature ont été noyautés de l'intérieur, diabolisés avec ce manège de listes ridicules accusant des juges honorables de compromissions. Voilà où mènent ces listes, où tout s'entre-mêle où l'on descend en flammes d'honnêtes citoyens, et où l'on se substitue – extrême paradoxe – à la justice elle-même. L'ennui, c'est que le juge Ibrahim Mejri n'est pas en équation. Il est bien loin de tout cela. Mais il est juge. Et être juge est devenu un métier à risque, comme celui des gens de médias ou des artistes. Comment faire pour endiguer ces dérives ? Que les corps de métiers apprennent à être solidaires. Et que nous aussi – pour notre part – cessions de jeter les gens en pâture dans ce lynchage médiatique et facebooker risquant sérieusement de ruiner les espoirs qu'à autorisés la Révolution.