Le passage d'une année à une autre a été toujours l'occasion de dresser le bilan de celle qui tire sa révérence et s'en va pour ne plus revenir et permet à la fois de formuler des vœux de paix, de stabilité et espoirs et attentes pour celle que nous inaugurons aujourd'hui. L'année 2012 était l'occasion pour le Gouvernement de montrer ce qu'il pouvait faire. Beaucoup d'évènements ont émaillé cette année rocambolesque. Transition démocratique, apparition du phénomène de violence, déception dans les régions déshéritées et chez les jeunes, retards dans l'élaboration de la Constitution, inquiètent plus d'un. Le bilan de l'année 2012 varie d'un bord à un autre, selon qu'on soit dans l'opposition ou au pouvoir. Quant aux attentes de la nouvelle année, elles ne semblent pas faire l'objet de grandes divergences. Mohamed Bennour, porte-parole d'Ettakatol : «Si on place l'intérêt de notre jeunesse au-dessus de toute autre considération, l'année 2013 sera stable» Porte-parole d'Ettakatol, Mohamed Bennour se signale par sa modération. Il déclare au Temps : « en 2012 nous avons un peu progressé par rapport à 2011, sur tous les plans. Mais on aurait pu mieux faire. Sur le plan politique, notre pays a hérité de plus de cinq décades de totalitarisme et de dictature qui ont conduit à un régime mafieux. La chute de ce régime est un lourd handicap que tous les Démocrates ont eu à supporter. Nous avons vécu un contexte très difficile. Il s'avère que la construction de la Démocratie n'est pas un objectif facile à réaliser. Donc, un travail énorme nous attend en 2013. Il faut tout d'abord finaliser la Constitution. Pour ce faire, il faut trouver un large consensus, non seulement avec les composantes de la Constituante, mais aussi de la société civile qui a un rôle important à jouer. Notre vœu le plus sincère est d'avoir une Constitution qui unit les Tunisiens et qui pourrait être une source de fierté pour aujourd'hui et pour les générations futures ainsi que devant les Nations du monde. Nous voulons une Constitution qui garantit la liberté et nous prémunit de tous les abus de quelque sorte qu'ils soient. Nous devons arriver à un équilibre des forces qui permet aux Tunisiens de vivre en harmonie et qui permettrait à notre génie national d'aller de l'avant vers un développement social, économique et culturel qui peut nous placer parmi les Nations les plus avancées du monde. Nous sommes capables d'atteindre cet objectif si les Tunisiens croient sérieusement en leurs capacités et en la volonté de leur jeunesse intelligente et très évoluée, fruit d'un effort considérable consenti durant les cinq dernières décades. Sur le plan économique, l'année 2012 a été bonne sur tous les plans sauf trois points. La production minière n'a réalisé que 20% de son potentiel en 2012. Le tourisme n'a pas réalisé ses objectifs, en raison des tensions qui ont marqué certains épisodes de cette année, surtout l'activité salafiste et certaines revendications sociales anarchistes. Une image peu sécurisante a été transmise aux clients fidèles de la Tunisie. De même l'investissement intérieur et extérieur a été faible à cause du climat d'insécurité. Tous les Tunisiens doivent être conscients de ces faiblesses. L'intérêt supérieur de la Tunisie doit être placé au premier plan, par les partis politiques et les Tunisiens en général. Si on place l'intérêt de nos jeunes au-dessus de toute autre considération, l'année 2013 sera stable et permettra à notre économie de progresser et de réaliser ses objectifs. Un autre souci : l'armée nationale gardienne de l'intégrité territoriale et nos forces de sécurité qui commencent à s'affirmer et à évoluer comme un corps républicain, puissent contrecarrer les vrais dangers qui pourraient surgir ici et là. Tous les Tunisiens doivent faire preuve de grand patriotisme pour aider notre armée et forces de sécurité à mettre fin à ces groupes terroristes, étrangers aux Tunisiens et à la Tunisie. Je souhaite à tous les Tunisiennes et Tunisiens une bonne et heureuse année 2013 ». Chokri Belaïd, secrétaire général du Parti Unifié des Patriotes Démocrates : «Que l'année 2013, soit celle de la sortie du tunnel avec un dialogue national sérieux» Secrétaire général du Parti Unifié des Patriotes Démocrates et un des dirigeants du Front populaire, Chokri Belaïd déclare au Temps que « l'année 2012 était la plus difficile sur le plan politique. Elle a connu la montée étonnante de la vague de violence politique avec la formation de milices. Le Gouvernement d'Ennahdha s'est rétracté et n'a pas respecté ses engagements pris envers le pays pour l'élaboration d'une Constitution démocratique en une année. La situation politique s'est signalée par la contrainte traduite par la logique de l'exclusion, chose qui a culminé par l'assassinat politique à Tataouine. Le pays a été le champ d'action des groupes terroristes avec un silence total du Gouvernement de la Troïka et des tentatives de dédramatiser ces dangers avec un discours de justification. Les réactions de Ghannouchi soutiennent ces milices. L'année 2012 a connu un évènement politique majeur : la création du Front populaire et le début d'une large clarification politique entre ceux qui appuient le caractère civil de l'Etat et le projet démocratique d'un côté et ceux qui défendent le projet despotique, dictatorial et de malversation de l'autre. Le pays a connu un grand mécontentement social, faisant suite au fait que le Gouvernement d'Ennahdha a renié ses engagements sociaux devant les couches populaires et les régions intérieures. Celles-ci ont connu l'aggravation du chômage et l'élargissement de la pauvreté. Le nombre des marginalisés a augmenté. La réaction des masses populaires a été légitime. Le Gouvernement Ennahdha l'a affrontée par la répression, les arrestations, la torture, les procès fabriqués et le lancement des milices. Ce qu'ont vécu comme malheurs Siliana et l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) en est une preuve flagrante. Il faut préciser que l'année 2012 a connu une résistance de la population et la fin de la peur. Les Tunisiennes et les Tunisiens ont montré leur détermination à défendre leurs droits avec des moyens démocratiques et de masse. En 2012, la situation économique était difficile par la faute du Gouvernement Ennahdha qui a reproduit le modèle de développement des Gouvernements de Ben Ali. L'Etat s'est désengagé de l'investissement public. Il a laissé le champ libre aux monopolisateurs. Une myopie absolue a présidé aux détournements de biens essentiels. Il a pris les hommes d'affaires en otages. Un climat d'instabilité et de baisse vertigineuse du pouvoir d'achat de la majorité des Tunisiens s'en est suivi. Les investissements publics et privés ont régressé. La corruption s'est amplifiée comme le précisent les rapports des instances internationales. Ce qu'a connu la Tunisie en 2012 a généré une unanimité nationale dans le diagnostic de la situation et la reconnaissance que le pays connait une crise étouffante. Le Gouvernement d'Ennahdha en assume la responsabilité. C'est pourquoi, plusieurs forces politiques et civiles avaient appelé à un dialogue national pour sortir de la crise. L'initiative de dialogue de l'UGTT était la plus importante. Elle a été soutenue par tous sauf Ennahdha qui refuse le dialogue et le consensus, pour sortir de la crise. Tout ce que nous souhaitons est que l'année 2013, soit celle de la sortie du tunnel avec un dialogue national sérieux et la formation d'un Gouvernement réduit de compétences nationales qui prendra des mesures révolutionnaires créant un climat politique, civil, démocratique et pacifique qui permettra d'achever la période transitoire par des élections générales transparentes, libres, démocratiques et conformes aux standards internationaux. Nous espérons, l'unité de tous les partis, associations et élites contre la violence et les milices. Mettre fin à la violence et mettre hors d'état de nuire ceux qui le revendiquent, est la seule voie à emprunter pour créer un climat civil, pacifique et démocratique. Nous espérons qu'il soit mis fin au feuilleton de la violence qu'on trouve dans le discours pleins d'anathème et d'accusation d'apostasie, divisant les Tunisiens, leur confisquant leur identité et leur Islam. Les mosquées ont été dénaturées de leur vocation essentielle, à savoir prêcher la bonne parole, celle de la fraternité et de l'amour d'autrui. Il faut revenir au carré, la Religion est à Dieu et la Patrie pour tous ». Lazhar Akermi, porte-parole de Nida Tounès : «Nous espérons que la transition démocratique sera réalisée par les Démocrates» Porte-parole du parti Nida Tounès, Me Lazhar Akermi, affirme au Temps que « l'année 2012 a été marquée par la violence, l'insécurité et l'absence de consensus. La situation économique n'est pas claire. Elle est fragile. Les prix ne font qu'augmenter. Le chômage gagne du terrain. L'insécurité est ressentie par les Tunisiens dans leur for intérieur. La transition démocratique prend du recul. Avec l'absence de dialogue, il n'y a ni horizons claires, ni feuille de route. En 2013, nous attendons le retour au carré de la transition démocratique. Un esprit despotique ne peut conduire à la Démocratie. Nous espérons que la transition démocratique sera réalisée par les Démocrates ». Mohamed Kilani, secrétaire général du Parti Socialiste : «Nous espérons que 2013, sera l'année du départ d'une nouvelle démocratie» Secrétaire général du Parti Socialiste, Mohamed Kilani, considère que « le bilan de 2012 est presque négatif. Pour 2013, les attentes sur les plans politiques, économiques et sociaux sont grandes. Sur le plan politique, le plus grand problème, c'est la République. Un nouveau départ est nécessaire pour redresser la marche de la République qui a connu un retour inquiétant du despotisme. Il bloque toute possibilité de résoudre les problèmes de développement, de développement régional et les plus grandes questions concernant l'économique, le social et le culturel. Un projet de despotisme est en train d'être mis en place. Il ne change rien au libéralisme sauvage. Il va permettre aux capitalistes les plus avides de pouvoir gagner encore plus, même sur le dos de la société, de la République et du peuple. La Démocratie, permettra l'équilibre social, pour permettre au peuple de travailler, de formuler ses demandes et à l'Etat de dire ce qu'il peut réaliser maintenant et ce qu'il peut faire dans l'avenir. La Démocratie permet d'avancer sans les difficultés du mécontentement social. Seule la démocratie peut permettre la réalisation d'une réforme substantielle du mode de développement. En plus de nos libertés, nous considérons que seule la Démocratie peut procurer un développement plus équilibré. Nous espérons que 2013, sera l'année du départ d'une nouvelle démocratie qui mette fin au projet despotique. Après les prochaines élections, si jamais une majorité démocratique s'installe au pouvoir, on pourra avancer que les problèmes de la Tunisie, commenceront alors à trouver des solutions ». Lotfi Azzouz, directeur de la section tunisienne d'Amnesty International «La vigilance de la société civile est rassurante» “En matière de respect des droits de l'Homme, le bilan de l'année 2012 est mitigé. Sur le plan des législations relatives aux droits de l'Homme, plusieurs décrets-lois préparés par la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique (HIROR) lors de la première étape transitoire n'ont pas été activés. Il s'agit, entre autres, de la loi sur les partis et des décrets-lois 115 et 166 relatives à la régulation du secteur de l'informatiuon. La Tunisie a également ratifié sous le gouvernement de transtion dirigé par Mohamed Ghannouchi les plus importantes conventions internationales des droits de l'Homme, mais les lois nationales n'ont pas été encore adaptées à l'esprit de ces conventions. Certaines lois qui comportent des violations des droits de l'Homme n'ont pas été aussi abrogées comme la loi relative à la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d'argent. Cette loi décriée par toutes les organisations de défense des droits humains a été, au contraire, réactivée. sur le plan de la pratique, des atteintes des droits de l'homme ont été enregistrées comme les agressions à l'encontre des journalistes, l'élargissement du champ d'appilcation de l'atteinte à la pudeur et une orientation à une plus grande protection par la force de la loi de l'atteinte au sacré, qui reste une notion très vague. Nous avons, par ailleurs, remarqué le retour de la torture qui constitue un résultat logique de l'impunité dont bénéficient globalement les auteurs de ces abus. Il est à noter, toutefois, dans ce cadre qu'une avancée a eu lieu: des enquêtes judicaires ont été ouvertes contre les auteurs d'atteintes aux droits de l'Homme et certains bourreaux ont été traduits devant la justice. Des journalistes et des activistes politiques ont été, d'autre part, agressés par des groupes violents même en présence des forces de l'ordre qui ont fait preuve d'une certaine passivité. Des journalistes ont été également arrêtés. En ce qui concerne les strctures et les institututions actives dans le domaine de défense des droits humains, aucune amélioration n'a été constatée. Même l'instance supérieure des droits de l'Homme et des libertés fondamentales est resté la même que sous Ben Ali en pour ce qui est de son statut et de ses attributions. Dans le domaine de la liberté d'expression on constate une libération de la parole et une amélioration du rendement des médias mais aucune structure n'a été mise en place pour garantir la liberté d'expression. Aucune loi qui protège cette liberté n'a été aussi promulguée. Le système judicaire n'a pas connu , lui aussi, des amélioraions significatives. Une amélioration est, toutefois, à soulever: une plus grande transparence dans les strctures relevant du ministère de l'Intérieur. S'agissant des perspectives 2013, il y a des signes rassurants tels que l'élaboration d'un projet de loi relatif à la justice transitionnelle et d'un autre projet de loi portant création d'une instance nationale de prévention contre la torture. Autre raisons qui incitent à un optimisme prudent: la vigilance de la société civile est rassurante".