On est en train de jouer avec le feu, au sens propre, comme au figuré. A ses heures, Bourguiba avait déclaré la guerre aux mausolées. Il avait choisi Sidi Belhassen comme rampe de lancement. Mais, très vite, une grande dame, Wassila Bourguiba, l'en dissuada, forte d'un argumentaire de taille avancé par Cheikh Fadhel Ben Achour, alors mufti de la République. A savoir que la destruction des mausolées ou leur saccage profiteraient à l'idéologie wahabiste. Car il est de notoriété religieuse que le Wahabisme, sous l'impulsion de Al Saoud, lui-même, s'était attaqué aux Saints hommes et aux Saintes femmes, taxant leurs adeptes de « Takfir ». Et c'est au nom du Takfir, nouvelle croisade religieuse s'incrustant dans le Printemps arabe, que les « mécréants » (oui, eux les vrais mécréants) brûlent les mausolées, s'attaquent à des pans entiers de notre patrimoine culturel et religieux... Rien, ni aucun lieu n'échappe à leur fureur profanatrice. Ils en sont aujourd'hui au 15ème mausolée profané. Et ils réussissent à brouiller les cartes. Car maintenant que la suspicion de relents Wahabistes prend forme et que la piste menant aux rejetons du wahabisme est parfaitement explorable (nos services secrets le sauraient bien et ils travaillent dessus), il y a quand même à délimiter une certaine approche tant spirituelle que sémantique : les Salafistes sont des maîtres de l'outrance, leur credo découle d'une exigence de la chariaâ, du reste mal assimilée, mais ils restent des sunnites. C'est-à-dire qu'ils n'aiment pas le wahabisme. Et c'est à travers cette ambivalence que se dégage le rôle sciemment flou, du leader d'Ennahdha. Celui-ci, aurait été très mal inspiré de se rendre à Sidi Bou Saïd, car la société civile, furieuse après l'outrage n'est plus en veine de nuances. De surcroît, il ne comprend pas que pour qu'Ennahdha retrouve une certaine virginité, il lui faudra dénoncer ces actes, rappeler ses troupes salafistes et les gardiens de la révolution à leurs bases, seul moyen pour que la mouvance terroriste soit mise à nu. De son côté, Ali Laârayedh devrait aujourd'hui prendre en main les lieux de prière et de culte, là où l'on chasse des imams et où l'on s'autoproclame imams au nom d'orthodoxies religieuses d'une autre époque. Du reste rien n'arrête plus ces illuminés, dès lors qu'avec la bénédiction du ministre des affaires religieuses, le recteur de la Zeitouna s'est autoproclamé imam des imams.