Une longue discussion a eu lieu dans les commissions qui travaillent sur le projet de loi contre le terrorisme. Cette discussion a porté essentiellement sur l'art 13. J'ai demandé d'ajouter à la liste de crimes proposés dans cet article le viol. J'avais déjà soumis cette proposition à la commission depuis le début du débat et beaucoup étaient d'accord avec moi, or maintenant qu'on est en train de prendre en compte les amendements et de les voter pour les inclure dans la copie qui va sortir de la commission et fera l'objet du vote en plénière par la suite, les choses ont un peu changé et, beaucoup de ceux qui étaient favorables ne se sont pas prononcés. Il me semble fondamental de statuer sur cette proposition aujourd'hui et de l'inclure dans le projet. Nous savons tous, que le viol est, et a été utilisé comme arme de guerre depuis toujours et que les groupes terroristes l'ont aussi utilisé. La Libye a été le premier pays à le qualifier comme crime de guerre par décret le 19 février dernier, Et à reconnaitre comme victimes ceux et celles ayant subi des violences sexuelles au cours des huit mois de la révolution de 2011, en cela, elle est pionnière en matière de droit des victimes. Nous pouvons l'être aussi par la loi antiterrorisme, car les viols commis par les terroristes ou par des groupes qui considèrent souvent les femmes comme un butin. Le viol dans ce cadre n'est pas seulement un «acte sexuel non consenti» comme le définit la loi. Il est l'une des armes les plus redoutables. C'est une stratégie qui vise à briser des hommes, des femmes, des familles, des villages entiers. Le viol comme arme ne répond pas à des pulsions sexuelles. Le viol est efficace car il détruit et stigmatise la personne et sème la terreur dans une catégorie de la population et ne peut être mesuré en pourcentage d'incapacité. Il peut transformer la vie d'une ville entière, amener les femmes à se terrer chez elle de peur, à ne plus sortir seule, à déserter l'espace public,.....Ce que vit le Nigéria aujourd'hui avec Boko Haram, doit nous faire réagir. Réparer la blessure, la honte, l'atteinte physique et psychologique, restaurer l'estime de soi et regagner celle des autres, c'est ce dont a besoin une victime. Un viol commis par des terroristes n'a pas les mêmes répercussions, car d'une blessure individuelle, il devient un traumatisme collectif, d'une crainte personnelle, il devient une arme contre toutes les femmes. * Nadia Chaabane membre du Bureau Politique Massar et députée Massar à l'Assemblée Nationale Constituante