Beaucoup de Tunisiennes et de Tunisiens sont en train de découvrir « l'étoffe » de ceux qui aspirent au commandement politique de ce pays pour les cinq ans à venir... qui sait plus ! C'est à regretter amèrement Bourguiba et beaucoup de ses ministres ses ambassadeurs et ses cadres de très grande compétence et de grande probité dans tous les domaines et qui ont construit le pays à l'aube de l'indépendance et son Etat national moderne, pierre par pierre, souvent avec des salaires ridicules qui frisent l'aumône publique ! Il faut dire que la première grande dévalorisation de l'Etat et de certaines de ses institutions, a commencé avec le régime du 7 Novembre dès les premières lueurs des années 90. La vocation de l'Etat, et ses structures de gestion de la vie publique est passée de l'intérêt général à l'intérêt particulier d'où cette boutade célèbre : « En Tunisie on se sert de l'Etat pour se servir » ! Pourtant la Révolution de Janvier 2011 a catapulté beaucoup d'élites et cadres, anciens militants des droits de l'Homme, au sommet de la hiérarchie de l'Etat, de l'administration et même de l'économie et des finances. Voilà enfin l'espoir de corriger l'orbite « novembriste » pour remettre l'Etat à sa véritable place et lui redonner sa vocation, celle du pouvoir souverain mais au service de l'intérêt général. Mais l'idéologie, la politique et l'égocentrisme des nouvelles classes dirigeantes ont en décidé autrement. L'idéologie, à tout seigneur tout honneur par les temps messianiques qui courent, s'est appropriée l'Etat pour rééditer le « Parti-Etat » mais en pire, puisqu'on est passé de l'Etat « civil » à l'Etat « religieux ». Avec leur victoire écrasante aux élections du 23 octobre 2011 facilitée par l'éparpillement des voix, la mise à mort du RCD et la culpabilisation des destouriens honnêtes, et en l'absence de contre poids crédibles au niveau de l'encadrement et de la mobilisation populaires, les islamistes ont cru recevoir et détenir mandat pour désintégrer l'Etat civil et national de sa modernité spécifique de la Tunisie accumulée depuis deux siècles de réformisme politique et culturel. En trois ans la Tunisie a été totalement défigurée, dans l'être et le paraître ! Le salafisme aux multiples facettes a pris le contrôle de l'Etat et de la société avec la complicité bienveillante de la nouvelle nomenclatura au pouvoir. L'infiltration programmée a infesté la plupart des structures de décision. D'où ces «Etats » dans l'Etat, où les « parallèles » à tous les niveaux consolidaient le contrôle intégral quant à la « politique » politicienne, elle a permis à notre peuple abasourdi et frappé de stupeur, de découvrir que des « démocrates »... « socialistes » et autres, défenseurs farouches des libertés et des droits de l'Homme du temps de la dictature « civile », sont devenus de dociles « acteurs » sous la tutelle, toujours bienveillante, de l'Islam politique ! La cacophonie a atteint les plus hautes sommités de la fiction quand on a vu sur des plateaux TV, la cohabitation ( miraculeuse à la tunisienne) de « leaders » et de Partis anciennement démocratiques avec des chefs de Partis et de « sectes » qui jurent de détruire l'Etat, changer son drapeau rouge et blanc, et marquer sympathie pour ne pas dire encouragements à l'émergence de l'Etat « terroriste » de type Daëch et compagnie, en Tunisie méditerranéenne ! Enfin l'égocentrisme collé à la peau de quelques opportunistes et autres aventuriers, qui n'ont rien à perdre finalement, et tout à gagner, nous a donné cette « faune » de « présidentiables » qui attend son heure de gloire pour s'approprier sa « part légitime » d'Etat, et diriger ce pays au gré de leurs fantasmes. La République, ou ce qu'il en reste, est bien malade de ses dirigeants mais aussi de certains des aspirants au commandement, et qui rêvent du « Pourquoi pas moi » ! Et dire qu'on croyait jusque-là que seul le Dinar a subi la dévaluation de fait ! Remettons les pendules à l'heure... car l'heure est à la dévaluation d'une bonne partie de la classe politique, qui ne force plus le respect des Tunisiens ! Hélas, nous risquons d'avoir bientôt, et à nouveau, les gouvernants que nous méritons... A moins d'un sursaut national de dignité et un retour aux valeurs fondamentales de l'Etat, national fort, transcendant et basé sur le mérite, la compétence et la droiture minimale ! Mais pour cela les citoyens et les citoyennes doivent faire leur sélection, par le vote utile et sans concession ! Un vote capable de régénérer l'Etat... leur Etat ! K.G