Rien ne va plus pour l'émission « Labès » diffusée régulièrement sur la chaîneAl Hiwar Attounsi et qui se veut une émission de proximité traitant de problèmes sociopolitiques en donnant la parole à toutes les tendances afin de s'exprimer librement et éclairer par la même l'opinion publique. Naoufel Ouertani, présentateur de ladite émission a tendance à vouloir trop remuer le couteau dans la plaie de manière à accentuer le mal. C'est au nom de la liberté d'expression, dit-il qu'il procède de cette manière, pour dénoncer certains abus, désormais intolérables à l'ère de la deuxième République. C'est ce qui lui coûte à chaque fois de se retrouver face à de sérieux ennuis. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé dernièrement suite à l'intervention d'un commissaire de police, lequel aurait avoué au cours de ladite émission avoir torturé des détenus par la police judiciaire au cours des enquêtes préliminaires. De telles déclarations ne sont-elles pas de nature à choquer l'opinion publique ? Sans compter que de toutes les façons, ce fonctionnaire de l'Etat, était tenu à l'obligation de réserve et au secret professionnel. Des passages seulement des déclarations de Kamel Mraihi, alias Chakif ont été diffusés sous formes de spot annonçant l'émission. Le procureur de la République a illico interdit la diffusion de l'émission à cause des passages contenant la déclaration de Chakif. Aussi , Naoufel Ouertani a-t-il été convoqué par la HAICA. C'était le samedi dernier. Hier Me Abdelaziz Essid avocat de la défense a déclaré sur son site fb, que le procureur a levé ladite interdiction, et qu'il n'y a plus donc aucun empêchement juridique à la diffusion de l'émission Toutefois Cette information a été démentie par Sofiane Sliti porte-parole officiel du procureur de la République près le tribunal de première instance de Tunis, lequel a déclaré hier que l'interdiction est maintenue. Toutefois ce n'est pas l'avis de la HAICA qui estime que Naoufel Ouertani a par son attitude, enfreint la loi sur la Justice transitionnelle. Le président de la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle, Nouri Lejmi, a indiqué que « le présentateur de l'émission Naoufel Ouertani et le représentant légal de la chaîne ont été convoqués afin qu'ils soient entendus à propos de la diffusion des déclarations de Chakif, lequel a avoué avoir pratiqué la torture sous l'ancien régime. Ce qui est en violation des dispositions de l'article 2 de la loi organique 2013-53 sur la justice transitionnelle ». Il a encore précisé qu'en vertu de cet article de la loi, « la révélation de la vérité sur les abus commis est un droit légal pour l'ensemble des citoyens mais elle doit se faire dans le respect de l'intérêt et de la dignité des victimes ». Une telle révélation enfreint également l'article 5 du décret-loi 116 qui dispose que « la liberté d'expression et de presse est exercée conformément à des règles bien déterminées et impose de respecter et de prendre en considération la dignité de la personne». Par ailleurs Kamel Mraihi a été, suite à son intervention à ladite émission, suspendu de ses fonctions pour n'avoir pas requis d'autorisation préalable par ses supérieurs hiérarchiques. De son côté Rachid Najar, secrétaire général de l'association internationale des détenus politiques a déclaré à Assabah News que « l'attitude de Naoufel Ouertani a été dans l'intention de tromper l'opinion publique précisant que ces affaires ne doivent pas être évoquées dans de telles émissions, traitant les problèmes de manière superficielle pour soi disant tourner la page en excusant leurs auteurs. Cela est de nature à perturber les associations des droits de l'Homme, qui s'occupent de ces problèmes d'une manière beaucoup plus objective et sans surenchères politiques ou autres buts que la connaissance de la vérité ». Il a ajouté que la société civile a été surprise par les déclarations du commissaire en question, car aucun ne s'attendait à ce qu'un tortionnaire reconnaisse avoir pratiqué la torture, précisant que ce commissaire au pseudonyme de « Chakif » a été trompé par son invitation à participer à l'émission « Labés. Il a dit en outre que « Chakif est connu par l'association internationale des détenus politiques comme faisant partie de la liste des tortionnaires » La réconciliation ? Naoufel Ouertani a reconnu dans une déclaration à une radio de la place qu'il a avait l'intention, en diffusant les déclarations de « chakif » de retenir l'attention d'un plus large public, à titre essentiellement publicitaire. Il a ajouté « qu'en réalité Chakif n'a pas avoué avoir pratiqué la torture. C'est Ce qui expliquait la présence de la victime, ancien détenu Nahdhaoui et qui s'était présenté à l'émission pour le remercier. Il a voulu démontré, dit-il que l'ancien « bourreau » et l'ancien détenu se sont réconciliés. La HAICA, a-t-il précisé, agit désormais préalablement à la diffusion de l'émission. Ce qui est, une atteinte à la liberté d'expression. C'est une censure avant coup, ou à priori a-t-il observé. Nouri Lajmi a rétorqué en réponse à ces propos en affirmant que « le fait que Naoufel Ouertani minimise la gravité du contenu du spot prouve une méconnaissance des textes de loi ». Finalement qu'est-ce qui était à condamner : l'émission elle-même ou l'annonce de l'émission dans laquelle est apparu « Chakif » ? La présence même de ce dernier dans une telle émission était-elle contraire à la loi? En réalité le coup médiatique, tenté par le présentateur de l'émission était dans le sens de la réconciliation entre le bourreau et sa victime. Cependant en vertu de la loi sur la Justice transitionnelle, la réconciliation intervient en dernier lieu. Le processus de pardon au sein de la société, ne peut intervenir qu'après avoir mis les fautifs devant leur responsabilités. Car la torture est considérée comme un crime à l'encontre des intérêts fondamentaux des citoyens. Et c'est la raison pour laquelle on ne peut les oublier par une simple rencontre au cours d'une émission télévisée, dans laquelle interviennent les maquilleurs et les monteurs. La vérité doit être clamée de manière spontanée, sans montage ni mise en scène.