La situation du marché allemand apparaît préoccupante. Cette inquiétude a été exprimée par les participants au workshop sur le marché allemand organisé par la Fédération tunisienne des agences de voyages à la veille de la 49ème édition du Salon international du tourisme de Berlin (ITB-2015) auquel participent du 4 au 8 mars plus de 10.000 exposants venus de 175 pays. Cette foire internationale aura ainsi l'occasion de connaître les évolutions du marché et faire un tour du monde à travers les stands des plus grands professionnels du secteur. Ce marché allemand est porteur pour la Tunisie. Avec 54 millions de voyages d'une durée de plus de 5 jours effectués en 2011, dont les deux tiers à l'étranger, et 78 millions de courts séjours, Les Allemands détiennent un record : celui de champions du monde du tourisme. Mais ce marché tarde à décoller comme l'ont mentionné les participants à ce workshop. Wahida Djaiet (directrice générale de l'ONTT): « Diffuser des messages rassurants » Le tourisme tunisien a perdu beaucoup de son pouvoir de séduction face au touriste allemand. Nous enregistrions dans les années 2000 et 2001 plus qu'un million de visiteurs allemands par an. Depuis les choses ont beaucoup changé. Nous en sommes ces dernières années à un peu plus de 430.000 clients. Le recul de ce marché est lié à deux crises. La première de type structurel, date depuis quatre ans. La seconde, du type conjoncturel avec un essoufflement de l'offre tunisienne qui n'a pas suivi l'évolution de la demande des consommateurs allemands. Résultat : le booking a accusé une baisse de 4 % des réservations. Les capacités aériennes sont revues à la baisse dans la mesure où les TO ( Thomas Cook, Rewe Touristik et TUI) ne prennent plus de risques d'affrètement .Une situation inquiétante qui dicte de fournir plus d'efforts pour préserver ce marché stratégique pour la Tunisie en raison de la puissance de son industrie touristique et la taille de son potentiel .Un travail rapide et continu au niveau de la demande doit être fait pour rétablir un climat de confiance en diffusant des images positives et crédibles sur la Tunisie. Il importe aussi de développer la communication et la promotion de la publicité vers le touriste final, un peu frileux en raison de la conjoncture actuelle en Tunisie Helmi Hassine (directeur des ventes à Tunisair): « Thomas Cook a réduit 60% de sa programmation sur la Tunisie » L'aérien a pénalisé la destination en raison du désengagement des grands TO sur la Tunisie notamment Thomas Cook qui a réduit de 60% sa programmation sur la Tunisie. Le trafic régulier se maintient mais le charter a été très affecté. Ces grands TO pratiquent une pression sur les prix au moment de la négociation et on se heurte même à des difficultés d'affrètement aérien chez les petits TO spécialisés. Or sans une bonne couverture et une disponibilité aérienne, notamment de pointe à pointe, jamais la destination ne décollera comme il le faut. L'aérien puis l'aérien avant même de lancer la promotion car toute promotion non précédée et accompagnée par des vols suffisants ne servira pas à grande chose encore moins à développer notre tourisme en provenance d'Allemagne Karim Dehmani (directeur commercial à Nouvelair): « Le trafic charter ne suit pas » Je pense qu'il faudrait tirer profit du marché allemand, fer de lance du tourisme international. C'est un marché incontournable qui progresse depuis 2011 grâce à des vols consolidés. Toutefois le trafic charter ne suit pas. Heureusement que les petits TO ont pu assurer la pérennité de ce marché. Le manque de choix des compagnies aériennes et la limite de l'accord aérien ont entravé les flux touristiques. D'autres destinations en profitent comme la Turquie qui s'investit à fond sur ce marché en baissant ses prix. Le booking est en recul et la Tunisie est devenue une destination de last minute Riadh Dkhili (directeur des marchés touristiques à l'ONTT): « La capacité aérienne connaitra une progression de 7% en 2015 » Le marché touristique a tous les atouts pour se développer avec les nouvelles compagnies aériennes. C'est le cas de TUI Fly qui a décidé de programmer des vols entre Düsseldorf et Enfidha tout au long de l'été. La capacité aérienne globale au départ de l'Allemagne vers la Tunisie en 2015 connaitra une progression de 7% Fethi Guizani (agent de voyage): « Le produit ne répond pas aux attentes des Allemands » La baisse des touristes allemands est imputable aux changements dans le comportement de voyage des Allemands ainsi qu'au manque d'atouts concurrentiels de la Tunisie en comparaison avec les destinations concurrentes, aux problèmes liés à la qualité des services. D'autant plus que les Allemands constituent une catégorie de clientèle particulièrement exigeante. La reconquête de ce marché passe désormais aux yeux des professionnels du secteur, par l'amélioration de la qualité des services destinés à cette clientèle très exigeante, ainsi que par une stratégie de communication plus agressive. Il faudrait améliorer l'accueil à l'aéroport, atténuer ces attentes inutiles et soigner le produit. En dehors des hôtels, la clientèle touristique est choquée tout d'abord par le comportement inadmissible de certains chauffeurs de taxi habitués de l'aéroport qui arnaquent inlassablement les passagers en exigeant pour les embarquer des montants énormes hors compteur. Le touriste est aussi accablé par le triste spectacle né de l'accumulation des ordures ménagères le long des rues et sur les places publiques. Mohamed Ali Toumi Président de la FTAV: « Cibler les petits Tour-opérateurs » Le marché allemand représente le paradis perdu de la destination. La bataille pour sa reconquête a désormais, une portée symbolique. Ce marché allemand est un pilier du tourisme mondial et nous n'avons pas le droit de passer à côté ! Nous savons que la Tunisie a une place particulière chez les allemands même si pratiquement toutes les destinations touristiques du monde se battent pour l'attirer. Faut-il préciser que Le touriste allemand est un client des plus fidèles, qu'il représente un vecteur de valeur ajoutée. Face au désengagement des grands TO, il nous faut une alternative à savoir travailler avec les petits TO. D'autres chantiers nous attendent à part l'aérien et là il faut s'occuper du produit, de l'accueil et de l'environnement. Beaucoup de travail nous attend mais la machine a démarré. Les résultats ne seront pas immédiats mais prendront le temps nécessaire. L'annonce du retour de Robinson à Djerba et l'exploitation de deux hôtels Palm Beach de Djerba, le Palace (5 étoiles, 546 lits) et le Club (3 étoiles, 562 lits) à compter du mois d'avril 2015 sous de nouveaux labels relevant du groupe touristique allemand TUI constituent un signe très positif sur lequel il est possible de communiquer pour rassurer d'éventuels réticents. A moyen terme, la destination Tunisie sera grande gagnante de toute cette énergie des professionnels qui devront bouger plus en cette période difficile car le marché allemand promet. Il suffit de s'investir à fond.
