Qu'est-ce qui ne se dégrade pas en Tunisie ! L'infrastructure, l'environnement, les ports, les aéroports, les routes, les écoles et les lycées, le Belvédère infréquentable après 17h... le sport, la culture du travail, l'investissement en un mot tout ce qui faisait la courtoise des masses et la volonté des élites s'érode à vue d'œil et pourquoi ? La réponse il faut la chercher dans l'absence de contre-pouvoirs aux « pouvoirs » dominants et hégémoniques qui prennent le pays et le secteur public en otage et qui poussent le gouvernement... l'Etat au laisser faire ! Du temps de la transition « troïkiste », l'ascendance était à l'Islam politique, avec une inclinaison dangereuse vers l'extrémisme « salafiste » et sa trajectoire naturelle qui enfante le terrorisme. La Tunisie a pu, par une alchimie miraculeuse stopper et même affaiblir l'ascension de l'Islam politique, pour le ramener à des dimensions gérables et acceptables par la société civile, sculptée depuis deux siècles par le réformisme « sadikien » puis par la synthèse « Bourguiba-Hached-Fadhel Ben Achour », formant ainsi le véritable socle culturel et politique de la Tunisie du 20ème siècle. Ce socle combinait le « libéralisme » du « Destour » et des classes moyennes tunisiennes, y compris la bourgeoisie nationale, avec la social démocratique de l' UGTT fondée par le leader national Farhat Hached qui combinait elle-même le syndicalisme ouvrier avec le libéralisme économique d'où son adhésion à la CISL américaine et enfin, le courant zeitounien modéré et tolérant représenté par les ulémas progressistes de la grande mosquée dont les Ben Achour. Aujourd'hui, et après des élections exemplaires tout le monde pensait que la crise sociale et économique était derrière nous et que la relève est possible avec la majorité gouvernementale confortable à l'ARP. Mais, au vu des grèves cycliques « non-stop », on a vite fait de déchanter ! L'UGTT et ses syndicats de base ne cèdent pas un pouce de ce qu'ils considèrent être leurs droits légitimes surtout dans le secteur public totalement sinistré, et le gouvernement, faute de moyens ne peut répondre à l'accumulation des exigences, ni canaliser la revendication. Pire encore l'UTICA, longtemps « culpabilisée » comme ayant servi l'ancien régime, ne se manifeste plus et assiste impuissante à l'épuisement des dernières réserves des entreprises traumatisées par la bureaucratie et l'absence de vision claire pour remettre à niveau l'investissement et le climat des affaires. Le manque de réaction de l'UTICA, qui est aussi forte en volume que l'UGTT au moins au niveau des syndicats de base des classes populaires et moyennes, commerçantes et industrielles et qui devrait jouer un rôle de contre-poids sérieux au moins sur « l'excessif » de la revendication, montre à quel point le pays et le système social sont en crise, face au volume des exigences. En un mot c'est l'image d'un automobiliste certes patient, mais démoralisé, par un embouteillage monstre tel que nous en connaissons chaque matin et chaque après-midi sur les entrées principales de Tunis. Mais, alors, quelles solutions pour désenclaver le bourbier social ! Seuls les contrepoids crédibles en volume et en volonté de régénérescence de ce pays, de son économie et de son développement, pousseront toutes les parties à la raison et aux concessions et peut être à une nouvelle « alchimie » cette fois sociale ! Mais, je ne vois rien venir et le pourrissement risque d'être fatal à la reprise économique et à l'investissement ! Au fait, pourquoi les mamans tunisiennes ne font plus de Bourguiba, de Nouira, de Hached et de Hassen Belkhodja... ! On doit revoir le planning familial ! Les pilules sont mauvaises en ce moment, et la crise persiste... mais jusqu'à quand ?! K.G