Plus qu'un Festival sur près de deux semaines à Rabat, Mawazine était une scène privilégiée, symbole d'un Maroc entre Occident, Monde arabe et Afrique. Les lampions de la manifestation s'éteignent ce samedi avec le groupe Marroon 5. Du 25 mai au 6 juin, Rabat et le Maroc auront vécu aux sons et aux lumières de ce Festival hors du commun. Ce qu'il faut savoir, c'est que Mawazine est au Maroc ce que le festival de Cannes est à la France : l'occasion de s'extasier et de polémiquer. Cette année, J-Lo, courte vêtue, a choqué Mustapha El Khalfi, le ministre de la communication, avec ses habituelles poses lascives lors de son concert, en ouverture du festival Mawazine Rythmes du Monde 2015, à Rabat, sur la scène OLM. Polémiques, polémiques, quand tu nous tiens Les polémiques n'ont pas manqué d'accompagner la montée en puissance de ce festival fondé il y a 14 ans par la volonté du roi Mohammed VI pour devenir la vitrine du nouveau Maroc, un pays dont il a imaginé la modernité. Et la programmation de Mawazine donne bien des indications dans la direction de cette modernité sur un trépied culturel u festival par scène traduit aujourd'hui avec justesse le positionnement culturel du Maroc dans le monde entre les Etats Unis, le monde arabe et l'Afrique. Usher en extase La scène OLM qui accueille les plus grandes stars internationales pop, rock et RnB est – évidemment - la plus importante, la plus coûteuse et la plus médiatisée. Le public a pu y lors de cette édition Pharell Williams, Sean Paul, le DJ suédois Avicii, Usher, et le samedi 6 juin, les Marroon 5 en guise de clôture. Mercredi, le chanteur de RnB americano-sénégalais Akon a su créé l'évènement. Visiblement heureux de se produire en Afrique, il s'est jeté sur son public dans une grande bulle, avant de brandir le drapeau marocain au milieu de la foule en délire. Ghita, l'autochtone de l'OLM Ghita, une totale inconnue, est la seule Marocaine à avoir été bookée sur la scène OLM. Encore en formation au Berkley College of Music, la toute jeune fille raconte qu'elle a réussi à interpeller les organisateurs du festival grâce aux réseaux sociaux. Les organisateurs seulement, cependant, puisque les spectateurs et la presse sont restés visiblement indifférents à sa prestation très pop. Nahda pour sublimer le goût de l'Orient L'espace Nahda est l'autre scène star du festival. Tournée vers l'est, elle reçoit les plus grandes divas du Moyen Orient dont la popularité internationale n'a rien à envié au star system américain. L'Egyptienne Amal Maher, la Syrienne Assala Nasri, le Libanais Maher Zein ou encore le ‘rossignol du Golfe' Nabil Shuail ont ainsi participé à cette édition. De jeunes talents ont également été mis à l'honneur comme Khalid Hajar, Ghazi Al Amir et Saad Satar. Les chanteuses marocaines devenues de véritables stars au Moyen Orient après avoir connues leurs premiers succès dans les émissions de télé marocaine comme Dounia Batma, Fadwa al Maliki et Ibtissam Tisskat sont également revenues sur leurs terres. Bouregreg, la fenêtre sur l'Afrique Au revers de l'attachement historique du Maroc au monde arabe et alors que le roi Mohamed VI est toujours en voyage en Afrique de l'Ouest, le positionnement africain du royaume s'exprime jusque sur la scène du Bouregreg. Installée sur la corniche réaménagée de Rabat, le long du fleuve qui sépare la capitale de sa ville sœur, Salé, elle aura reçu le groupe de rap sénégalais Daara J Family, la légende malienne des années 70, Les Ambassadeurs, Aziz Sahmaoui et Mamani Keita et P-Square. Le duo nigérian a créé la surprise en invitant sur scène les Barbapapa, ce groupe marocain monté autour de Ali Melouk pour chanter leur tube « Hek Lili Nifi », (gratte moi le nez) parodie de Skekini et devenu un hymne anti-racisme au Maroc. La consécration de la politique des festivals mais... Le parcours de tous les artistes marocains de Mawazine est emblématique d'une certaine réalité qui prévaut dans le monde culturel. marocain. Il y a beaucoup de festivals mais cela n'empêche pas les artistes, pour rencontrer le succès et faire véritablement carrière, de s'expatrier. Ainsi Ghita est déjà en Californie, Red One, soutien de Génération Mawazine, vit aux Etats Unis aussi, Aziz Sahmaoui a fait carrière en France, etc. En Orient, il y a a Dounia Batma qui vit aux Emirats, Fadwa Al Malki, entre le Qatar et le Maroc... Et la liste n'est pas exhaustive. Un problème de financement pas totalement résolu Le Maroc ne dispose pas de grandes sociétés de production et le soutien financier public aux artistes est quasiment inexistant. Dans ce contexte, les critiques contre le budget pour Mawazine - près de 60 millions de dirhams en 2012 - ont longtemps été vives. En 2011, le festival est devenu indépendant financièrement des aides publiques faisant ainsi taire une partie des reproches. Rien dans le financement public des arts vivants n'a cependant encore changé. La preuve qu'on est qu'au début d'un chemin d'industries culturelles qui ne manquera pas d'être long à se dessiner.