Le bras de fer opposant le ministère de la Santé à l'UGTT dans l'affaire du CHU Habib Bourguiba, à Sfax a pris, jeudi dernier, un tournant dangereux avec l'évacuation par la force du directeur général de l'établissement du bureau mis à sa disposition, au siège de la direction régionale de la santé, lui qui était déjà interdit d'accès depuis huit mois à son propre bureau à l'hôpital, par le même syndicat. Ainsi, le bras de fer a tourné en faveur de l'UGTT qui s'est montrée fermement solidaire des cinq syndicalistes suspendus de leurs fonctions, à qui avaient été signifiées, par le biais d'huissiers de justice, des convocations à comparaître devant le conseil de discipline le 24 avril courant. La partie syndicale accuse clairement, à ce propos, le ministère de la Santé d'avoir failli à ses engagements portant sur l'arrêt des poursuites judiciaires à l'encontre des cinq syndicalistes de l'hôpital et de trouver une solution à la crise qui secoue l'établissement. Adel Zouaghi, membre de la Fédération générale de la santé, frappé lui aussi par la mesure de suspension assure même que les accords conclus entre l'UGTT et le ministère de tutelle, avant le 7 mars 2016, portent également sur le départ du directeur général, un militaire, dans un délai de quatre à six semaines et sur son remplacement par un autre responsable civil . Soutien du ministère de la Santé Pour sa part, le ministère de la Santé vient de réitérer son soutien au directeur général de l'hôpital Habib Bourguiba de Sfax, docteur Chokri Tounsi dans la mise en oeuvre des réformes qu'il a engagées depuis sa nomination à la tête de cet établissement, opposant ainsi un démenti clair concernant lesdits engagements qui lui sont attribués par la partie syndicale en matière de révocation du premier responsable du CHU. Pour le ministère, il n'est pas question de laisser tomber ce responsable dont la mission est d'assainir la gestion administrative et financière de l'établissement lequel accuse un déficit de 35 millions de dinars, et de lutter contre toutes les formes de corruption, de mauvaise gestion et de laisser-aller dans le but d'en redresser la situation et d'en faire un CHU digne de ce nom. Il n'est pas inutile à ce propos de braquer la lorgnette sur l'état des lieux de cet établissement qui incarne toutes les formes d'insalubrité, de vétusté, de chaos, de dysfonctionnement, de manque d'équipements, de déficit en personnel et de pénuries de toutes sortes. La discipline en marche La question est donc de savoir où en sont les réformes engagées par le nouveau directeur général. Réponse de Chokri Tounsi : « Les réformes sont sur les rails, en dépit des perturbations et de la volonté d'une infime minorité de syndicalistes et d'agents de l'hôpital qui font tout pour imposer leur diktat, déstabiliser la direction et faire circuler des rumeurs concernant mon départ imminent afin d'en perturber le fonctionnement et d'instaurer un climat d'attentisme et d'incertitude susceptible de créer une situation de blocage. Mais malgré toutes les manœuvres, les combines et les obstacles dressés devant l'œuvre de réformes, je salue l'esprit de coopération saine qui caractérises mes rapports avec les médecins, le cadre paramédical, les administratifs et les ouvriers. J'estime que le pari de la discipline est gagné et je salue l'adhésion du corps médical et de la majeure partie des agents de l'hôpital au travail qui est en train de s'accomplir ». Un budget initial de 4,4 millions de dinars «C'est déjà un pas en avant sur la voie des réformes tracées par le ministère de tutelle que je m'emploie à mettre en œuvre avec le reste du staff administratif et avec la coopération du personnel de l'hôpital. Dans ma vision globale de renouveau, je tiens compte particulièrement des rapports élaborés par les inspecteurs relevant du ministère de la Santé et de la présidence du gouvernement», précise Chokri Tounsi. Le directeur général du CHU indique qu'un budget de 4,4 millions des dinars a été consacré à l'établissement et que ce budget est extensible dans la mesure où toute latitude lui a été accordée par le ministre de demander les suppléments nécessaires à l'exécution des travaux de génie civil:» Notre pari est de faire de notre établissement une véritable clinique» Parer au plus pressé Avant de penser aux acquisitions, il fallait parer au plus urgent : c'est ainsi que des appareils qui étaient en panne ou présentaient quelques déficiences, comme l'I.R.M., demeuré en panne durant une période de 16 mois, la lithotripsie, l'accélérateur linéaire, le matériel de radiologie et le scanner, ont été remis en état de marche. Acquisitions en cours Deux millions de dinars, sont consacrés à l'acquisition de matériel médical dont une partie a été déjà réceptionnée tandis que le reste a déjà fait l'objet d'appels d'offres. Les arrivages enregistrés contiennent des chariots de transport, des moniteurs de surveillance, des défibrillateurs, des scialytiques mobiles, de scies d'autopsie, du matériel de microbiologie et d'hématologie, en plus d'un appareil d'hémodialyse. A Signaler également qu'une autre enveloppe d'un montant d'un million de dinars est consacrée à l'acquisition de matériel médical. Le contingent a déjà fait l'objet d'un appel d'offres. Volet rénovation Une autre enveloppe d'un montant de 1,4 million de dinars est consacrée aux travaux de rénovation. Ces travaux concernent les blocs opératoires, le service de réanimation, le service d'exploration fonctionnelle et le service de neurologie, en plus du volet relatif à l'hygiène et au rejet d'ordures et de tout ce qui est vide sanitaire. Il s'agit là d'un chantier grandiose qui porte entre autres sur les revêtements muraux, la peinture, le faux plafond, l'éclairage etc. À titre d'exemple, rien que les travaux de badigeonnage nécessitent un montant de 500 mille dinars Médicaments: la rationalisation Il a fallu s'attaquer également à la question épineuse et quasi générale dans les établissements hospitaliers à savoir la pénurie de médicaments. Nous avons pris à ce propos différentes mesures destinées à instaurer une gestion saine des d'achats particulièrement pour ce qui est des dispositifs médicaux, des appels d'offres et des consultations mais aussi concernant la répartition des médicaments au niveau des services. Les mesures sont bien entendu prises dans un objectif de rationalisation. C'est ainsi que les médicaments sont délivrés aux différents services sur la base d'ordonnances médicales. D'autre part, certains médicaments ne sont plus prescrits que par un médecin senior Le respect du malade Le directeur général de l'hôpital Habib Bourguiba a insisté également sur l'intérêt qu'il porte au respect du malade et a fait savoir que des instructions claires ont été données pour que toutes les doléances des patients soient prises en considération. Il a indiqué qu'un bureau d'accueil et d'orientation des malades et de leurs accompagnateurs est en cours d'aménagement Préservation des droits acquis des agents Abordant justement le volet des récriminations du syndicat des agents de l'établissement concernant l'annulation de certains droits acquis, notre interlocuteur précise: « L'administration n'est revenue sur aucun de ces acquis mais le paradoxe c'est qu'on reconnaît mes prérogatives quand il s'agit d'accorder les droits acquis tout en les contestant pour les autres mesures. Chacun aura tous ses droits, mais au moins que je puisse accéder à mon bureau pour répondre à toutes les demandes légitimes. Concernant les médicaments hors nomenclature que les agents pouvaient acheter auprès d'une pharmacie privée, selon un accord conclu avec une direction précédente de l'hôpital, il a été décidé, que c'est désormais l'administration de l'établissement qui va se charger d'en faire l'acquisition elle-même et de les distribuer par la suite aux intéressés. Ce qu'elle a déjà fait depuis hier. Quant à la tempête soulevée précédemment par le syndicat, elle portait en vérité non pas sur un médicament mais sur un complément alimentaires »