Il a été le seul à avoir annoncé son retrait de la formation du gouvernement d'union nationale, en août dernier, pour se consacrer, entièrement, aux affaires partisanes. Cependant, et pendant que les négociations battaient leur plein à Dar Dhiafa, Yassine Brahim, ancien ministre de l'Investissement, du développement et de la coopération internationale, avait tiré à boulets rouges sur deux actuels ministres : Abid Briki et Mehdi Ben Gharbi. Ils ont été dans le collimateur du président d'Afek Tounes qui n'a pas caché ses critiqués sévères à l'encontre de leur nomination. Une telle attitude a valu à Yassine Brahim une vague de mécontentement surtout à l'intérieur de son propre parti. Au cours de cet entretien, Yassine Brahim est revenu sur la réalité du parti et ses ambitions pour le futur. -Le Temps : Depuis le changement du gouvernement, Afek Tounes semble avoir pris ses distances de la scène politique. Certains expliquent cela par une crise que traverserait le parti tandis que d'autres assurent qu'il y a eu une sorte de putsch à votre encontre au sein du parti. Qu'elle est la réalité d'Afek Tounes aujourd'hui ? Yassine Brahim : Il y a en effet eu des sorties de presse de quelques leaders du parti, à l'instar de Riadh Mouakher qui est membre du gouvernement aujourd'hui, qui ont provoqué ce genre de propos. Comme tous les partis, le nôtre est passé par un moment difficile lors du grand débat concernant notre participation ou pas au gouvernement d'union nationale. Les dirigeants et les militants du parti étaient vraiment partagés à ce sujet. On a eu l'intelligence, un certain dimanche, au lendemain de l'annonce de la composition du gouvernement de Youssef Chahed, de relancer les discussions et d'éviter des élections internes qui auraient certainement accentué le débat. Le mercredi d'après – suite aux discussions avec le président du gouvernement – nous avions voté notre participation à l'équipe gouvernementale avec un large consensus. Il y a eu, bien-sûr, des personnes déçues de cette décision et cela a provoqué quelques petits contretemps. Afek Tounes a toujours su garder ses conflits et ses débats à un certain niveau. On continue à gérer les déceptions de tout le monde et, très sincèrement, le tout se passe avec beaucoup de sérénité. -Comme tous les autres partis politiques, le vôtre se prépare pour mener la prochaine étape électorale qui est celle des municipales. Pensez-vous à des alliances ou à des fusions pour cette occasion ? On a toujours été ouvert aux alliances électorales voire postélectorales mais pas aux fusions sincèrement. Actuellement, on travaille sur les municipales comme si on y allait seul – parce que c'est la bonne façon d'agir. Pour ces élections, le travail essentiel doit se faire, essentiellement et directement, avec les citoyens et avec la société civile. Il faut qu'on ait, dans chaque ville où l'on se présentera, les meilleurs candidats possibles. Cette méthode sera la nôtre au niveau des régions où nous sommes bien implantés et un peu moins dans celles où n'avons pas la présence nécessaire. Par ailleurs, nous gardons avec tous les partis politiques de qui nous sommes proches et, à un moment, on les contactera pour étudier les possibilités d'alliances et voir si elles seront d'ordre national ou régional. Même pour les élections législatives précédentes, Afek Tounes était pour des alliances. Le souci, à l'époque, c'est que le mouvement de Nidaa Tounes voulait y aller avec son nom. La question de l'alliance est toujours d'actualité pour nous parce qu'elle peut servir les intérêts communs. -Et qu'en est-il de vos propres ambitions politiques ? En 2014, vous aviez préféré ne pas porter de candidats à l'élection présidentielle. Pensez-vous que vous serez le candidat présidentiel d'Afek Tounes à la Présidentielle de 2019 ? Avec l'avènement de la révolution, j'ai arrêté brusquement une vie professionnelle pour me consacrer à la politique. Et je pense que c'est tout le concours de la vie qui fait que le leadership existe ou n'existe pas. L'action politique, pour moi, doit s'inscrire dans le long terme ; l'objectif primordial c'est de construire une organisation politique qui peut contribuer à changer le pays et je dis bien qui peut contribuer, parce que je n'ai pas la prétention d'être le seul parti à pouvoir le faire. Je pense qu'on a choisi la bonne voie à Afek Tounes et je considère que l'on doit garder le cap et aller jusqu'au bout de notre mission. Si au cours de cette même mission je serais appelé à assurer une responsabilité, comme je l'avais fait avec mon poste de ministre, je le ferais. 2019 est encore loin, d'ici là, Afek Tounes pourrait intégrer de nouvelles personnalités politiques qui seront plus à même pour une candidature pareille ou peut-être campera sur sa position de 2014 en ne présentant aucun candidat pour la Présidentielle. Ce qui nous intéresse, c'est vraiment les élections législatives et la représentation du parti au niveau du Parlement. La question est très ouverte et n'est liée à personne ni à mon ambition personnelle.