Les élections présidentielles et législatives viennent de livrer leurs « secrets », sans vraiment grandes surprises. Le paysage politique tunisien reste le même avec une large domination du Rassemblement Constitutionnel Démocratique sur la nouvelle composition de la chambre des députés. La nouvelle carte de la coupole de Bardo se présente comme suit: 161 sièges pour le RCD, MDS (16), PUP (12), UDU (9), PSL (8), PVP (6) et Ettajdid (2). Loin de l'analyse purement politique des résultats de cette élection législative, ainsi que l'évaluation des perdants et des gagnants et les différentes attentes des uns et des autres, les nouveaux députés de la nation auront du pain sur la planche durant les 5 prochaines années et ils ne vont pas chômer. En effet, plusieurs dossiers les attendent puisque le train des réformes ne s'arrête jamais en Tunisie. La mise en œuvre du programme présidentiel, ainsi que la conjoncture économique nationale et internationale nécessiteront certainement un effort considérable de la part de nos députés du RCD et ceux de « l'opposition ».
Des dossiers et une conjoncture: Les nouveaux députés entreront directement dans le vif du sujet une fois la session parlementaire ouverte. Ils auront surtout le budget de l'Etat et la loi des finances à discuter, sur fond de crise économique qui a impacté les principaux secteurs économiques de la Tunisie. C'est un budget qui doit prendre en considération les différents paramètres de l'équilibre budgétaire et le respect des équilibres macro économiques. La loi des finances doit aussi booster l'effort national de l'investissement et de l'emploi et surtout soutenir les secteurs qui ont subi les effets de la crise économique. Les députés doivent prendre en considération certains paramètres conjoncturels : - Une éventuelle saison agricole qui s'annonce bonne pour le secteur de la production céréalière et l'huile d'olive. Ces deux produits donneront certainement une bouffée d'oxygène pour nos finances publiques au niveau de l'importation de nos besoins en blé, et soutiendront nos exportations agroalimentaires pour ce qui est de l'huile d'olive. - Une possible augmentation des prix du pétrole durant les prochains mois vu les signes de reprise économique. Le cours actuel du brut vient de dépasser les 80 dollars après des semaines entre 60 et 70 dollars. Ceci aura un effet sur le budget alloué à la subvention des hydrocarbures. - Une année 2010 qui sera placée sous le signe de la reprise à l'échelle internationale. Les questions économiques qui seront discutées au cours de la prochaine session doivent être en symbiose avec la politique sociale du pays. Une grande part du budget de l'état pour l'année prochaine sera allouée aux interventions sociales et à l'emploi. Les députés auront à discuter un budget en hausse de 5.4% par rapport à celui de cette année atteignant un montant de 18 335 MD. « Cette augmentation touchera principalement les crédits alloués aux équipements et aux aspects sociaux. Dans ce budget les crédits alloués aux salaires augmentent de 8% par rapport à 2009 ». Le budget 2010 subira aussi la charge de recrutement de 16 000 nouveaux fonctionnaires dont 3000 dans le cadre d'un programme exceptionnel. Malgré la crise et ces retombées, le budget alloué au développement continuera sa croissance et augmentera de 18% par rapport à 2009, soit un passage de 3900 millions à 4600 millions de dinars. Il s'agira surtout de projets d'infrastructures. Concernant la loi des finances pour l'année 2010, les députés auront à examiner de nouvelles dispositions pour soutenir les principales priorités économiques du pays. Il s'agira de discuter o « des mesures visant à renforcer davantage la compétitivité de l'entreprise, à impulser l'investissement, à dynamiser l'emploi et à consolider les opportunités d'exportation à travers l'assouplissement des procédures afférentes au commerce extérieur; o la poursuite de la modernisation du système fiscal et un ciblage plus poussé des dispositions visant à inciter l'initiative économique et à alléger les charges supportées par les entreprises de production; o la simplification des procédures du contrôle fiscal et la clarification de leurs modalités et ce en vue de consacrer la conciliation entre l'administration et le citoyen en la matière et la concrétisation des principes de la transparence et de l'équité fiscale. Les députés auront aussi l'occasion de discuter les prochains budgets de l'état dans le cadre des nouvelles orientations fixées dans le plan de développement glissant 2010-2014 et qui va prendre en considération de nouvelles orientations à la lumière de la conjoncture actuelle.
Un programme présidentiel à mettre en œuvre : Durant les 5 prochaines années de leur travail à la chambre des députés, les représentants du peuple auront la lourde tâche de mettre en œuvre les principales mesures et projets contenus dans le programme présidentiel « Ensemble, relevons les défis ». Plusieurs projets de lois et amendements seront présentés pour permettre la mise en œuvre des 24 points du programme. Les principaux dossiers à discuter seront : - uniformiser l'âge de la majorité civile et créer un régime pénal spécifique aux jeunes âgés de 18 à 21 ans, ainsi que la création des instruments juridiques appropriés pour protéger l'enfant et prendre en compte sa situation particulière au cours de l'enquête, de l'instruction et du procès dans les affaires ayant trait à la violence physique ou sexuelle. - L'amélioration du revenu par tête d'habitant, en le portant de 5.000 dinars actuellement à 7.000 dinars en 2014 - Création de 425.000 postes d'emploi au cours du prochain quinquennat. - Mettre en œuvre le service civil dans l'attente de l'insertion dans la vie professionnelle. - Renforcement de la présence de la femme dans les centres de décision pour atteindre un taux de présence d'au moins 35%, - Renforcer la compétitivité de l'économie nationale, stimuler davantage l'esprit d'initiative, encourager l'innovation et la création et promouvoir les secteurs et les activités à fort contenu technologique et à haute valeur ajoutée. - Réaliser la convertibilité totale du dinar tunisien avant la fin de l'année 2014 - Développer le marché financier. - Adopter les mesures qui permettront de faire de la Tunisie un pôle régional de services financiers - Atteindre un niveau élevé de modernisation des prestations de l'administration publique et améliorer davantage les relations entre l'administration et le citoyen à travers la promotion de l'administration électronique Et pas mal d'autres sujets et projets qui seront mis à l'examen et au vote des députés. L'essentiel c'est d'accorder l'intérêt nécessaire aux sujets qui seront discutés, et nous ne doutons pas du sérieux de nos futurs représentants. De leurs côtés les membres de l'opposition doivent avoir un rôle constructif et présenter dans la transparence totale et dans le respect, leurs visions des différents sujets et projets qui seront discutés. En effet, c'est la différence qui crée la richesse. Il faut couper court avec les positions négatives et l'abstention continue en tant que signe de désagrément. Les nouveaux députés doivent s'armer d'imagination, d'innovation et d'esprit critique pour exécuter dûment leurs mandats et revêtir l'activité parlementaire de l'efficacité attendue.