Que se passe-t-il au Mali ? Pourquoi a-t-on l'impression que se qui s'y passe relève plutôt de l'imprévu ? Pourquoi il y a comme le sentiment que ce qui se passe dans cette contrée a chamboulé pas mal d'agendas ? Pourquoi tout le processus enclenché suite au soi-disant printemps arabe semble soudainement figé en stand-by, en attendant peut-être la résolution de ce conflit d'au-delà des dunes ? Pourquoi les puissances occidentales se sont-elles trouvées dans l'obligation d'une intervention dans l'urgence, non programmée, non préparée et initiée avant même la l'obtention officielle du mandat des Nations unies ? Autant de questions qui restent, à l'état actuel des choses, sans réponses convaincantes. En effet, ce qui se passe au mali semble avoir pris de court tous les acteurs qui trônent depuis plus de deux ans sur la scène décisionnelle en rapport avec la région du monde arabe, en proie à des soulèvements en série. Il y a un bouquet de signes qui ne trompent pas, et qui confortent dans l'idée que le conflit malien est un « imprévu ». Ce conflit, comme tant d'autres a commencé par une insurrection interne conduite par les Touaregs, en mal d'identité et de territoire. Ceux-ci ont vite été rejoints par des groupes islamistes, trois groupes en tout. Deux groupes qu'on dira « autochtones » et un groupe composé de combattants arabes d'obédience à la nébuleuse terroriste d'Al Qaïda. Les deux premiers groupes, et à la faveur d'un « malheureux » coup d'état militaire au Mali, ont rejoint le mouvement de rébellion Touareg, et ont investi le nord du pays, en s'autoproclamant « territoire islamique autonome ». C'est alors, qu'intervint le troisième groupe, qui a accouru à la mêlée. En fait, nul ne sait avec certitude si ce troisième groupe est arrivé pour soutenir les deux premiers dans leur démarche pour la création d'un état islamique au sud du Maghreb Arabe et en faire une base avancée d'Al Qaïda, à quelques encablures des intérêts européens dans la région, ou (rien n'est impossible) pour infiltrer ces groupes et connaitre leurs intentions et les aboutissements de leurs projets, voire éventuellement, les contrôler si jamais cela s'avérait nécessaire. Toujours est-il, qu'au cours de ce processus, il y a un déclic qui s'est opéré. Quand, et où, cela reste encore obscur. Un déclic imprévu qui a fait que tout un processus lancé depuis deux ans, à coups de milliards de Dollars, et de milliers de vies humaines, semble s'être arrêté net. Tout ce qui a été initié semble en état « d'attente ». En Egypte, tout s'est arrêté. On parle de dissolution de telle chambre et de tel conseil, on parle de décision reportée pour des raisons inconnues, on parle même de reprendre le procès de Hosni Moubarak et de ses lieutenants pour les supposées exactions commises lors de la révolution égyptienne. En Tunisie, on assiste de la même manière à une halte de tout le processus. Tout semble figé, on attend toujours un remaniement qui n'arrive point, on entend parler de coalitions et d'alliances qui se nouent, qui se dénouent, des protagonistes qui se réconcilient, des alliés qui se fâchent et se séparent. On commence, même, çà et là, rien qu'à voir certains plateaux TV, à entendre des revendications dans le sens de vouloir savoir et comprendre ce qui s'était réellement passé le fameux 14 janvier 2011. Même en Syrie, où les combats font toujours rage, on a l'impression que le conflit est parti pour s'enliser. Les rebelles commencent même à déclarer qu'ils auraient été abandonnés par leurs « bailleurs de fonds ». Mais plus que ce « Stand-by », il y a carrément, une sorte de revirement de la situation. Il y a la France qui se jette en toute hâte dans un conflit pour mâter, cette fois-ci un mouvement de rébellion, et se ranger du côté de « la légitimité » du pouvoir en place. Ce qui démontre d'un virage à 180 degrés dans les positions de ce pays qui s'était engagé corps et âme en Libye pour déloger et même pour achever le régime de Gueddafi, et qui ne s'est jamais caché d'aider les rebelles syriens contre le régime d'Al Assad. Il y a aussi, et surtout, la prise de position de l'Algérie dans ce conflit malien, prise de position floue et qui prête à équivoque. L'Algérie ayant refusé dès le départ toute intervention en terre malienne, et tous les pourparlers du monde ne l'ont pas fait fléchir sur sa position, y compris ceux menés par François Hollande lors de sa dernière visite d'Etat en Algérie. On dirait que l'Algérie appréhendait de rentrer dans un conflit et d'y engager ses troupes au risque de baisser sa garde dans d'autres parties de son territoire qui doivent probablement lui procurer des soucis. Et c'est d'ailleurs, dans ce même sens d'idées que s'insère la dernière réunion de haut niveau qui a regroupé les chefs des gouvernements algérien, tunisien et libyen à Ghadames où les rôles ont été partagés pour assurer la sécurité des frontières sud des trois pays en prévision d'un éventuel reflux des rebelles sous la pression de la contre offensive franco-malienne ( tiens, d'ailleurs, au moment de ladite réunion, il n'y avait pas encore de décision officielle de mener cette offensive !!). A y regarder encore de plus près, il ne serait pas exclu que la décision de fermeture des postes frontaliers entre la Tunisie et la Libye, rentre aussi dans le cadre de cette stratégie de défense, qui semble pourtant contraire aux convictions des deux gouvernements, dans le sens de bloquer les corridors qui servaient à faire transiter les armes et les combattants. Au final, une seule chose est sûre, dans toute cette histoire, c'est que ce qui se passe au Mali est un « imprévu », et que nous sommes peut être en phase d'assister à un virage dans toute la géopolitique de la région. Les jours et semaines à venir apporteront probablement des éléments de réponse à toutes ces questions. En attendant, une bonne dose de sédatif ne serait pas de refus !