TUNIS (TAP, par Sarra Belguith) - Tourné dans les centres d'accueil de Mineo, Manduria et Palazzo San Gervasio en Italie, le film documentaire italien "Nos meilleures années : de la révolution tunisienne à l'Europe forteresse, histoires de migrants et de la police", de Matthieu et Stephen Collizzolli, sera projeté pour la première fois en Tunisie le 20 mars, à 15 heures, à la maison de la culture Ibn Khaldoun. Organisé par la Fédération Tunisienne des Ciné-Clubs (FTCC) dans le cadre du Festival "Cinéma de la Paix" et en collaboration avec l'Institut culturel italien de Tunis, ce rendez-vous cinématographique sera une occasion pour le large public de découvrir, sinon de mieux comprendre à travers ce documentaire italien de 45 minutes réalisé en 2011, ce qui est resté d'une révolution dans la vie des personnes qui l'ont traversée. Ce sont des histoires de ceux qui sont partis dans des barques et dont beaucoup n'ont plus donné de nouvelles. Le documentaire revient sur la révolution tunisienne, inattendue et explosive, à travers le récit de cinq jeunes tunisiens, qui se sont rencontrés dans ces centres d'accueil. Projeté pour la première fois le 26 janvier 2012 à Milan, ce film lance à travers ce récit, de petits clins d'oeil à une liberté, trop longtemps réprimée sous le régime de Ben Ali, qui explose tout à coup et aboutit à son départ, longuement convoité. "De la révolution tunisienne à l'Europe forteresse", ce sont ces histoires de migrants et de la police qui font l'axe majeur du film. Entre février et avril 2011, plus de 20 000 Tunisiens sont arrivés à Lampedusa. Le gouvernement italien a vite crié à l'invasion d'une horde de barbares, à un exode biblique, à un tsunami humain sans jamais parler de l'histoire de toutes ces personnes. Depuis ces centres d'accueil, cinq d'entre eux racontent leurs histoires: un long rêve pour les uns, et une occasion imprévue pour les autres. Les meilleurs années sont en fait les leurs: celles d'une génération longtemps privée de liberté et qui a aujourd'hui décidé d'en profiter au maximum. A la mémoire de ceux qui sont partis dans les barques et dont beaucoup n'ont plus donné de nouvelles Ce documentaire vient d'être sélectionné au Festival du cinéma d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine, de Milan dans deux sections "Extr'A" et "Le racisme est une histoire brutale". Il sera projeté à Milan le 25 mars prochain. Sa première projection le 26 janvier à Milan a aussi offert l'occasion de présenter l'appel des familles des tunisiens partis au cours des premiers mois de l'année 2011 et qui sont, à ce jour, portés disparus. Voici, à titre de rappel, quelques extraits du texte "bouleversant et émouvant" de la pétition lancée pour les migrants tunisiens disparus : "Peux-tu imaginer? Essaye d'imaginer : ton frère ou ton fils s'en va et ne donne plus de nouvelles. Est-il arrivé ? Tu ne le sais pas... Avec d'autres familles, tu demandes aux autorités de ton pays de s'informer, de savoir s'ils sont tous dans une prison quelconque, tu espères qu'ils le soient, même si tu crains qu'ils ne soient pas bien traités. Mais les autorités ne font rien, ne demandent rien et ne t'écoutent pas, pendant des mois. Pendant ce temps, tu fais des "sit-in", des manifestations, tu parles avec les représentants d'associations, avec les journalistes, tu apportes partout la photo de ton fils ou de ton frère... Tu veux savoir. Mais rien ne se produit...et tu commences à imaginer : il pourrait être dans une cellule d'isolement, il pourrait avoir été arrêté comme passeur, il pourrait s'être révolté dans le centre de rétention, il pourrait… Il pourrait être en Italie, mais peut-être à Malte, peut-être en Libye. Peux-tu imaginer ? Pour certaines et certains d'entre nous, il ne s'agit pas d'imaginer car c'est cela qui nous est arrivé. Ils sont partis de la Tunisie dans des barques et beaucoup n'ont plus donné de nouvelles. Sont-ils morts ? En prison ? Sont-ils...Peux-tu imaginer ? Si tu réussis à imaginer, nous te demandons de soutenir cet appel".