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Mort du général Aussaresses, qui revendiquait le recours à la torture en Algérie
Publié dans Tuniscope le 04 - 12 - 2013

Le nom de Paul Aussaresses, dont la mort a été annoncée par l'association d'anciens parachutistes Qui ose gagne, mercredi 4 décembre, restera pour toujours lié à l'idée de scandale. Le vieux général à l'œil bandé (une opération de la cataracte ayant mal tourné) avait-il mesuré la tempête qu'il allait provoquer en brisant la loi du silence à propos de la torture en Algérie, à l'automne 2000 à l'époque ? Certainement pas.
De l'aveu même de ses proches, Paul Aussaresses a toujours été une énigme. Né près de Bordeaux, en 1918, dans une famille bourgeoise, élève puis étudiant studieux, féru de Virgile et de Racine, mais aussi de Baudelaire et Péguy, il rejoint les Forces interalliées à Londres en 1943 et intègre les services spéciaux. Il reçoit de nombreuses médailles, à commencer par la Légion d'honneur, pour ses actes de bravoure. Il saute ainsi en parachute, en uniforme allemand, derrière les lignes allemandes, en avril 1945, pour ouvrir les camps de prisonniers et de déportés et leur apporter les instructions des Alliés.
Après la guerre, ce héros de la France libre participe à la création du 11e Choc, le bras armé du SDECE (Service de documentation extérieure et de contre-espionnage), sa plus grande fierté. A la tête d'un bataillon parachutiste, il part ensuite en Indochine où il sert sous les ordres du général Pâris de Bollardière, qu'il vénère. S'il était resté auprès du plus célèbre des militants antitorture, le cours de sa vie en aurait peut-être été changé. Mais le général Massu l'appelle à ses côtés en 1957 et lui demande d'appliquer à Alger les méthodes qu'il a utilisées l'année précédente à Philippeville et qui ont fait la preuve de leur «efficacité». Le «commandantO», alias Aussaresses, va s'y employer sans état d'âme, au point de finir par effrayer ses supérieurs.
Homme de l'ombre
Pourquoi cet homme de l'ombre, résolument apolitique, qui a inspiré plusieurs écrivains – Robert Escarpit, Jean Lartéguy et Yves Courrière notamment – décide-t-il, à 82 ans, de livrer les secrets de famille de la Grande Muette? Parce que l'occasion de parler lui est alors donnée par le journal Le Monde. Sa vieillesse, à l'opposé de sa vie, est désespérément terne. Il s'ennuie. Pour rompre la monotonie de ses journées – en aucun cas pour soulager sa conscience –, Aussaresses accepte le principe d'une longue interview qui se déroulera en plusieurs étapes, entre septembre et octobre 2000.
Au cours de petits déjeuners bihebdomadaires, il raconte sa vie. C'est ainsi qu'il dévoile les méthodes avec lesquelles l'armée française a combattu les partisans de l'indépendance, pendant la bataille d'Alger, en 1957. Escadrons de la mort, tortures, exécutions sommaires…. Aussaresses dit tout, avec un ton d'une indifférence stupéfiante. «Sans remords ni regrets», répète-t-il invariablement, comme s'il lui fallait se protéger de l'opprobre que ses révélations suscitent. L'entretien paraît dans les colonnes du Monde le 22 novembre 2000. En France et en Algérie, c'est la stupeur.
Lire aussi : Comment "Le Monde” a relancé le débat sur la torture en Algérie
Six mois plus tard, le général Aussaresses réitère ses propos avec Services spéciaux, Algérie 1955-1957 (Perrin). Il s'agit, en réalité, de la transcription de ses déclarations au SHAT, le service historique de l'armée de terre, qui l'a contacté à la suite de son entretien publié dans Le Monde. On découvre qu'en mars1957, à Alger, Aussaresses a pendu Larbi Ben M'Hidi, considéré en Algérie comme une figure semblable à Jean Moulin, et fait précipiter dans le vide Ali Boumendjel, un avocat engagé auprès du FLN. La thèse officielle donnée par l'armée française était – et reste toujours – que ces deux hommes se sont suicidés. Le scandale est considérable. Aussaresses est déchu de sa Légion d'honneur, sur ordre de Jacques Chirac, et poursuivi par la justice française pour «apologie de la torture».
Renié par ses filles, menacé de mort
La vie du vieux général bascule. Ses trois filles le renient. L'une d'elles refuse deporter désormais son nom. Son épouse, Odile Charton, une ancienne résistante, qui a fait partie du fameux réseau Brutus de Gaston Defferre, ne quitte plus son lit. Elle meurt quelques mois plus tard. Quant à la seconde famille d'Aussaresses – l'armée –, elle lui tourne le dos. Certains généraux à la retraite – en particulier, un ancien chef d'Etat-major des armées – craignent d'autres révélations, les mettant en cause directement… Aussaresses reçoit des menaces. A trois reprises, il est visé par des attentats : deux fois, un colis piégé est désamorcé sur le palier de son domicile parisien. Et un jour, sur la place de la Bastille, il échappe de justesse à une balle. Un de ses amis, qui l'accompagne et lui sert de garde du corps, reçoit le projectile dans la cuisse.
Paul Aussaresses ne comprend pas ce qui lui arrive. Ainsi, on le condamne de tous côtés, non pour ce qu'il a fait, mais pour ce qu'il a dit. Jusqu'à sa mort, il ruminera ce qu'il considère être comme une injustice profonde.
En 2002, sa vie retrouve un semblant de calme. Il épouse une ex-antiquaire de 79 ans, Elvire, une Alsacienne, médaillée de la résistance à 17 ans. C'est une forte personnalité, qui ne voit en lui que le héros de la France libre. Le couple s'installe à la campagne, dans la région de Strasbourg, uni par un même tempérament provocateur. Ils se lancent dans la rédaction d'un nouvel ouvrage, avec l'aide d'un écrivain et réalisateur indépendant, Jean-Charles Deniau, Je n'ai pas tout dit (Ed. du Rocher, 2008).
Dans ce livre, Paul Aussaresses laisse entendre qu'il connaît la vérité sur le sort de Maurice Audin, ce jeune mathématicien «disparu» en 1957 à Alger, après avoirété arrêté par les parachutistes français. Il révèle au passage qu'il a demandé au général Massu (avant la mort de ce dernier, en octobre 2002) de le délivrer du pacte de silence qu'ils ont conclu, cinquante ans plus tôt, sur l'affaire Audin. Mais Massu a refusé. Paul Aussaresses, à regret, s'est incliné. Il est parti dans la tombe en gardant ce secret, au désespoir de Josette Audin, la veuve du jeune mathématicien, et de sa famille.


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