La contestation est partie de Kasserine. Entre violence de réaction et de contre-réaction d'un côté et tentative de dialogue de l'autre, il était clair que quelque chose se préparait, comme un début d'émeutes que d'aucuns n'hésitent pas à appeler « une seconde révolution ». Dans les différents médias, autant la compassion était générale avec les manifestants, autant certaines suspicions étaient soulignées quant à une éventuelle manipulation des catégories sociales défavorisées et de leur mécontentement. Même Mohsen Marzouk, sur le plateau de Meriem Belkadhi, n'a pas justifié cet état des choses par une hésitation à mettre en place un gouvernement politiquement responsable, avec un programme préalablement entendu et clairement expliqué aux citoyens. Aujourd'hui, 20 janvier, ce fameux janvier de toutes les marmites bouillonnantes, il y a comme une propagation quasi-généralisée de la colère : Kasserine, Sousse, Seliana, Zoghouan, El Fahs, Feriana, Thala, Béja Ben Guerane, Kairouan et même certaines artères de la Capitale. Tous ces noms sont évoqués comme des lieux de tension et les citoyens sont entre la curiosité interrogative et la prière que rien de grave n'affecte l'espoir d'une paix sociale encore fragile malgré la conclusion des négociations sociales. En gros, on est soit dans le soutien du mouvement de Kasserine, soit dans le constat que le cancer du chômage ne cesse de s'amplifier. On annonce même des suicides par immolation ; il y en aurait trois déjà. Cependant, des rumeurs circulent sur l'implication de certaines mouvances politiques dans l'instigation du mécontentement en vue de le généraliser, argent à l'appui s'il le faut, de façon à donner les signes pesants d'une deuxième phase révolutionnaire. D'une manière ou d'une autre, il y a surtout un constat de défaillance généralisée, imputable à toutes les forces en présence et à toutes les instances impliquées. Aux citoyens et à la société civile aussi. En tout état de fait, ce n'est sûrement pas ce qui se trame aujourd'hui qui constituerait le meilleur moyen pour la Tunisie de se sentir mieux.