Le CB est un terme anglais signifiant une centrale d'informations sur le crédit. Le Bureau constitue une base de données sur les demandeurs potentiels de crédits particuliers et entreprises et fournit des informations sur leurs profils aux institutions financières ou autres selon qu'elles soient positives, c'est-à-dire que le client est solvable, responsable et intègre et/ou négatives si le demandeur a des précédents d'impayés ou de contentieux. Aux dires de Omar El Matri, fondateur de Maghreb Credit , son bureau envisage de collecter et gérer des informations tant positives que négatives provenant de plusieurs sources et secteurs d'activités tels les banques, les télécommunications, les organismes utilitaires et autres pour permettre à ses adhérents de disposer d'indications crédibles, riches et complètes et de modèles prédictifs (de scoring) puissants. Pour lui, le lancement d'une telle activité en Tunisie est assez importante, et en ces temps de crise, elle s'avère nécessaire d'autant plus que "des études empiriques menées dans plusieurs pays prouvent l'apport d'une information multi-secteurs et complète dans la réduction significative du taux d'impayés et l'augmentation du taux d'acceptation en matière de crédit (pour un même niveau de risque)". Maghreb Credit se propose en somme de retracer l'histoire du demandeur de crédit sur au moins cinq années. Tous les établissements de crédits adhérents au bureau auront bien entendu le droit d'accéder à l'information. M. Taoufik Baccar, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, qui a ouvert samedi 14 février 2009 le séminaire organisé à l'IACE par Maghreb Credit et intitulé «Une meilleure gestion des risques du crédit : Credit Bureau», n'a pas manqué pour sa part de rappeler l'importance d'un débat sur les risque de crédit dans une conjoncture internationale assez difficile au vu de la crise financière. Il a précisé qu'il est de la plus haute importance pour tout système bancaire de disposer d'un mécanisme de collecte de l'information qui permet «d'évaluer le risque de défaut des demandeurs de crédit et d'atténuer l'asymétrie des informations qui peut exister entre les banques et leurs clients et qui pourrait se traduire soit par un manque à gagner lorsqu'on exclut un client solvable, soit par des pertes réelles lorsqu'on décide de financer un mauvais payeur» La centrale des risques créée à la Banque centrale chargée depuis 35 ans de rassembler pour le compte du système bancaire les informations financières sur les emprunteurs et de recenser l'endettement des opérateurs économiques et suivre son évolution ne pouvant suivre l'évolution rapide des activités financières et bancaires a été revue et réorganisée à l'occasion du programme de modernisation de la banque centrale. Une refonte du système de centralisation des informations de la banque a abouti à la réalisation d'un ensemble intégré de bases de données renseignant jusqu'au détail élémentaire sur la nature, la forme, le terme et l'état de recouvrement des engagements professionnels et non professionnels, sur les créances non performantes, la situation financière des entreprises et les incidents de paiement de chèques. Toutefois, l'existence de la centrale d'informations de la BCT n'est pas contradictoire avec l'existence de structures similaires, tels les Credit bureau sous peine de l'intervention du «législateur pour organiser le métier et définir un cadre strict à la communication d'informations avec les Bredit Bureaux», précise le gouverneur de la Banque centrale qui ajoute que ce n'est pas la seule voie organisationnelle en Tunisie pour pouvoir pratiquer l'activité des Credit bureau puisque dans des pays dont les législations sont similaires à celles de note pays, existent des Credit Bureau. «Rien n'interdit à ce que centrales publiques d'informations et Credit Bureau coexistent ensemble dans la mesure où le contenu des informations qui y sont consignées ne sont pas nécessairement identiques», précise M. Taoufik Baccar. Le Credit Bureau : une fatalité ? Quel besoin d'avoir un Credit Bureau lorsque comme le précise le gouverneur de la BCT, nous disposons d'une centrale d'informations qui constitue «un excellent outil d'aide à la décision en ce qu'elle permet de renseigner sur la situation financière des entreprises et des particuliers et leur capacité à rembourser leurs dettes ?» La mise en place d'un CB n'est pas un luxe ni un produit exotique à l'utilité marginale, répond Ahmed Benghazi d'Axis Capital. Le CB doit être vu comme un instrument de plus dans une infrastructure financière, pour laquelle il y a une volonté et des objectifs de modernisation d'autant plus qu'il ne concurrence aucune structure existante mais plutôt l'enrichit. Dans son intervention à l'occasion du séminaire, M. Benghazi a précisé que les créances classées des IF, dans notre pays, se situent à un taux élevé, malgré une évolution positive ces dernières années. Le DG d'Axis Capital affirme que les impayés des entreprises restent importants, ce qui est bien établi dans la réalité. Sans oublier que le recouvrement difficile et le taux de contentieux élevé. Les conséquences en sont, entre autres, des retards de paiement, qui affectent la gestion de la trésorerie, des pertes de provisions directes qui affectent la rentabilité, du temps perdu à gérer les impayés et les opérations de recouvrement La Tunisie a pendant longtemps encouragé une politique volontariste d'expansion du crédit dans l'optique d'encourager la création des entreprises et de l'emploi, parallèlement, a indiqué Ahmed Benghazi, la gestion du risque de crédit est restée faible avec parfois une absence de processus formalisés d'analyse du risque. «Le système, ajoute t-il, est aujourd'hui plus complet et plus accessible mais limité puisqu'il ne couvre pas les crédits entreprises et la CNSS et ne donne pas un ''scoring'' et un «rating». Le Credit Bureau a, pour sa part, l'avantage de donner les indicateurs synthétiques qui permettent de se faire une idée globale sur le risque et de prendre une décision rapidement. Il permet d'élargir le champ de couverture par rapport à l'agence de notation, qui s'adresse à une catégorie plutôt de grande entreprise, réduire les coûts du crédit et élargir la base de crédit. M. Benghazi a appelé au renforcement de l'architecture institutionnelle en Tunisie afin de se donner les moyens de mieux maîtriser le risque de crédit, «qui coûte cher aujourd'hui et qui pénalise notre économie». Un CB, qui obéit aux principes du respect des objectifs de l'industrie du crédit, des droits des consommateurs et de leurs besoins en crédit, est par conséquent utile. Credit Bureau : pour que les bons payeurs ne soient pas pénalisés à cause des mauvais Pour réussir l'entreprise d'un Credit Bureau, il faudrait convaincre les opérateurs du secteur financier et celui du crédit de l'importance du partage de l'information et ses retombées positives sur les donneurs du crédits, les demandeurs en termes de rapidité d'accès et d'accord du crédit ainsi que du contrôle du taux d'endettement. Le rôle des autorités de tutelle reste important dans la mesure où elles assurent le rôle du dynamo de l'activité de Credit Bureau mais également de contrôleur de l'intégrité du système. Maghreb Credit, qui compte développer cette activité en Tunisie, envisage de lancer plusieurs services à valeur ajoutée dont le rapport de solvabilité et de Scoring, de Rating et de monitoring de portefeuilles, de détection de fraude et services pour les consommateurs. Le Credit Bureau a pour objectif principal, en récoltant toutes les informations relatives aux usagers et aux clients, et les soumettant à ses adhérents, d'éviter que les bons payeurs soient pénalisés à cause des mauvais payeurs et de développer le crédit avec le maximum de garanties basées sur des informations aussi fiables et exhaustives que possible. Le crédit serait ainsi accordé de manière plus responsable, le profil du client ayant été identifié au préalable. L'activité du CB a fait ses preuves pendant 60 ans et ce dans plus de 80 pays (en cours dans 40 autres) et est encouragée par la Banque mondiale, la SFI et le FMI, qui la considèrent comme un des éléments fondamentaux pour un système financier sain et stable, précise Omar El Matri, d'autant plus que l'étendue et la qualité des données gérées sont un critère pris en considération dans le rapport Doing Business. Un tel projet serait utile à ceux qui créent des entreprises, à ceux qui travaillent, particuliers et indépendants auxquels on accorde la possibilité de construire un foyer ou faire des études et une chance de réussir pour le mieux. Mais pour qu'un telle entreprise réussisse précise l'initiateur, Il faudrait avoir l'aval et le soutien du gouvernement à travers la BCT, le ministère des Finances, le MDCI, l'implication des établissements de crédit et des opérateurs de service public et de télécommunication, la collaboration des fournisseurs de données publiques, l'assistance de la Banque Mondiale et du SFI pour l'élaboration d'une loi spécifique intégrant les meilleures pratiques et surtout la confiance des consommateurs. Pour M. Taoufik Baccar, s'il est vrai que la force des banques réside dans la quantité et la qualité des informations dont elles disposent sur les emprunteurs, il est d'autant plus important qu'elles ont la capacité d'exploiter efficacement le volume de renseignements qu'elles possèdent «la Crise que traverse le monde de la finance en est d'ailleurs une parfaite illustration, précise le gouverneur, dans la mesure où elle a éclaté aux Etats-Unis, c'est-à-dire dans un pays où les structures de mobilisation et de traitement de l'information financière sont de l'avis de tous les plus développés».