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El Amra : épicentre de l'échec des autorités devant la crise migratoire
Publié dans Business News le 05 - 12 - 2023

À Sfax, le phénomène de la migration irrégulière prend des proportions dramatiques. Depuis des mois, le flux de candidats à l'embarcation vers l'Europe ne cesse d'augmenter suscitant des tensions dans certaines localités. Certains évoquent, encore et encore, une affaire de complot visant la Tunisie sur fond de propos racistes, d'autres dénoncent l'inaptitude de l'Etat à gérer efficacement et humainement cette crise.

La petite localité d'El Amra à Sfax est l'un des épicentres de cette crise. Fin novembre, une unité de la Garde nationale avait effectué une descente pour confisquer des embarcations de fortune dans le cadre d'une mission de lutte contre la migration illégale. Conséquence, l'unité avait été assaillie par un groupe de migrants subsahariens qui ont infligé des blessures plus ou moins graves à quatre agents de la Garde nationale. Par la suite, l'unité a dû appeler des renforts après qu'un des véhicules appartenant à la Garde nationale a été entièrement incendié. Vingt subsahariens et deux Tunisiens suspectés d'avoir agressé des sécuritaires seront arrêtés.
L'intervention de la Garde nationale avait forcément provoqué la colère des migrants qui se retrouvent coincés dans la localité dans des conditions inhumaines et qui ont payé des sommes importantes pour la traversée à bord des bateaux désormais détruits.
Ces événements ne constituent pas le premier incident dans la région de Sfax ou dans d'autres localités et villes tunisiennes. Cependant, à chaque incident, le problème des migrants irréguliers revient sur la scène et surtout la question se pose de nouveau sur la politique adoptée par les autorités pour y faire face.

À El Amra, des centaines de migrants hommes, femmes, enfants, nourrissons vivent dans les oliveraies. Ils ont été chassés des villes et se retrouvent à vivre sous les arbres sans moyens de subsistance. Ils veulent partir en Europe, mais la Tunisie les en empêche. Ils restent donc coincés dans cette petite localité à retenter d'embarquer. D'autres groupes de migrants viennent périodiquement s'ajouter à ceux déjà bloqués.
La situation est explosive. Ainsi les violences et les agressions se sont répétées de part et d'autre. Les habitants d'El Amra subissent ces vagues successives de migrants, impuissants et inquiets, alors que l'insécurité grimpe forcément. Ils sont victimes de vols, essentiellement des matelas, des draps, des vêtements, des bombonnes de gaz ou de la nourriture… Les migrants ont froid et faim.

Selon les chiffres avancés par le porte-parole de la Garde nationale Houssemeddine Jebabli, en 2021 près de 1.300 migrants ont été interceptés alors qu'ils tentaient d'entrer en Tunisie via les frontières terrestres. Ils seront près de 1.800 en 2022 et plus de 38.000 durant les onze mois de 2023. Ils seront aussi plus de 70.000 interceptés en mer au cours des tentatives de traversées, en plus de ceux qui restent bloqués en Tunisie.
Les propos du président de la République en février 2023, où il a parlé de complot visant à changer la composition démographique de la Tunisie, avaient suscité une grosse polémique. S'il a mis de l'eau dans son vin depuis, le postulat qu'il s'agit d'un plan criminel ourdi avec l'aide d'associations pour installer les migrants en Tunisie, reste prégnant dans le discours de nos autorités. Le constat est que le pouvoir en place a échoué dans son approche de la crise migratoire. D'abord, le traitement sécuritaire de ce phénomène ne donne pas de véritables résultats, du moment où les vagues de migration continuent quand même à déferler. Et il faudra s'attendre à des flux importants dans les prochains mois, alors que la junte militaire au Niger a abrogé fin novembre la loi criminalisant le trafic de migrants. Une loi qui faisait partie pour les Européens de leur politique d'externalisation des frontières.

Que fait la Tunisie entre-temps ? Elle continue à jouer au gendarme des frontières européennes tout en subissant des pressions accrues sur ses mêmes frontières avec la Libye et l'Algérie. Des frontières qui, au vu des chiffres officiels, semblent de plus en plus poreuses. L'état de fait imposé à la Tunisie par les Européens a engendré une situation inextricable sur notre sol. Dans leur approche purement sécuritaire de la crise, les autorités repoussent les groupes de migrants vers les zones intérieures, essentiellement rurales comme El Amra, afin de les éloigner des zones côtières où ont lieu les opérations de départ. Naturellement, cela créé une situation difficile pour les migrants irréguliers qui ne peuvent ni travailler, ni se déplacer. Ils sont tout bonnement bloqués ici et on ne leur dispense pas de lieux de résidence même temporaires. Ils n'ont donc d'autre choix que d'essayer encore et encore de fuir la Tunisie sauf qu'ils sont interceptés. Un cercle vicieux.
Il faut craindre les répercussions sécuritaires de cette situation des migrants en Tunisie. Une situation inhumaine qui poussera ces personnes fuyant la misère dans leur pays à se battre pour survivre. Ce qui est chose normale.

Nos autorités gagneraient à avoir, de prime abord, une réponse plus humaine en dispensant, par exemple, aux migrants bloqués la possibilité de résider dans des conditions qui préservent la dignité humaine. Des milliers de personnes, des êtres humains, vivent démunis sous les arbres aujourd'hui en Tunisie. Nos autorités devraient collaborer et pousser les organisations onusiennes et internationales à mobiliser leurs capacités matérielles et logistiques pour cette mission. Il existe des mécanismes de prise en charge des réfugiés et des demandeurs d'asile.
La Tunisie, qui traverse aussi une situation de crise, n'a pas à assumer seule les conséquences des politiques d'immigration européennes ni celles algériennes. Cette politique européenne d'externalisation des frontières et l'approche algérienne ont fait que la Tunisie soit devenue un point de passage facilement accessible aux frontières ouest et un point de sortie pratiquement impossible aux frontières maritimes.
Il ne s'agit pas d'un obscur complot comme les partisans du régime le répètent à tout bout de champ. Il s'agit d'un pouvoir qui cède aux pressions et n'arrive pas à gérer comme il se doit un dossier sensible. Il s'agit de rapports de force et de souveraineté en berne. L'enjeu est fondamentalement politique et on aurait mieux agi en faisant porter la responsabilité à une Union européenne dont la politique migratoire contribue à créer des crises en Tunisie ou ailleurs dans les pays du Sud.

La crise des migrants irréguliers en Tunisie tendra à s'aggraver tant qu'aucune solution concrète et des décisions fortes n'auront pas été prises par le pouvoir en place. Bien évidemment, des solutions pragmatiques, s'éloignant du populisme primaire, qui permettraient d'une part de préserver la dignité des migrants et d'assurer d'autre part la sécurité de l'Etat et de ses citoyens.


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