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Mehdi Ben Gharbia, le prisonnier oublié
Publié dans Business News le 21 - 03 - 2024

Détenu depuis octobre 2021, l'ancien ministre des Droits de l'Homme, Mehdi Ben Gharbia, attend un verdict de la cour de cassation qui tarde à venir. N'ayant pas cessé de clamer son innocence, disculpé par le juge d'instruction qui a traité son dossier, il continue à croupir en prison bien au-delà des délais légaux de détention. Plus terrible que cette mascarade judiciaire, le silence total de l'opposition et des médias qui se mobilisent pour tous les prisonniers politiques sauf Mehdi Ben Gharbia, le premier d'entre eux.

En Tunisie, le délai maximal de détention préventive est de quatorze mois. L'ancien ministre des Droits de l'Homme, Mehdi Ben Gharbia, est en détention depuis octobre 2021, soit 29 mois, et il continue encore à croupir en prison, sans cesse balloté entre les couloirs judiciaires.
Techniquement parlant, selon les règles fondamentales universelles de la justice et l'article 11 de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, Mehdi Ben Gharbia est innocent, tant qu'il n'a pas été condamné. Cet article 11 mentionne que : « Toute personne accusée d'un acte délictueux est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès public où toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées. »
Sauf que Mehdi Ben Gharbia semble être un homme au-dessous de la loi, sous le régime putschiste de Kaïs Saïed. Il a beau clamer son innocence, son juge a beau n'avoir rien trouvé pour l'inculper, il continue quand même à rester prisonnier.
Les faits remontent à octobre 2021, suite à l'ouverture d'une instruction judiciaire pour suspicions de blanchiment d'argent, de falsification et de diverses infractions fiscales.
Le juge d'instruction, près le tribunal de Sousse, a enquêté et consulté tous les organismes publics de contrôle allant de l'administration fiscale à la Commission tunisienne des analyses financières dépendant de la Banque centrale de Tunisie. Dès l'entame de l'enquête, le juge a émis un mandat de dépôt à l'encontre de l'ancien ministre, bien que rien ne justifie cette procédure. En droit universel, la prison doit être l'exception et la liberté la règle. Il a suffi de quelques mois d'enquête minutieuse, pour que le juge admette que son prévenu n'a rien fait de délictueux justifiant la poursuite de sa détention. Il décide de le libérer, mais c'était sans compter l'appel suspensif du parquet (dépendant hiérarchiquement du pouvoir exécutif) qui a maintenu M. Ben Gharbia en prison. Dans la foulée, une deuxième instruction a été ouverte en janvier 2022, suivie d'un second mandat de dépôt et toujours dans des affaires financières. En tout état de cause, si l'on suit la loi à la lettre, l'ancien ministre aurait dû être libéré en décembre 2022 ou, au pire, en mars 2023 si l'on compte les quatorze mois à partir du second mandat. On est en mars 2024 et il est encore en prison. Quant au juge qui a décidé de sa libération, il a été révoqué le 1er juin 2022 quelques jours seulement après sa décision de libérer M. Ben Gharbia.

Bien entendu, les avocats de l'ancien ministre (tous de grande renommée) ne se sont pas tus et ont saisi la cour de cassation, outre l'inspection et différents organismes internationaux. Curieusement, cette cour de cassation (la plus haute dans le système tunisien) tarde à se prononcer sur le sujet. D'habitude, cette cour donne son verdict le jour même des plaidoiries des avocats. Ces derniers ont plaidé le 2 février dernier et ils attendent encore qu'elle se prononce plus d'un mois et demi après. Des fois c'est un report d'une semaine, d'autres c'est un report de deux ou trois semaines.
Les avocats observent ce manège avec un air de déjà-vu. Dès l'instruction, les différentes administrations saisies par le juge ont brillé par les retards dans les réponses disculpatoires qu'ils devaient remettre. C'est comme s'il y avait une force supérieure qui intimide les différents protagonistes pour que l'on ne libère pas Mehdi Ben Gharbia et que l'on continue à violer ouvertement la loi. Les magistrats de la cour de cassation subissent-ils, à leur tour, une quelconque pression ? Impossible de le prouver, mais difficile de ne pas y penser tant il y a eu des dépassements et des aberrations dans ce dossier.

Ce qui est facile à prouver, en revanche, c'est que Mehdi Ben Gharbia, ainsi que ses avocats, n'ont pas cessé de subir, jusqu'à cette semaine, les injures et les menaces sur les pages Facebook de personnes se présentant comme proches du régime putschiste de Kaïs Saïed.
Dernièrement, au début du mois de mars 2024, on a élargi les publications salissantes à l'épouse (haute fonctionnaire) de l'un des avocats. Bien sûr qu'il y a eu des plaintes contre les auteurs de ces publications, mais celles-ci trainent dans les couloirs judiciaires depuis des années. Pire, avant sa détention, Mehdi Ben Gharbia a fait l'objet d'une tentative de chantage de l'un de ces auteurs le pressant de payer cinquante mille dinars pour que l'on cesse les publications infâmantes. Refusant de céder au racket, il a déposé plainte et médiatisé la chose. Son maître-chanteur n'a jamais été inquiété et lui s'est retrouvé prisonnier quelques jours après.
Y a-t-il une relation entre ces personnes, le président de la République et l'injustice flagrante que subit l'ancien ministre ?
Dans cette sale histoire, il y a peu de preuves, mais beaucoup trop d'indices. Il y a, aussi, un climat judiciaire délétère, à la limite du nauséabond, avec la multiplication des affaires politiques et une facilité inouïe des juges à jeter en prison les opposants politiques. Plusieurs, y compris d'anciens proches de Kaïs Saïed, ont dû choisir l'exil tant ils ne font plus confiance au système judiciaire tunisien. Bon à rappeler, le président de la République lui-même s'est prononcé publiquement dans des affaires judiciaires ouvertes et a même regretté (toujours publiquement) qu'une cour ait innocenté un homme politique qui, à ses yeux, serait corrompu. Le même président qui a critiqué, à plusieurs reprises, l'intérêt que l'on accorde à la forme et aux procédures et qui ignore complètement ce que la présomption d'innocence signifie.

C'est un fait, Mehdi Ben Gharbia subit une injustice. Ce n'est pas nous qui le disons, c'est son juge d'instruction qui a conclu à cette fin avant sa révocation, ainsi que le large dépassement des délais légaux de détention et le nombre important de reports du verdict de la cour de cassation.
C'est aussi un fait, Mehdi Ben Gharbia est innocent puisqu'il n'a pas été condamné par une cour lors d'un procès public offrant toutes les garanties de défense. Dans l'attente, seule la présomption d'innocence prévaut.
Enfin, il y a violation de la règle universelle de justice voulant que l'emprisonnement soit l'exception et la liberté la règle. Mehdi Ben Gharbia ne constitue aucun danger pour autrui, ne risque pas d'influer sur l'enquête (puisque celle-ci est déjà clôturée) et il ne risque pas de fuir vu qu'il est très célèbre et connu de toutes les autorités. Sa longue détention de 29 mois n'est, de fait, aucunement justifiée.
Bien qu'il soit le premier homme politique à être jeté en prison et qu'il est l'unique homme politique dont les délais légaux de détention ont été dépassés, on ne voit pas de mobilisation des différents comités de détense très bruyantes quand il s'agit de prisonniers islamistes ou celles accusées de complot contre l'Etat. Le dossier de Mehdi Ben Gharbia est très peu médiatisé, du reste.
Il y a comme une omerta qui ne dit pas son nom et elle n'est pas justifiée par la peur du régime putschiste seulement.
Dans les autres affaires des prisonniers politiques, l'accusation est basée sur le complot contre l'Etat, elle est clairement fallacieuse et implique plusieurs tendances idéologiques. Le dossier de Mehdi Ben Gharbia est plus complexe puisqu'il s'agit d'affaires financières difficiles à comprendre, d'autant plus que l'ancien ministre est connu pour être riche, exhibitionniste et dépensier. En Tunisie, tu es déjà suspect dès lors que tu es riche. L'autre raison est que chaque fois qu'une voix s'élève pour traiter ce dossier et relever ses aberrations, il y a systématiquement une campagne hostile de violent dénigrement sur certaines pages Facebook réputées proches du régime. Ces dernières n'attaquent pas que Mehdi Ben Gharbia, ses avocats et leurs familles, elles salissent également ceux qui osent défendre publiquement l'ancien ministre. Ces intimidations publiques, éternellement impunies, découragent ceux qui traitent ce dossier à la fois complexe et limpide.
Après 29 mois de détention, Mehdi Ben Gharbia ne sait plus à quel saint se vouer. Il est sous continuelle pression ainsi que ses avocats, ses juges et ses défenseurs et il ne demande qu'une seule et unique chose : que la justice lui soit rendue afin qu'il retrouve son fils orphelin et une vie ordinaire comme tout citoyen.


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