La question de la tenue d'une élection présidentielle d'ici la fin de l'année 20224 ne cesse d'être abordée par les médias et l'opinion publique. Plusieurs aspects tendent à dire que le président de la République pourrait en sortir vainqueur. Si certains affirment que l'élection n'aura pas lieu, d'autres s'empressent d'annoncer leur candidature ou, dans d'autres cas, de critiquer et de mettre en garde contre certains potentiels candidats. Il s'agit d'un spectacle qui dure depuis plusieurs semaines. Une bonne partie des politiciens, notamment de l'opposition, ne fait que se focaliser sur la question de la présidentielle. Néanmoins, et même s'ils s'accordent sur la nécessité d'un changement, ils sont loin, très loin de s'accorder sur le reste. D'ailleurs, c'est ce qui pourrait garantir à notre président actuel, Kaïs Saïed, sa victoire. Pour faire court, voici, en cinq points, les arguments affirmant cette chose : 1- Les partis démocrates sont incapables de trouver un terrain d'entente : les partis politiques se définissant comme étant les forces démocrates du pays n'ont pas pu s'accorder, jusqu'à maintenant, au sujet d'un candidat. D'ailleurs, la question n'a même pas été abordée par certains d'entre eux. Il y a eu une petite tentative pour organiser des primaires, celle initiée par le collectif Soumoud et qui aurait dû conduire à l'élection d'un candidat représentant les démocrates depuis des mois. Bien évidemment, rien de cela n'a eu lieu. D'un autre côté, les partis politiques ont préféré appliquer la politique de la sourde oreille face aux appels des opposants politiques, en l'occurrence les détenus politiques emprisonnés pour complot contre la sûreté de l'Etat depuis février 2023. Ils ont adressé depuis le 29 février 2024, une lettre aux forces démocratiques les appelant à unir d'urgence leurs efforts à l'approche de l'élection présidentielle. Ceci n'a pas eu de réel écho. 2- Les forces démocratiques et opposants ont pour priorité de se torpiller : c'est un triste spectacle auquel nous assistons depuis l'annonce d'une éventuelle élection présidentielle. Les forces démocratiques, opposantes et militantes semblent vouloir chercher la bagarre avant tout ! Face au danger de l'instauration d'une dictature et au lieu de se focaliser sur le risque de l'absence d'un candidat démocrate unique, ces derniers préfèrent se chamailler, voire dans certains cas s'insulter. Certains partis politiques et candidats sont occupés à régler leurs comptes et à évoquer encore la question du soutien aux mesures du 25-Juillet au tout début puis la promulgation du décret 117 du 22 septembre 2021. À quoi sert de ressasser le passé ? Une question qu'on ne cesse de se poser sans trouver l'ombre d'une réponse. C'est ainsi, que nous avons eu droit à des dizaines de publications d'Olfa Hamdi, présumée candidate à l'élection, prenant de haut les autres et considérant que les élections se joueront entre Abir Moussi (présidente du PDL) et elle. Nous avons, également, pu voir des centaines de publications Facebook, de la part d'opposants, critiquant Mondher Zenaidi et le qualifiant de contre-révolutionnaire. Idem pour Lotfi Mraihi ou Nizar Chaâri ! Personne ne s'est proposé, publiquement, pour réunir les candidats et trouver un terrain d'entente alors que l'élection est prévue d'ici quelques mois. 3- Absence de structures : malheureusement, une grande partie des structures politiques existantes en Tunisie n'est pas consciente de son vrai poids et de sa réalité politique. Les partis, se disant démocrates, n'ont presque plus de réseau, c'est-à-dire, qu'il n'y a presque plus de structures et d'affiliés. Or, pour faire campagne, il faut, certes de l'argent, mais avant tout, des militants et des individus prêts à se mobiliser nuit et jour. Les partis de l'opposition, en plus d'être des structures de petites tailles, n'ont pas élargi leur réseau et n'ont pas formé des militants aux techniques des campagnes électorales ou à l'observation électorale. De plus, quel homme d'affaires prendrait le risque de financer un parti de l'opposition alors que l'Etat mène une « guerre » contre les businessmen diabolisés ? Se positionner officiellement, contre le pouvoir en place ou en faveur d'un candidat s'opposant au processus du 25-Juillet pourrait les amener à se retrouver, après une victoire de Kaïs Saïed dans une situation plus que délicate. 4- Le discours politique n'a pas évolué : les partis de l'opposition et ceux se disant démocrates et progressistes n'ont fait que se répéter. Quelques personnalités politiques ont évoqué la question d'un programme et d'une stratégie de sauvetage. Le reste des déclarations s'articule autour de la critique, souvent virulente, du pouvoir en place. Afin de convaincre les Tunisiens de la nécessité de changer de président, il faudrait les convaincre de la pertinence des décisions qui seront prises. Or, presqu'aucun opposant ou présumé candidat n'a évoqué une question sensible autour de laquelle il pourrait bâtir son projet politique. Il suffit de se pencher sur les élections tenues depuis 2011 afin de constater cela. Le président d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, s'était, au début, présenté comme étant l'envoyé d'Allah chargé de mettre en place un Etat islamiste. Il s'est garanti un soutien populaire à son projet, sans même candidater à la présidentielle. De son côté, Béji Caïd Essebsi était le sauveur de la Tunisie et le protecteur de la République et de l'Etat de droit. Il a, aussi, abordé quelques thématiques sensibles, lui ayant permis de se différencier des autres, à savoir l'égalité entre les genres et la question de la consommation de cannabis. De nos jours, les candidats pourraient être tous confondus puisqu'aucun n'a su conquérir les cœurs et les pensées des Tunisiens. Leurs déclarations et discours ne tournent qu'autour de la critique et de l'indignation. 5- Kaïs Saïed s'est construit un système lui assurant la victoire : le chef de l'Etat, que ce soit en vertu du texte de la constitution ou par l'exercice de ses fonctions, se trouve au centre du système et s'est imposé comme maître du jeu. Il s'est assuré (par la menace ou par conviction) le soutien de l'administration. Ministres, députés, gouverneurs, justice ou membres de l'Instance supérieure indépendante pour les élections, tous sont obéissent aux ordres et aux directives. De plus, tout le monde parle d'élection et s'empresse de critiquer ou de soutenir les candidats alors que ni la date ni les règles du jeu n'ont été définies ! Il sera possible de se retrouver face à des révisions de la loi électorale promulguées à la dernière minute et rien que pour empêcher certains opposants de se présenter. Bien évidemment, l'Isie nous a déjà fait comprendre qu'elle était un organe d'exécution.
Enfin, il est à noter que le président de la République a fait tout son possible afin de mettre en place son fameux système de gouvernance par les bases. Il s'est offert un réseau de conseils locaux, régionaux et de districts qui se feront, sûrement, plaisir de se mobiliser dans le but de lui assurer la victoire. Cette liste n'est, sûrement, pas exhaustive. Il ne s'agit que des principaux points nous menant à conclure que la victoire de Kaïs Saïed, à la présidentielle, dans les conditions actuelles, pourrait être assurée, voire dès le premier tour.