Alors que le nombre d'accidents de la route est en baisse, la Tunisie fait face à une hausse préoccupante des décès, selon l'Observatoire national de la sécurité routière. Une réforme du Code de la route est en préparation, mais n'est pas encore entrée en vigueur. Le colonel-major Chamseddine Adouani, chef du bureau de communication de l'Observatoire national de la sécurité routière, est formel : contrairement à ce qui circule sur les réseaux sociaux, aucune des nouvelles mesures annoncées dans le cadre de la réforme du Code de la route n'a encore été appliquée. « Les textes sont encore à l'état de projet. Tant qu'ils ne sont pas publiés au Journal officiel, rien n'est applicable », a-t-il précisé mardi 29 juillet 2025, sur les ondes de Jawhara FM. Engagée depuis 2022, la réforme en cours vise à adapter le Code de la route aux nouveaux défis de sécurité et aux évolutions technologiques. Parmi les mesures prévues figure la transformation de certaines infractions en délits. Un excès de vitesse plus de 30 km/h deviendrait par exemple un délit, passible de seize jours à cinq ans de prison. Ces changements visent à rendre les sanctions plus dissuasives et plus rapides. Le colonel-major Adouani a également annoncé l'introduction prochaine de tests rapides pour détecter la présence d'alcool au volant. Ces tests, déjà utilisés à l'international, permettent un résultat en cinq à dix minutes. Le taux légal est fixé à 0,3 g/litre de sang, soit environ deux bières ou un verre de vin. Les contrevenants s'exposeraient à : * Des amendes de 200 à 500 dinars * Jusqu'à six mois de prison * La suspension du permis de conduire En cas de récidive, la peine de prison deviendrait automatique. Les tests ne seront toutefois pratiqués qu'en cas de comportement suspect, afin de préserver les libertés individuelles, souligne Chamseddine Adouani. Des tests similaires pour détecter l'usage de drogues sont également à l'étude. Pour renforcer les contrôles, les autorités vont généraliser les radars mobiles et utiliser des caméras intelligentes capables d'identifier automatiquement plusieurs infractions : excès de vitesse, téléphone au volant, absence de ceinture. « Le but n'est pas de piéger les automobilistes mais de garantir leur sécurité. Ces systèmes permettent plus d'efficacité et réduisent les zones d'interprétation, c'est la réforme la plus significative car les infractions seront notifiées d'office et automatiquement adressées au contrevenant », a expliqué Chamseddine Adouani.
Parallèlement, l'Observatoire travaille avec les ministères de l'Education, de la Femme et de l'Enseignement supérieur pour intégrer la sécurité routière dans les programmes scolaires. Un manuel pédagogique est en cours de finalisation. « Le changement de comportement commence dès le plus jeune âge. Il faut faire de la sécurité routière une valeur culturelle », estime Chamseddine Adouani. Malgré ces efforts, les chiffres récents montrent une hausse inquiétante de la mortalité routière. Le nombre total d'accidents a diminué de plus de 500 cas ces derniers mois, et les blessés de plus de 800. En revanche, le nombre de morts a augmenté pour atteindre quarante personnes sur la même période. Le colonel-major y voit les effets de comportements à risque toujours très présents : vitesse excessive, conduite sous l'emprise de l'alcool ou de drogues, usage du téléphone au volant (98 % des conducteurs interrogés dans une étude déclarent l'utiliser), refus du port de la ceinture ou du casque, ou encore dépassements dangereux. Il a aussi pointé du doigt les traversées piétonnes sauvages, notamment sur les autoroutes. « À 100 km/h, un véhicule parcourt 28 mètres par seconde. Il faut environ trois secondes pour réagir. Une traversée imprévisible peut donc être fatale », prévient-il. Si la Tunisie s'est engagée dans une réforme ambitieuse du Code de la route, les mesures sont encore à l'état de projet. En attendant leur adoption, l'Observatoire appelle à une prise de conscience collective, misant sur la prévention, la technologie et l'éducation pour freiner l'hécatombe sur les routes.