Actualité très fournie cette semaine avec une série d'arrestations, de gel et de confiscations de biens. On a dépoussiéré les archives de 2011 pour sortir une liste de personnes dont les biens sont à confisquer, on s'est rendu compte qu'on avait un douanier véreux déjà parti à la retraite, on s'est rappelé d'un directeur de prison qui a accordé des avantages indus à un homme d'affaires, on s'est montré ferme vis-à-vis d'un autre directeur de prison qui s'est montré bienveillant vis-à-vis de son collègue… Morale de la semaine ? Quand les hommes politiques veulent, les juges peuvent ! L'opposition peut dire ce qu'elle veut et tourner en ridicule ces mesures de lutte anti-corruption, elles sont bonnes à prendre ! On peut bien dire qu'il s'agit de manœuvres politiques, d'un règlement de comptes entre bandes rivales, entre hommes d'affaires, entre lobbyistes, toute mise en hors d'état de nuire d'un corrupteur et d'un corrompu est « tout bénéf » pour la construction d'un Etat propre et de droit. Prenons ce que les magistrats et les politiques veulent bien nous donner et réclamons davantage par la suite ! Toute action suscitant des réactions, ces dernières n'ont pas tardé. Les manœuvres d'intimidation ciblant les médias et le chef du gouvernement ne se comptent plus. La plus singulière provient de Hafedh Caïd Essebsi qui appelle tout bonnement à un remaniement ministériel profond. Au prétexte qu'il préside le parti vainqueur des élections, Caïd Essebsi junior estime qu'il a droit à quelques fauteuils et strapontins dans le gouvernement. Bon à rappeler, le parti vainqueur dont parle « le fils de» est celui qui a élu Mohsen Marzouk, Saïd Aïdi, Néji Jelloul, Ridha Belhadj, Sahbi Ben Fredj, Bochra Belhadj Hmida, Leïla Chettaoui, Souheïl Alouini et toutes ces personnes respectables qui ne s'accoquinaient pas avec les Chafik Jarraya and co et ne se retrouvent plus aujourd'hui dans Nidaa. Elire ces gens et retrouver un Borhen Bsaïes ou Khaled Chouket dans le gouvernement pour le simple motif que ces derniers se sont encartés en cours de route n'a aucun sens. Ni politique, ni moral, ni éthique, ni même logique.
Exiger maintenant un remaniement ministériel et tenter par tous les moyens de déstabiliser le gouvernement par des déclarations farfelues revient à changer une équipe qui gagne en plein match. La vérité est qu'au lieu d'accompagner Youssef Chahed dans sa guerre contre la corruption en commençant, tout d'abord, par montrer patte blanche, on est en train de lui mettre la pression, de créer des diversions et de chercher à le déstabiliser. Encore une fois, l'intérêt des partis et des individus passe avant celui de la Patrie. Les dirigeants de Nidaa ont-ils des choses à se reprocher ? Difficile de croire le contraire quand on voit ces signes extérieurs de richesse soudaine chez beaucoup de députés et dirigeants du parti. Du coup, en cette période, toute attaque contre Youssef Chahed s'apparente à une manœuvre de contrer la lutte contre la corruption et de protéger certains corrompus/corrupteurs. Il n'est pas dit qu'il faut donner un chèque en blanc au chef du gouvernement, jamais !, mais quand il entame une guerre longtemps demandée et exigée par la population, les politiques, les ONG et les médias, il faudrait avoir la décence de l'y accompagner. Qu'on l'aide, au moins, par le silence !
Que doit faire Youssef Chahed face à ces intimidations ? Pour le moment, il en rit et il promet qu'il va poursuivre sa guerre. Une stratégie appropriée, mais intenable sur le long terme. Ni même sur le moyen terme. Le soutien médiatico-populaire est éphémère et insuffisant à lui seul. Une « complicité judiciaire » élargie est indispensable.
Après avoir touché les grands barons supposés de la corruption, les magistrats se doivent de dépoussiérer les dossiers de certains leaders d'opinion parmi les hommes politiques et de médias qu'ils soient inféodés au pouvoir ou à l'opposition. Et des dossiers, il en existe à la pelle ! A commencer par ce candidat à la présidentielle qui a bénéficié d'un financement de deux puissances étrangères lors des dernières élections. L'affaire a été révélée par la Cour des comptes et le dossier a été transmis au parquet. Où en est-il ? Il est également impératif que les magistrats fassent le ménage dans leurs rangs, car il ne saurait y avoir de corruption et d'impunité de barons sans complicité de magistrats. C'est une évidence !
La liste des suspects notoires de corruption et/ou de malversation est longue. Pour le moment, les différents ministres et députés qui ont exercé depuis 2011 sont épargnés. Il y en a un bon lot dont certains ont été attrapés la main dans le sac et déclenché de fortes polémiques sans pour autant qu'il y ait de suite judiciaire connue. Cela va des ministres nahdhaouis et CPR de la troïka aux actuels ministres du gouvernement de l'union nationale en passant par les députés de l'ANC et de l'ARP. En attendant que la loi relative aux origines de la fortune (« D'où tenez-vous cela ? ») soit votée, que la guerre de Youssef Chahed contre la corruption continue et la pression des médias maintenue. Traitez-nous de « médias de la honte » ou d'être inféodés à X ou Y, traitez Chahed de corrompu et voyez en son action un règlement de comptes, les chiens aboient, la caravane passe ! Tic tac tic tac…