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Lettre ouverte à son excellence Monsieur Béji Caïd Essebsi président de la République
Publié dans Business News le 30 - 07 - 2018


Excellence,
Loin des calculs politiciens et des débordements partisans, je vous adresse cette lettre d'une élue du peuple qui espère se faire écouter, et que je voudrais comme un appel à la sagesse plutôt qu'un Mea Culpa.

Je vous ai connu il y a quelques années en juillet 2012 à l'occasion de mon émission sur Express FM « Hadith fissiyessa », je m'étais déplacée à votre bureau pour vous interviewer pour la première fois pour la chaîne radio Express FM. Ce n'était pas mon premier scoop, mais sans doute une de mes meilleures interviews et je l'ai gardée en mémoire comme un des moments forts de ma carrière médiatique. En 2014, j'ai décidé de m'engager en politique, consciente qu'être un électron libre ne permettait que de brandir des idéaux et non de les ancrer, qu'on ne pouvait pas faire de la politique devant un micro, ni derrière un écran, et qu'à un moment donné de sa vie il fallait s'engager pour être un acteur dans le paysage politique.
Les raisons qui m'avaient motivée à l'époque sont sans doute les mêmes qui vous avaient motivé pour répondre à l'appel du peuple et de la patrie en 2011, à la différence que vous y apportiez toute votre sagesse et votre expérience et que j'y apportais ma fougue, ma passion, mes principes et mes théories.
Juriste jusqu'au bout des ongles, issue d'une famille de militants, à appartenance destourienne, pour la novice que j'étais la politique que je savais était différente de la politique dont je rêvais. Aussi, le mouvement politique que vous avez créé était une lueur d'espoir dans le firmament brumeux d'une Tunisie qui s'islamisait à souhait si les démocrates n'y arrachaient pas la place qui leur ai due et que la Tunisie mérite. Et même si j'ai choisi d'appartenir à l'époque à un parti jeune et social libéral complètement différent de votre mouvement, nous vous avons soutenu aux deux tours de la présidentielle et fait en sorte que vous soyez le futur président démocratiquement élu de la Tunisie. Rappelant aux Tunisiens à bien des égards le leader Habib Bourguiba, vous avez sauvé le pays grâce à un parti qui incarnait les attentes des Tunisiens et surtout beaucoup d'espoirs. Nous avons vu en vous le sauveur et le père qui pouvait nous guider vers les rives salutaires de la démocratie.
Ce rôle s'est confirmé, plus tard lors de l'apparition des prémices de la première crise politique. Votre rôle majeur dans l'élaboration du premier document de Carthage a sans doute permis de désamorcer une crise politique imminente, qui allait conduire à l'inertie voire au blocage total des institutions, mais qui avait permis également de construire le piédestal sur lequel on allait édifier l'Etat de droit et des instituons, et garantir une stabilité politique, certes précaire et fragile, mais permettant néanmoins d'installer le gouvernement d'union nationale, les bases du régime démocratique et la mise en place des institutions constitutionnelles permanentes, pour mettre ainsi fin au processus transitoire et provisoire. La Tunisie était sur la bonne voie de la transition démocratique.
Cependant, ce semblant de stabilité dans un pays sans cesse en proie à des tiraillements politiques et une quête infinie vers le pouvoir n'était qu'une trêve de courte durée. Nous nous attendions en effet, à plus d'engagement en politique, et surtout à la préparation d'une nouvelle classe politique, essentiellement jeune, pour prendre la relève et continuer le projet édifié et développé par l'actuelle classe politique. Il serait bon de rappeler que l'héritage est lourd et les attentes très grandes, et les novices allaient se perdre entre ruses des coulisses, et succession d'événements aussi impromptus que catastrophiques ou douloureux.
L'exercice du pouvoir, il est vrai, est une dure épreuve pour ceux qui n'ont point d'expérience. Entre faiblesse des positons, manque de courage, tentations de corruption, et courtoisies de velours, la classe politique infiltrée par le système mafieux n'avait donné ni l'image escomptée ni incarné l'espoir d'un avenir radieux. A cela s'ajoute le fait qu'en politique, il n'y a rien de pire que de vouloir plaire à tout le monde. L'histoire nous aura enseigné qu'un régime politique qui se dit démocratique et des leaders qui se respectent, sont ceux qui assurent la relève et garantissent l'alternance au pouvoir dans le respect de l'Etat de droit et des institutions. Cependant, cela demeurerait de la théorie. Nous avons aujourd'hui une classe politique qui n'a fait que refléter le pire sans donner le meilleur, et qui au delà de toute attente, s'accroche encore au pouvoir. Aujourd'hui alors qu'une nouvelle crise politique s'installe avec les prémices d'un échec imminent de toute la classe politique, et à l'aune de nouvelles échéances électorales, la scène politique vire vers une arène ou gladiateurs de la politique et opportunistes en tout genre se livrent à une bataille sans merci.

De leurs chamailleries qui ne présagent rien de bon pour l'avenir, il ne reste qu'une bulle d'insultes et de niaiseries, sur fond de scandales et de faits divers et nul ne pense à l'intérêt suprême du peuple ni à celui de la nation pour laquelle d'autres s'étaient sacrifiés durant 3000 ans d'histoire. Quand alors se profile à l'horizon les desseins d'un fils capricieux qui croit forcément être l'héritier en titre, pas seulement du nom , mais de l'enseigne politique édifiée par son père, cela est de nature à rappeler aux Tunisiens des années noires où la Tunisie fut dilapidée et coupée en parcelles par une famille assoiffée d'argent et de pouvoir.

Monsieur le président, celui qui ne tire pas des enseignements de l'historie n'a rien compris à la nature des êtres et des choses, ni à la trajectoire des peuples et des nations. Aussi il est toujours bon de rappeler au bon vouloir des êtres, que si l'histoire avance, elle est aussi un éternel recommencement. Un héritage, quel qu'il soit, se mérite ! Et de surcroît, quand celui-ci est moral et immatériel. Sa valeur inestimable est alors égale à sa valeur méritoire.
Monsieur le président, nous voulons tous le meilleur pour nos enfants. Et nous les voulons tous nos dignes héritiers. Mais en politique, il faut apprendre à élever des barrières entre la sphère publique et la sphère privée. Peut être que nous portons un jugement de valeur et que la critique est aisée, vue de l'extérieur. Peut être que notre jugement est dur et non clément, et que nous sommes passibles des mêmes erreurs si nous étions à votre place. Mais, considérations familiales mises à part, les faits parlent d'eux mêmes. Et sans m'immiscer dans les affaires intérieures d'un parti qui n'est pas le mien, ni dans celle d'une famille qui n'est pas la mienne, et après une lecture rapide de l'actualité et des gros titres de la presse de ces trois dernières années auxquels s'ajoutent le bilan électoral et les déchirures du groupe parlementaire ne font que confirmer nos craintes et notre jugement . Et d'ailleurs, cette lucidité, qui vous caractérise, et qui, à un moment de l'histoire a su fédérer des acteurs aux antipodes du paysage politique, allant de l'extrême droite à l'extrême gauche, je ne la retrouve plus chez vous quand vous soutenez à corps et à cris votre fils dans sa conquête haletante vers le pouvoir. D'autant qu'un soir d'été vous êtes apparu sur une chaîne subversive et hors la loi sous le visage d'un bon père de famille plutôt que d'un président fédérateur et symbole de l'union nationale.
Je ne sais pas si on vous l'a dit mais vous avez profondément inquiété et bouleversé les Tunisiens. Depuis, il nous a semblé qu'il se tramait quelque chose dans les coulisses du pouvoir. En effet, certains oublient que dans un Etat de droit et d'institutions il y a des mécanismes constitutionnels qui garantissent l'alternance et régissent le contrôle et l'équilibre entre les pouvoirs. Depuis, beaucoup de Tunisiens sont inquiets pour l'avenir de la patrie. En fille de la République, en femme militante, je ne pouvais laisser passer l'occasion de prendre position et de défendre avec ardeur et courage les valeurs républicaines qu'on m'a enseignée et appris à défendre, et pour lesquelles tant de Tunisiens s'étaient sacrifiés.
Dans un élan de patriotisme responsable et loin des calculs pernicieux des partis politiques et des desseins opportunistes de certains politiciens, j'ai voulu tirer la sonnette d'alarme en responsabilisant toute la classe politique sur les dangers de ce jeu pervers du pouvoir, qui n'est pas sans rappeler le jeu des chaises musicales. Elancée dans mes propos qui s'adressaient à tous sans exception, parlant comme à mon habitude avec fougue et passion, j'ai utilisé un mot inapproprié faisant référence à votre âge, et qui a vraisemblablement heurté votre sensibilité. Mais dans un discours politique, les mots n'ont pas toujours ni le sens péjoratif ni le sens imagé qu'on voudrait leur donner. Aussi il ne fallait pas le prendre tel quel et au premier degré.
En femme responsable, en fille de la république, qui a toujours assumé ses propos et ses prises de positions, je me dois quand même de retirer ce mot, pour vous témoigner aussi bien de mon humilité que du respect que je vous dois et que j'ai toujours démontré lors de diverses rencontres dans les occasions officielles. Mais je vous appelle aussi à écouter encore une fois attentivement mes propos, n'est ce pas ce que vous m'avez dit lors de la fête de la République en me tendant si chaleureusement la main?
J'espère que vous écouterez les propos d'une fille qui n'est pas la votre, mais qui voyait en vous son père qui n'est plus, et le conseiller et le protecteur qu'elle a perdu. Ce mot, ce simple mot sur lequel vous vous êtes attardé et qui a heurté votre sensibilité ne devrait pas vous faire oublier le reste.
Monsieur le président qui avez vécu plus que moi et peut être mieux que moi, vous n'êtes pas sans ignorer que les affaires d'Etat et les affaires familiales ne font pas bon ménage ensemble. Pire même, elles conduisent tout droit à la faillite. Aussi on attendait de vous beaucoup de choses. Vous aviez réussi en 2014 à réhabiliter une classe politique décimée qui semblait incapable d'apporter une alternative au gouvernement de la troïka, et de créer un mouvement fédérateur qui nous a permis de sauver la Tunisie d'un islamisme rampant et d'un verrouillage du paysage politique. De ce fait, les attentes des Tunisiens sont aujourd'hui énormes pour les prochaines échéances électorales. On attend que vous puissiez mettre les premiers piliers de l'alternance politique, à rénover la classe politique par une classe jeune intègre et compétente.
Autant vous dire qu'un homme qui gère, commande et réforme un Etat avec assurance, conviction et courage est un chef, mais un homme qui laisse derrière lui une œuvre, un projet politique et assure une alternance et une relève au pouvoir est un leader. Je n'ai pas la prétention de vous donner des leçons, mais du statut de la fille que j'étais et de la mère que je suis, je ne ramène rien vers ma vie publique. J'ai appris aussi au fil du temps qu'avec les enfants il faut avoir de l'humilité et du détachement, car notre paternalisme risque d'engloutir notre impartialité.
Après une semaine houleuse, et maintenant que les esprits se sont calmés, loin du lynchage médiatique et de la vindicte populaire, et en attendant une rentrée qui s'annonce chaude et mouvementée, j'en appelle à votre conscience, à votre sens du devoir et à votre sagesse habituelle pour écouter tous ceux qui vous critiquent en vous méfiant de tous ceux qui font votre éloge en vous brossant un tableau rose d'une réalité politique noircie par l'opportunisme, le mensonge, la corruption et les courbettes.
Enfin je tiens à dire pour conclure, en vous remerciant d'avance d'avoir eu la patience de me lire, que mon unique ambition pour 2019 et pour l'avenir est d'honorer mon mandat, et de laisser ma place un jour à ceux qui la méritent, et de laisser la Tunisie prospère entre de bonnes mains et je n'ai aucun doute que c'est là aussi votre ambition suprême.

Votre fille Hager Ben Cheikh Ahmed, membre de l'assemblée des représentants du peuple


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