« Le virus est philosophe, il nous oblige à nous interroger » écrivait Edgar Morin sur son compte Twitter en cette période de confinement. S'attaquer à sa liste de films, lire les livres qui patientent sur sa table de chevet, essayer toutes les recettes de cuisine de ce livre qu'on nous a offert à notre dernier anniversaire mais pour lequel on n'a jamais eu le temps, s'interroger sur le sens de la vie et se reconnecter avec les membres de notre famille qui partagent notre confinement. Ecrire son journal et, pourquoi pas, commencer à rédiger un livre ou se mettre à la peinture impressionniste et apprendre (enfin) l'allemand. Das ist sehr gut !
Plusieurs d'entre nous ont profité du confinement pour le faire et nous avons bien de la chance. Le loisir de nous plaindre du manque d'activité, de notre petit restaurant qui nous manque et de notre rituel bar/café après le travail ou pendant le weekend avec les amis. Si vous êtes dans cette configuration-là, c'est que vous faites partie des plus chanceux. De cette « classe » de personnes qui peuvent encore faire du télétravail en pyjama, percevoir un salaire en confinement et avoir le loisir de s'interroger sur le sens réel de l'existence. Pour tous les autres, ceci est un grand luxe auquel on n'a pas le temps - ou le loisir – de penser car on doit réfléchir à plus important encore : trouver de quoi vivre.
La journaliste de BFMTV et du Bondy Blog Nesrine Slaoui, disait que « la romantisation du confinement est un privilège de classes ». Je suis de son avis. Oui, car on a beau échafauder des théories philosophiques sur comment meubler son temps, se ressourcer et essayer des masques maison pour régéréner sa peau (et son esprit) durant le confinement, nous ne sommes pas égaux face à la crise. Oui le monde vit au même rythme, ou presque, oui nous ne sommes pas seuls dans notre désarroi face à la pandémie. Mais nous ne sommes certes pas égaux. Il y a d'un côté ceux qui, dans leur petit cocon, essaient des recettes de cuisine et rallongent la liste des films à voir et ceux qui doivent quand même travailler durant le confinement ou trouver des moyens pour pallier le manque de ressources. Tous ces travailleurs journaliers, tous ces employés d'entreprises fragiles qui n'ont pas le luxe d'avoir un salaire, tranquillement confinés chez eux.
Non, il ne s'agit pas de faire culpabiliser ceux qui peuvent se permettre de dorer dans leur balcon, mais de faire prendre conscience de cette réalité dont on ne parle pas. Celle du confinement des travailleurs journaliers, des ouvriers, des milieux ruraux et de toutes ces personnes qui n'ont pas une situation suffisamment stable pour se permettre de philosopher sur le sens de la vie. Au milieu de nos beaux petits journaux de confinement, leurs histoires à eux méritent d'être connues et racontées…
Amis lecteurs, veuillez m'en pardonner. Le journal d'aujourd'hui est tout sauf rigolo. Je me rattraperai demain. Promis !