La 8ème session du Festival international du film pour l'enfance et la jeunesse (Fifej) de Sousse s'est clôturé le 28 mars avec la proclamation du palmarès et l'octroi des huit Hadrumètes d'or pour tous les films vainqueurs des diverses sections de la compétition entre cinéma et vidéo, courts et longs métrages, films pour enfants et pour jeunes. Quels films de toutes ces sections remporteront-ils les récompenses suprêmes? En attendant le palmarès et les choix du jury cinéma, présidé par Mokhtar Ladjimi, réalisateur, et du jury vidéo présidé par Sébastien Duclocher, animateur, scénariste et réalisateur français, rappelons, côté fiction, quelles sont les cinématographies qui ont le plus interpellé, convaincu et séduit, durant cette édition. Ce sont assurément, et nous l'avons déjà dit, les cinémas iranien et marocain qui ont suscité le plus d'intérêt et créé le débat. Le premier pour la simplicité, l'épure et l'efficacité qui le caractérisent (Guidon moustache de Javad Ardakani, un long métrage en compétition officielle cinéma enfants, par exemple). Le deuxième pour l'audace de plus en plus avérée de ces thèmes traités : tabous sociaux, culturels et autres (Amours voilées de Aziz Salmy, long métrage en compétition cinéma ainsi que Les anges de Satan de Ahmed Boulane, ce film d'ouverture). Bref, qu'en est-il du reste des opus de fiction arabes en compétition. Disons qu'encore une fois le cinéma égyptien déçoit tant. Meccano de Mahmoud Kamel n'a pas convaincu, loin s'en faut et c'est dans la pure lignée du cinéma mélodramatique égyptien que s'inscrit ce long métrage invraisemblable, larmoyant et si conventionnel, tant il épouse le carcan inchangé, invariable et dépassé du mélo conventionnel. L'histoire de ce jeune designer amnésique, dont le cerveau a été en partie allégé par une opération à l'adolescence, n'est pas crédible. Toutefois, l'enjeu du film à travers l'impossibilité pour cet amnésique de nouer jusqu'au bout une relation d'amour, c'est bien sûr la mémoire. Ce passé qu'on efface, qu'on renie, mais le traitement est superficiel et larmoyant et ne transcende jamais l'anecdotique. Le film syrien Identité de Ghassan Shmeit traite d'une histoire d'amour durant les années 40. Fawaz et Maryam s'aiment, mais les deux familles refusent de les marier. Lors de la nuit du mariage forcé de Maryam avec un autre prétendant, Fawaz se suicide. Son âme se glisse à l'instant même dans le corps d'un nouveau-né du village qui vivra, par procuration, une fois adulte tout ce qu'a laissé Fawaz en suspens… L'idée est originale mais le traitement, parfois naïf, n'est pas toujours convaincant. Toutefois, le propos n'est pas négligeable. Puisque l'auteur-réalisateur, tout en focalisant sur une histoire d'amour impossible et en se posant les éternelles questions sur le sens de la vie, de l'amour et de la mort s'interroge : peut-on se libérer de la colonisation, l'exploitation et l'injustice si les individus, ici les jeunes, sont à ce point oppressés et privés de cette manière tragique de liberté et d'indépendance. Concernant le cinéma européen, a émergé du lot le film allemand Finisher Tango de Buket Alakus est une tragi-comédie qui raconte l'histoire d'un jeune égoïste inutile qui se transforme en un homme responsable prêt à assumer tous ses actes. Bien menée, tonique et amusante, cette comédie séduit et vaut surtout par les valeurs qu'elle prône. Ce film pour jeunes, programmé dans la compétition cinéma, ne laisse vraiment pas indifférent… et a de fortes chances de briller lors de la proclamation du palmarès. Ces bons films d'animation Côté films d'animation, c'est encore le cinéma iranien qui force l'admiration, tel Le mariage de Hajar (dans la compétition cinéma pour enfants), signé par la réalisatrice Mahin Jevaherian, qui touche à la perfection. C'est qu'elle n'est pas à son premier coup d'essai car outre qu'elle enseigne l'animation, elle a remporté un vif succès avec trois précédents films. Dans Le mariage de Hajar, la fable, comme dans la quasi-majorité des films iraniens, est inspirée du patrimoine et des traditions de la culture et de la civilisation perses. S'agissant ici de la cérémonie de mariage, traitée y compris dans ses aspects folkloriques, c'est à une narration et une mise en scène d'une poésie inouïe que les spectateurs ont droit. La technique, elle, étant au service du sens. L'ensemble est magique. Autre film d'animation : Mia et le Migou, un dessin animé français de Jacques-Rémy Girerd, réalisateur connu pour avoir créé des petits films d'animation originaux et de qualité. Son premier long métrage, La prophétie des grenouilles, a remporté un vif succès il y a six ans. Mia et le Migou (compétition cinéma enfants) met en scène le voyage initiatique de Mia, une petite fille de dix ans qui, suite à un pressentiment, décide de quitter son village natal quelque part en Amérique du Sud, pour partir à la recherche de son père qui travaille sur un chantier gigantesque visant à transformer une forêt tropicale en luxueuse résidence hôtelière. La route est longue… et elle doit franchir une montagne entourée d'une forêt énigmatique… Un monde de légende où l'héroïne vit une expérience hors du commun. Voilà de quoi nourrir l'imaginaire des enfants et les faire rêver. Dommage que le public d'enfants, peu présent au cours de cette édition, n'a pas eu vraiment l'occasion de voir tous ces formidables et bons films d'animation car, nous dit-on, au même moment se déroulait la rencontre internationale de Sousse où les jeunes s'initient à la technique du cinéma (photo, vidéo, image, scénario). Mais ne fallait-il pas, afin que les deux salles du centre- ville abritant le festival ( Le Palace et Le théâtre municipal) accueillent davantage de petits festivaliers, décaler cette rencontre et sensibiliser en amont élèves, lycéens et étudiants à travers des accords avec leur établissement à la nécessité plaisante et agréable de participer en grand nombre à la fête du Fifej du cinéma. Cela aurait certainement davantage rempli les salles du Fifej. Une stratégie à prendre en considération à l'avenir donc.