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Le projet pernicieux
Les prieurs de la rue
Publié dans La Presse de Tunisie le 20 - 07 - 2015

Certes, cette année, la fête de Aïd El Fitr s'est déroulée, presque, sans le moindre incident grave, excepté celui de la ville de Ghomrassen où les habitants ont bravé l'interdiction de tenir la prière hors des mosquées. Ce qui rend cette bravade encore plus inquiétante, c'est qu'elle intervient en plein état d'urgence. Mais en fait, est-il suffisant de sévir épisodiquement contre ce comportement? Ne se manifeste-t-il pas sous d'autres formes en d'autres circonstances? Autrement dit, n'est-il pas là, omniprésent, à longueur d'année? Alors, le réprimer à l'occasion d'une fête, c'est-à-dire une fois par an et, de surcroît, dans le cadre d'une loi spéciale, peut-il constituer un vrai moyen dissuasif? Ne faudrait-il pas changer d'approche et de méthode pour donner à l'opération plus de crédibilité? N'est-il pas grand temps d'assumer pleinement ses responsabilités et de prendre son courage à deux mains, en prenant le taureau par les cornes?
L'origine du mal
Le ministère de l'Intérieur a répondu favorablement à l'appel implicite du ministre des Affaires religieuses qui s'est désengagé de toute responsabilité envers les éventuels débordements qui surviendraient le jour de l'Aïd, en affirmant qu'il ne répondait que de ceux qui se produiraient dans l'enceinte des mosquées qui sont placées sous son contrôle. Ce qui est fort logique. Donc, il était clair qu'il renvoyait la balle à son homologue de l'Intérieur, en l'invitant à sévir en dehors de ces frontières contre les fauteurs de troubles, c'est-à-dire empêcher la tenue de la prière sur la voie publique. Le message était on ne peut plus clair, et on peut dire qu'en général, comme nous l'avons précisé plus haut, les forces de l'ordre ont réussi à empêcher ce carnaval et à assurer la sécurité des Tunisiens en ce jour de l'Aïd et leur faire revivre l'ambiance sereine d'antan. Pour rafraîchir la mémoire des amnésiques, ce nouveau rituel, qui nous a été importé de ces régions connues pour leur aridité aussi bien naturelle que culturelle, a été instauré dans notre pays, pendant, «l'âge d'or de la Troïka», comme se plaît à où on faisant l'appeler Slim Ben Hamdane, l'ex-ministre des Domaines de l'Etat. Et on se rappelle tous comment, avec l'inauguration de cette nouvelle sunna, les «fidèles» organisaient leurs grands shows sur les lieux publics, dont la plage d'Hammamet où on faisait l'apologie de Ben Laden et du jihad devant les caméras de l'émission de France 2, «Envoyé spécial». Emission qui a fait l'objet d'une fausse polémique, fomentée par les autorités islamiques, qui voulaient démentir des faits réels, relatés dans des images qui ont fait le tour du monde. Ces prières en plein air ont transformé plusieurs lieux publics, à l'image de l'avenue Bourguiba, en lieux de culte, au nom du dogme cher aux fanatiques : «Dieu est partout». Ces scènes ainsi que celles des «tentes de prédication» peuplaient le paysage urbain de la Tunisie et servaient de toile de fond à leurs sombres desseins.
Démonstrations intimidantes
En réalité, ces scènes exhibitionnistes n'ont jamais cessé, même après l'annonce officielle du départ de la Troïka. Elles se manifestent tous les vendredis, au vu et au su de tous, comme à la mosquée «Al Fath», où on bloque la circulation routière sur l'avenue de la Liberté, ou bien encore à celle d'El Manar, où les prieurs colonisent le jardin public de la place foulant aux pieds fleurs et plantes. Comme quoi, au nom du sacré, on se permet de perturber l'ordre et d'écraser la beauté, la vie. Ces méthodes ne sont pas fortuites mais bien délibérées, car il ne faut pas oublier que l'anarchie constitue la voie de prédilection susceptible de faire aboutir leur projet pernicieux. Le choix des mosquées des centres-villes est-il fortuit? Ce n'est pas ce qu'inspire l'ambiance hystérique de ces rassemblements démesurés où on se croit être dans l'une des conquêtes musulmanes de jadis, à l'instar de celles de «Badr» et de «Ohod». Il est évident que par ces démonstrations de masse, les instigateurs projettent de fasciner ceux parmi les croyants qui n'ont pas encore rejoint leurs rangs. Cet objectif ne peut être atteint, bien entendu, qu'au moyen d'une publicité d'une telle envergure.
Cependant, ce n'est pas le seul but qu'ils poursuivent. A travers ces prières publiques, ils veulent également intimider les autres: les laïcs, les impies et les autorités, les «Tawaghits». Autrement dit, les symboles de la modernité et de l'Etat. Alors, quelle différence y a-t-il ici entre ces «prieurs publics» et les prêcheurs takfiristes des mosquées? Aucune! Les uns s'attaquent aux acquis de la République par la forme, les autres par le fond, les uns usent d'une violence latente, les autres d'une violence patente. Ils préconisent la même stratégie et usent de tactiques différentes, question de mystifier l'opinion et de farder l'entente malveillante. Cette différence de degré n'occulte pas des similitudes évidentes : leur caractère ostentatoire et leurs effets désastreux. Les protagonistes sont les mêmes et il s'agit tout simplement d'un changement de rôles. Cette réalité si manifeste échappe-t-elle aux autorités?
Police parallèle?
Des hommes politiques et des observateurs de la société civile se demandent pourquoi Ennahdha n'a pas bronché après la déclaration du ministre des Affaires religieuses, que nous avons rapportée plus haut, d'autant qu'il est responsable direct de la propagation de cette anarchie qui s'est installée, pendant la prière, autour des mosquées et ailleurs. Ils ne comprennent pas comment le parti islamique observe un silence total à l'égard d'une question aussi importante, dans un contexte qui se caractérise par une grande fragilité sécuritaire, alors qu'il s'empresse de supporter les symboles de l'extrémisme, à l'image de l'un de ses dirigeants, Samir Dilou, qui qualifie le prédicateur Béchir Belhassan, connu pour ses discours hostiles, violents et haineux, de modéré. D'ailleurs, Ennahdha est vivement critiqué par des partis de l'opposition pour avoir appelé au maintien de quelques éléments takfiristes à la tête de certaines mosquées sous prétexte de préserver la sécurité, ainsi que pour la participation de quelques-uns de ses dirigeants et de ses bases aux mouvements de soutien de ces «hors-la-loi» qui veulent semer la discorde et leur ouvrir, au sein de la société, des brèches pour y imposer leur projet obscurantiste. Une conviction générale, qui s'empare de plusieurs esprits, est en train de se répandre dans le pays, selon laquelle certains éléments fondamentalistes, à l'image du prédicateur de Msaken, de l'imam de la mosquée «El Lakhmi», et du porte-parole de «Hezb-Etahrir», jouissent toujours de la protection d'Ennahdha dont le pouvoir est loin de péricliter. Ces sceptiques ne pensent pas que le ministère de l'Intérieur puisse jouer son rôle et mettre un terme aux graves dépassements de ces prieurs forcenés qui menacent non seulement notre présent mais aussi notre avenir. Ce qui veut dire que leur menace est permanente. Leurs appréhensions sont ravivées par les dernières rumeurs véhiculées par certains médias, concernant une éventuelle complicité de hauts officiers du ministère de l'Intérieur dans l'attentat terroriste de Sousse. Au cas où elle serait confirmée, cette nouvelle donnée entérinerait la thèse de l'existence d'une sécurité parallèle, une thèse qui est soutenue, depuis longtemps, par les syndicats des forces de l'ordre et plusieurs partis politiques, et qui est systématiquement démentie aussi bien par la Troïka que par les autorités actuelles. Alors, quand est-ce qu'on va se décider à nous éclairer sur la question? Lorsque les rues de la Tunisie seront transformées en mosquées et que le califat sera instauré?
Trancher la question de l'islam politique
La lutte contre le terrorisme commence par la lutte contre ces idées extrémistes qu'on inculque lors de ces prières pour empêcher qu'elles ne se développent et ne parviennent au stade ultime, celui du takfirisme dont le corollaire incontournable est l'anarchie, la violence, le meurtre... Jusqu'au jour d'aujourd'hui, Ennahdha refuse de déclarer solennellement son abandon définitif du rêve de l'Etat islamique, c'est-à-dire le califat, selon l'expression de son ex-secrétaire général, et dont on voit une piètre configuration avec «Daech». Ses dirigeants refusent toujours de séparer le religieux du politique. Quelle en est la signification? C'est la possibilité de transformer la religiosité individuelle en un projet collectif et en une conception de l'Etat et de la société, selon certains analystes.
Et lorsque les dirigeants de l'islam politique disent qu'ils ne veulent toucher ni à l'un, ni à l'autre, ils commettent une contradiction flagrante, qui est imposée par les contraintes de la réalité, et qui ne découle aucunement d'une conviction profonde. «L'intérêt du pays impose que l'on range l'islam politique dans le camp des ennemis, et c'est lorsqu'on aura tranché cette question que l'on pourra par la suite déterminer celui des amis et entreprendre la guerre contre le terrorisme», soutiennent-ils. Le flou entoure encore et encore le Mouvement Ennahdha, et sa dernière position vis-à-vis de l'article relatif à la criminalisation du «takfir» (accusation d'apostasie) dans le projet de loi antiterroriste et du blanchiment d'argent n'est pas de nature à le dissiper. Mongi Rahoui, le député du Front populaire, ne s'explique pas le refus du parti islamiste, d'autant plus que le «takfir» est criminalisé dans l'article 6 de la Constitution et que le rapport entre le ‘‘takfir'' et le terrorisme est évident et n'est plus à démontrer. Noureddine Bhiri, président du bloc parlementaire d'Ennahdha, a indiqué à ce sujet que les crimes terroristes ne visent pas uniquement les Tunisiens de confession musulmane mais également ceux d'autres confessions». Y a-t-il plus démagogique que ces propos? Cela n'illustre-t-il pas une volonté sous-jacente de préserver l'amalgame sur la religion et la politique? Il est clair que la Tunisie ne pourra pas lutter contre le terrorisme tant qu'elle n'aura pas tranché la question de l'islam politique qui comprend le wahhabisme et le salafisme jihadiste, dont font partie Ansar Echaria et les Frères musulmans, auxquels appartient Ennahdha. La question est d'autant plus importante que les rapports entre les deux derniers est établie et qu'elle n'est pas à prouver. Ces salafistes ne rappellent-ils pas à Ghannouchi sa jeunesse?


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