En dépit d'une conjoncture difficile, le football Tunisien brasse large. Les flux financiers générés sont de grande ampleur, mais les sportifs échappent, globalement, à l'impôt. la fiscalité tunisienne doit-elle donc s'y intéresser, conformément à un certain principe de réalisme, aux sommes issues de l'activité sportive ? Bien entendu, la thématique qu'il serait productif de développer et d'éclairer, portera sur la fiscalité du sportif en tant que personne physique et non sur les revenus des clubs (insignifiants) ou produits financiers issus des droits sportifs tels que les retransmissions télévisuelles (payés sur le tard la dans la plupart des cas). Nous avons posé la question à Majdi Khlifi, secrétaire général du CA, expert en courtage et en droit : «Le sujet vaut le détour, mais il ne faut pas brûler les étapes. Tout d'abord, il est important de reformuler la présentation du sujet. Pour le grand public, les joueurs ne sont pas soumis à l'impôt. Or, quand un club traite un contrat, le montant est calculé sur le net (salaire net) et non sur le brut. Le traitement financier proposé prend donc en compte toutes les autres charges, cotisation, assurance, tout comme c'est le cas pour un contribuable. Pour les joueurs, il s'agit d'une forme de «paquet fiscal» qui ne porte pas son nom. Maintenant, pour revenir à l'impôt sur les salaires des joueurs (impôt sur le revenu), avant de penser à débattre là-dessus, il faut tout d'abord amender la loi sur les associations. Il n'est plus possible pour des clubs au bord du gouffre d'être gérés de la sorte. On parle de professionnalisme dans un microcosme sportif où le bénévolat est roi (une aberration)». Transformer les associations en AOS Transformer les associations en AOS (association à objet sportif) permettra de «courtiser» les annonceurs, les sponsors, mettre en place un conseil d'administration du club, générer à terme des ressources régulières, stables, et, enfin, générer et distribuer des dividendes. Il est impensable de continuer à évoluer grâce à des mécènes et à de généreux donateurs. Notre football vit, du point de vue financier, l'une des pires périodes de son histoire. La billetterie est quasi inexistante, les droits TV ne suffisent pas, les redevances de la tutelle et autre «coup de main» de circonstance ne peuvent plus absorber tous les flux que génère le sport roi. Avant de penser «taxer» les joueurs, il faut faire face aux obstacles d'ordre structurel et conjoncturel. Il y va de la survie du football. Vous savez, à titre d'exemple, je peux vous certifier que le CA et l'EST n'ont pas un sou en caisse. De quelle recette parle-t-on ici ? D'un guichet «saisonnier» en raison des quotas de supporters et du huis clos qui frappe notre football ? Non, sérieusement, ne mettons pas la charrue avant les bœufs. Il n'est pas question de parler de retenue à la source avant d'apporter de larges modifications à la loi sur les associations, obsolète dans ce cas d'espèce précis. Car si l'on veut parler de fiscalité du sportif (droit commun fiscal), cette notion s'axe principalement sur la subordination engendrée par le contrat de travail que l'employeur, le club, détient avec le sportif, salarié. Peut-être qu'à l'avenir, après avoir amendé les textes de loi, l'on analysera l'imposition des sportifs, puis les règles d'imposition communes aux différents revenus des sportifs (selon le palier de salaire ou d'après un paquet fiscal ou autre déduction forfaitaire)». Notre interlocuteur connaît et maîtrise bien son sujet. Car l'on ne peut interférer ainsi sur la relation de dépendance étroite avec des associations qui utilisent aussi les services des sportifs, selon les situations. L'on peut même passer du champs bilatéral au multilatéral (relation avec une fédération, un sponsor, un établissement sportif ou un organisateur de manifestations sportives). Les formes d'imposition peuvent, dans ce cas, être multiples avec des abattements généraux (réduction) sur un montant plafonné dès le départ (retour au paquet fiscal). C'est un vaste chantier qu'il s'agit d'attaquer avec pondération, réalisme et professionnalisme. Eviter les clichés du genre: Les sportifs sont riches, célèbres mais n'aiment pas payer d'impôts. Pour eux, il n'y a pas à proprement dit d'aversion à la fiscalité. Il s'agit juste pour eux de bénéficier à terme d'un régime fiscal cohérent, calculé selon des critères précis. Car tous les sportifs ne sont pas logés à la même enseigne. En effet, les revenus ont un profil très différent.