Le onze national demeure une grande inconnue tant sur le plan individuel que collectif. Que veut-il vraiment ? OTNI (objet terrestre non identifié), l'équipe de Tunisie n'en finit pas de susciter des interrogations. Etions- nous si mauvais pour rater la phase finale de la Coupe du monde ? Etions-nous tombés si bas pour être éliminés au premier tour de la CAN en Angola et sommes-nous si faibles pour plier face au Botswana à Radès et jouer la peur au ventre à Ndjamena face au Tchad? Si les chiffres et les résultats sont là, nous ne sommes en revanche pas sûrs que la valeur réelle de notre équipe nationale et de notre football en général se situent si bas dans la hiérarchie africaine. Car, s'il est vrai que quatre ou cinq nations (Egypte, Cameroun, Ghana et Côte d'Ivoire principalement) demeurent un peu au-dessus du lot, le nivellement plutôt par le haut, (on retrouve de moins en moins de formations continentales faibles) nous situe toujours dans la seconde tranche, même si l'on doit se battre aujourd'hui pour nous y maintenir. Difficulté de se maintenir dans une seconde tranche, impossibilité dans l'état actuel des choses de nous hisser aux premiers rangs : notre équipe nationale est aujourd'hui dans une position inconfortable qu'elle a beaucoup de mal à assumer. Pour une raison objective : le décalage entre l'illusion et la réalité. Auréolé par trois qualifications de suite en phase finale de Coupe du monde (1998, 2002 et 2006) et surtout par une première victoire à la CAN 2004, notre football se croyait installé de droit et de fait dans le gotha africain. Nos dirigeants fédéraux, eux, étaient tellement obnubilés par cette vitrine qui leur assurait succès, médialisation et revenus consistants qu'ils en ont oublié le travail de base, soit au niveau des clubs et des jeunes. Il faut dire également que la démarche de Roger Lemerre qui consistait à compter essentiellement sur nos professionnels à l'étranger (démarche qui allait finir par afficher ses limites mais que Marchand reprend allègrement) a occulté tout ce qui pouvait se faire, (ou ne pas se faire) sur le plan local. Le troisième et dernier volet, c'est le désert au niveau de la formation au sein de nos clubs et le peu de cas qu'on fait des sélections de jeunes, comme en témoignent les dernières nominations à la tête des moins de 15 ans et des moins de 17 ans. Aujourd'hui, pourtant, une génération de joueurs de vingt ans — et un peu plus — est là et attend qu'on lui fasse signe et confiance. Une génération qui n' a pas la chance de bénéficier du même encadrement que celui dont bénéficient nos professionnels à l'étranger mais qui peut nous valoir des satisfactions pour peu qu'on sache les intégrer et les entourer. Urgence, mauvaise conseillère C'est vrai que les calendriers (national et international), s'affolent tout au long de la saison et qu'ils ne laissent aucun répit à nos clubs et à notre équipe nationale. Mais ce n'est pas une raison pour se cacher derrière l'urgence pour oublier l'essentiel. Recours massif à nos professionnels à l'étranger en équipe nationale et aux recrutements dans les clubs où la situation est encore pire. On parle de centres de formation mais on voit très peu de joueurs accéder chez les seniors et y durer. Seule exception peut-être, le CAB, qui ne tardera pas à être pillé. Si ce n'est déjà fait et c'est la règle du jeu… Sur un autre plan, la Tunisie n'enfante plus de grands attaquants. La faute à une détection et à une formation déficientes, mais aussi au recrutement coûte que coûte à l'étranger ou tout simplement chez le voisin. C'est le cas de l'Espérance, de l'Etoile, du Club Africain et du Club Sfaxien mais aussi des autres équipes qui cassent leur tire-lire pour des buteurs fort improbables. Hormis Eneramo (qui joue à la diva), quel avant-centre étranger mérite qu'on s'y attarde et combien de buts toutes ces recrues ont-elles réussis ? Le chiffre est parfois «honteux», d'autant que le niveau de notre compétition n'a rien à voir avec ce qu'on voit ailleurs. Et si Issam Jomaâ, reconverti en avant-centre, n'avait pas la réussite qu'on sait, on en serait à nous poser des questions carrément… existentielles. Eliminatoires de la CAN 2012 puis de la Coupe du monde 2014, soit. Mais il ne s'agit pas là de deux raisons suffisantes pour ne pas entamer le grand chantier qui remettrait notre football sur les rails.