Les pays du voisinage libyen tiennent, aujourd'hui, une réunion de concertation à Tunis. A l'initiative de la Tunisie, les pays en relation directe avec l'intervention militaire de l'Otan en Libye, cherchent à faire entendre leur voix et à faire prévaloir leurs propres intérêts A l'initiative de la Tunisie, les pays de voisinage libyen, l'Algérie, l'Egypte, le Soudan, le Niger, le Tchad et naturellement la Tunisie, tiennent aujourd'hui et demain, à Tunis, une réunion de dialogue et de concertation sur la crise libyenne, avec la participation de représentants de la Ligue des Etats arabes, de l'Union africaine, de l'Union européenne et aussi de l'envoyé spécial de l'ONU en Libye. Objectif de la réunion : qu'est-ce que les pays du voisinage libyen, notamment ceux les plus exposés aux désastres attendus de l'intervention militaire occidentale en Libye, peuvent-ils faire afin que cette intervention soit annulée ou qu'ils soient consultés avant le déclenchement de l'opération militaire ou au moins informés de la date du démarrage des frappes programmées par l'Otan ? Un autre objectif : accompagner positivement les développements se produisant ces dernières semaines sur la scène libyenne en attendant l'installation dans ses fonctions du gouvernement libyen de consensus censé mettre fin à l'existence des deux gouvernements qui prétendent gérer actuellement la Libye à partir de Tripoli et de Tobrouk, alors que le reste des villes libyennes échappent à leur contrôle et sont sous la domination des milices jihadistes. On reprend l'initiative Et s'il y a déjà un premier acquis dont les pays du voisinage libyen peuvent se targuer, c'est bien celui d'avoir repris l'initiative, de se comporter comme des partenaires incontournables dans la recherche d'une solution à la crise libyco-libyenne. «Tout simplement, confie à La Presse un analyste politique sous le sceau de l'anonymat, parce qu'ils se sentent désormais concernés en premier lieu par ce qui se passe en Libye et aussi parce qu'ils ont, enfin, compris qu'ils n'ont rien à attendre des USA ou des pays européens qui préparent l'attaque de l'Otan contre la Libye. Les promesses d'épargner ces pays et de les aider à supporter avec le moins de dégâts possibles les avatars de la guerre restent des promesses et rien que des promesses. La Tunisie et l'Algérie, qui sont les deux pays qui pâtiront le plus de l'intervention occidentale en Libye, ont décidé de compter d'abord sur elles-mêmes et de ne pas attendre grand-chose de la part de l'Union européenne qui multiplie les promesses sans lendemain. D'ailleurs, la dernière visite effectuée par le ministre des Affaires étrangères, Khemaïes Jhinaoui, en Algérie a permis, d'abord, de réaffirmer les fondamentaux des deux pays, à savoir le rejet catégorique de toute intervention militaire dans un pays quelconque, quelles que soient les conditions, et de montrer que l'Algérie et la Tunisie sont déterminées à renforcer davantage la coordination sécuritaire mutuelle en vue de défendre leurs frontières communes contre les dangers daechistes. Le président Béji Caïd Essebsi a mis les points sur les i dans son discours de célébration du 60e anniversaire de l'Indépendance en insistant sur la coopération tuniso-algérienne dans le domaine sécuritaire». En outre, notre analyste estime que «la fermeture des frontières tuniso-libyennes ne constitue point une sanction envers nos frères libyens. Elle vise plutôt à préserver l'intégrité territoriale tunisienne et à nous protéger contre l'intrusion des daechistes qui usent de tous les stratagèmes en vue de s'infiltrer dans notre territoire et d'organiser, avec le concours des cellules dormantes dans les villes tunisiennes, des attaques terroristes comme celle survenue le 7 mars contre la ville de Ben Guerdane». Quant à nos voisins libyens qui ont pris mal les décisions tunisiennes considérant qu'elles sont contraires aux intérêts de leurs pays, ils sont «dans le tort en oubliant que la Tunisie continue à accueillir près d'un million de Libyens installés sur son sol, qu'ils sont intégrés dans le circuit économique et social. Contrairement aux pays de l'Europe qui trouvent des difficultés énormes à abriter quelques centaines de réfugiés arabes fuyant les atrocités de la guerre dans leurs pays». Atouts de réussite Reste à savoir quelles sont les chances possibles pour que la réunion des pays du voisinage libyen prévue aujourd'hui et demain à Tunis puisse aboutir à des résultats concrets ? Pour répondre à cette question, on peut se référer, encore une fois, au discours du 20 mars du chef de l'Etat quand il souligne que la Tunisie a ouvert ses frontières aux Libyens en février 2011 et a contribué au succès de leur révolution sans s'ingérer dans leurs affaires internes et en gardant une distance égale vis-à-vis des différents protagonistes libyens. Aujourd'hui et en dépit de ses difficultés économiques et de sa situation sécuritaire sensible, la Tunisie persévère dans la voie qu'elle s'est choisie en toute liberté et en toute souveraineté, celle de prêter le maximum de soutien à une solution pacifique et consensuelle à la crise interlibyenne. Une source diplomatique rappelle : «Le gouvernement libyen de consensus national est installé en Tunisie, le gouvernement tunisien fait tout son possible pour lui faciliter la tâche et la délégation onusienne chargée du dossier libyen a également son quartier général en Tunisie. Autant d'arguments qui prouvent que notre pays n'a pas failli à ses engagements envers la Libye sœur. Reste à la communauté internationale, en particulier le Conseil de sécurité de l'ONU, d'assumer ses responsabilités et de faire en sorte que le gouvernement de Fayez Sarraj puisse assurer ses fonctions».