Par Khaled TEBOURBI Les crises s'accumulent (politique, sociale, économique ...), mais les arts et les artistes vont leur chemin. Finalement, nos arts sont nos seuls résistants. Les seuls à résister aux avatars et aux dérives qui, depuis 2011, n'en finissent pas de vouloir miner ce pays. Ils ont résisté quand les milices «wahabites» se sont attaquées aux emblèmes de la culture et de la modernité. Ils ont défendu bec et ongles nos théâtres, nos expositions, nos cinémas. Ils ont résisté lorsque les gouvernants eux-mêmes les ont poursuivis de leur hargne .Ils n'ont craint ni matraques ni lacrymogènes, ils sont sortis, et ils ont fait front. On s'en souviendra enfin : au «beau» milieu des étés de la troika, ils ont, surtout, préservé nos festivals. Alors que l'intégrisme «fourbissait ses armes», alors que le terrorisme guettait, à l'affût, ils étaient là à occuper les scènes, à enhardir les publics, à les rassurer. Et ils résistent encore aujourd'hui, ces arts et ces artistes. A leurs «ennemis de toujours», cela s'entend. Mais encore à leurs pires adversaires en ce (prétendu) «temps de paix». A nous -mêmes en fait. Bourguiba s'inquiétait : «au gâchis de nos propres enfants !». Salut et remerciements d'abord à «Jazz à Carthage» et à son dirigeant fondateur, Mourad Mathari, pour le magnifique programme qu'ils proposent en ce tout début de printemps. Avec les finances qui vont mal, le «virus identitaire» qui se répand à nouveau, les problèmes de l'heure et «tutti quanti», il n'y a pas mieux pour revigorer le moral et... fouetter les esprits ! A Hamdi Makhlouf de même, ainsi qu'à toute son équipe des Jmc. Les journées musicales n'en sont qu'à leur quatrième édition, quelle audience pourtant, quel impact et quelle maturité. Le spectacle cette année promet une fête. Urbaine et provinciale. Arabe et africaine. Pas que «Carthage en musique», la Tunisie entière est requinquée ! Et pour finir, reconnaissance au duo Fadhel Jaïbi et Jalila Baccar,et à Chokri Mabkhout, directeur de la foire du livre. Les premiers ont réconcilié la République civile et laïque avec le théâtre universel. On connaît leurs travaux. On les connaît. Les lumières sont leur référence. Et l'obscurantisme est leur cible privilégiée. Le second, parce qu'il a (re)fait de ce rendez-vous des lettres le lieu d'ouverture, de pluralité et d'intelligence pour lequel il fut toujours promis. Patience, donc. Nos arts sont stoïques. Le plaisir est au bout.