Par Jalel MESTIRI Comment définir l'avenir de la sélection? Onze joueurs en position active ? Onze joueurs qui jouent comme s'ils n'en étaient qu'un ? C'est seulement ainsi que l'on multiplie les capacités de chacun. Qui est déjà bon devient extraordinaire, qui est extraordinaire devient exceptionnel. Et qui est d'un niveau discret devient bon. Les différences entre les sélectionneurs qui s'étaient succédé à la tête de l'équipe nationale semblent énormes. Mais en réalité, elles sont tout juste minimes. Mêmes problèmes et mêmes effets. Même blocage et une absence de solutions partagée. Les concepts généraux seraient bien toujours les mêmes, les mêmes, mais les solutions restent à définir. Après avoir vu et vécu la sélection d'hier et du temps passé, l'on se dit que celle d'aujourd'hui ne pourra plus jamais être la même. Ni son football ni le choix ou la gestion des joueurs, ni l'entourage ni l'ambiance. C'est tout un mode de fonctionnement qui devrait changer. Avec un nouvel entraîneur aux commandes, le niveau actuel de la sélection ne lui permet pas de sauter les étapes. D'abord, il faut qu'il y ait le talent. C'est-à-dire les joueurs vraiment capables de faire la différence. Mais il serait encore plus important que ce talent soit davantage valorisé par une véritable culture de professionnalisme. Un sentiment d'appartenance sans faille, pas seulement à une sélection, mais aussi et surtout à une histoire, un patrimoine. L'équipe de Tunisie a besoin aujourd'hui de joueurs qui ont la certitude et la conviction inconditionnelles de toujours pouvoir donner plus. Qui ont une certaine sensibilité à ce qui devrait être accompli sous le maillot de l'équipe de Tunisie... Une équipe où le projet technique et de jeu pourrait prendre enfin la place des intérêts personnels. Une équipe dans laquelle ne devraient figurer que les joueurs les plus fonctionnels et les plus indiqués. C'est à ce niveau-là que la différence pourrait se faire. La sélection, ce n'est pas seulement des joueurs, mais aussi des personnes, des caractères, des personnages. Des joueurs qui comprennent que, sans le travail, il n'y aurait pas d'équipe. Il n'y aurait pas de résultats. Le sélectionneur qui succédera à Kasperczak, ainsi que les joueurs qu'il retiendra, doivent comprendre qu'il ont pour mission de satisfaire un public assoiffé de victoires, de consécrations et d'exploits. Dans le football, tout vient des personnes, de la motivation, de la volonté, de la recherche de l'excellence et de l'envie de travailler... Le moteur du football, c'est le jeu. Et en prenant en considération cette idée, le prochain sélectionneur est appelé à chercher des joueurs opérationnels dans un système bien défini. Dans cette optique, la star serait inéluctablement l'équipe. Il y aura certainement des joueurs qui pourront faire gagner un match, mais les exploits des différents genres se font à travers l'équipe entière. On aurait envie d'avoir une sélection qui a sa propre personnalité, qui exprime ses propres idées de jeu et d'accomplissement. Une sélection qui ne craint pas la nouveauté, qui combat la futilité et la médiocrité qui ont assez duré. Le but n'est autre que d'adapter des concepts qui ont une culture de jeu et de comportement. Le prochain sélectionneur prendra une équipe qui passe par un contexte particulier. Il doit tout lui donner, toute sa personne, tout son temps. Il sera le seul qui, durant les moments difficiles, peut réussir les choses que les autres ne sauront jamais faire. Il n'y a pas le bonheur en sélection et le bonheur ailleurs, dans les clubs...Il y a le bonheur tout court. Alors, comment définir celui dont la sélection a vraiment besoin? Chers joueurs, cher sélectionneur, dites-vous que le football, comme n'a jamais cessé de le préconiser le grand Sacchi, c'est exactement comme la musique. «Dans un orchestre, si un musicien fait un accord légèrement trop tôt ou trop tard, ou alors trop fort ou trop faible, ce n'est plus la même musique. Dans le football, si un joueur part un demi-mètre plus en avant, ou un demi-mètre plus en arrière, trop tôt ou trop tard, cela change tout». Tout cela relève de la sensibilité du football que l'on revendique. On peut voir quelques choses, mais on ne voit pas tout. Le football tunisien a encore du mal à comprendre le jeu, l'organisation. On se focalise sur l'intensité physique ! Et on oublie l'organisation, la motivation, le travail, la capacité de devenir une équipe avec un E majuscule. On s'intéresse à la capacité tactique, mais on néglige la nécessité de l'esprit compact, qui crée le mouvement et la vitesse de jeu. Alors, comment définir l'avenir de la sélection ? Onze joueurs en position active ? Onze joueurs qui jouent comme s'ils n'en étaient qu'un ? C'est seulement ainsi que l'on multiplie les capacités de chacun. Qui est déjà bon devient extraordinaire, qui est extraordinaire devient exceptionnel. Et qui est d'un niveau discret devient bon.