La mission de revue du Fonds monétaire internationale (FMI) vient de finaliser sa visite en Tunisie. Un bilan positif pour cette mission qui s'est mise d'accord avec les autorités tunisiennes sur les politiques économiques nécessaires pour achever la première revue du programme des réformes pour la Tunisie. Une étape qui ouvrira la voie à la soumission du rapport de la mission au conseil d'administration du FMI pour validation, prévue pour début juin 2017, afin de procéder au déboursement de la 2e tranche de 320 millions de dollars (environ 700 MDT). Selon Lamia Zeribi, ministre des Finances, le travail de la mission du FMI a porté sur l'évaluation de ce qui a été convenu dans le programme initial des réformes. Ce programme a été finalisé et signé en mai 2016, pour un montant total de financement de 2,8 milliards de dollars. Une première tranche de 320 millions de dollars a été déboursée à la première signature. L'objectif de cette revue est également d'évaluer les réformes entreprises, la situation économique et financière et revoir les mesures suivantes. La ministre affirme qu'il n'y a pas eu de chambardement par rapport au programme initial, mais il y a eu un retard dans les délais. Un décalage a été opéré par rapport à la réalisation de certaines réformes prévues pour le mois de décembre 2017, à l'instar de la loi sur l'investissement. D'autres réformes comme la loi organique du budget et aussi la loi sur les taux d'intérêt excessifs. Ils ont été soumis à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) en attente d'approbation avant la validation du conseil d'administration du FMI. Difficultés structurelles En termes d'engagements, Mme Zeribi indique qu'il a été convenu d'un déficit budgétaire qui pourrait atteindre les 6% pour l'année 2017. «Toutes les actualisations nous amènent à cela. Mais cela dépend aussi des hypothèses qui sont les prix du baril de pétrole, le prix de change et la croissance du PIB», affirme-t-elle. En ce qui concerne les subventions et la revue à la hausse des produits subventionnés, elle souligne qu'il n'y a pas eu de prévisions pour l'augmentation, sauf probablement pour les hydrocarbures. Cependant, tout dépend de la conjoncture économique actuelle et des difficultés structurelles que connaissent les entreprises publiques, selon la ministre. Elle ajouter que le modèle de ces entreprises est basé sur les subventions de l'Etat. «Mais jusqu'à quand l'Etat assumera ce rôle. Actuellement, nous n'avons pas commencé à travailler avec le FMI sur l'axe de réforme des entreprises publiques. Mais nous allons l'attaquer très bientôt au niveau du gouvernement parce que nous n'avons plus le choix», précise Mme Zeribi. D'ailleurs, elle indique qu'elles seront traitées au cas par cas comme pour les banques publiques, expliquant que le FMI focalise plutôt sur l'axe de la gouvernance et la nomination des premiers responsables et des membres du Conseil d'administration et aussi sur la question de la rémunération. Mais le gouvernement tunisien tient à trouver des solutions plutôt aux difficultés structurelles de ces entreprises, telles que le sureffectif. La question de la retraite anticipée est une solution envisagée par le gouvernement pour, d'abord, la fonction publique et ensuite les entreprises publiques quand le chantier de la réforme sera lancé. Mais Mme Zeribi explique que le budget de l'Etat ne pourra pas répondre aux exigences de cette solution et qu'elle se fera plutôt à travers les caisses sociales et les indemnisations. A ce niveau, le gouvernement est en train de discuter avec les partenaires internationaux afin de recueillir leur soutien. La Banque mondiale s'est dite prête pour l'appui à la réforme du secteur public, selon la ministre des Finances. D'ailleurs, un programme est en cours. Mais ce n'est pas encore clair pour savoir comment sera déployé le crédit octroyé par l'institution financière internationale. Ce qui est clair, c'est que les entreprises publiques seront appelées à dresser un plan d'action et à s'engager sur un contrat de performance avec l'Etat. Un contrat qui sera basé sur l'amélioration de la gouvernance et la question des nominations et aussi sur la réduction du sureffectif. Les hypothèses de la privatisation ou de la recherche d'un partenaire stratégique ou le maintien dans le secteur public sont encore sur la table. D'ailleurs, Mme Zeribi a précisé que le ministère des Finances a travaillé sur des plans d'action et des contrats de performance préliminaires pour certaines entreprises publiques, à l'instar de la Société tunisienne des industries de raffinage (Stir), Tunisair et la Régie nationale des tabacs et des allumettes (Rnta). Couverture des déficits D'un autre côté, le FMI a annoncé un taux de croissance de 2,3% pour 2017, alors que le gouvernement table sur 2,5%. La ministre se montre optimiste affirmant que ce taux est réalisable. Mais il dépend des résultats du premier trimestre qui seront publiés mi-mai prochain. Tout dépend également de la performance des secteurs qui ont été affectés, comme le tourisme, l'agriculture, le phosphate et la chimie. «La hausse de performance de ces secteurs nous permettra de grignoter des points de croissance. Pour le tourisme, par exemple, il y a une augmentation de 33% pour les entrées. Par la suite, nous pouvons avancer davantage si la cadence se maintient. Ce sont des secteurs sinistrés, donc la relance aura un impact visible», souligne-t-elle. En ce qui concerne la dépréciation du dinar, la ministre indique que cela est la résultante de l'activité économique, surtout avec le creusement du déficit commercial de près de 50%, l'épuisement des autres sources de financement comme le tourisme, les transferts des Tunisiens à l'étranger et aussi l'imprévision de la dette. Elle ajoute que l'intervention de la Banque centrale de Tunisie (BCT) sur le marché de change — pour atténuer l'impact de la dépréciation — a été réduite de façon considérable, ces derniers mois. Néanmoins, il y aura une accalmie cet été à cause de l'entrée des crédits, selon Mme Zeribi, surtout que la revue positive du FMI ouvrira la voie pour le déboursement des crédits des autres bailleurs de fonds comme la Banque mondiale (500 millions de dollars), l'Union européenne (500 millions de dollars), la Banque africaine de développement (près de 150 millions de dollars). Pour ce qui est de la loi de finances complémentaire, la ministre indique que jusque-là, il n'est pas envisageable, sauf en cas de dépenses imprévues. Elle évoque le cas de la CNSS qui connaît des difficultés structurelles mais aussi conjoncturelles, parmi elle le faible taux de recouvrement, estimé à 15% seulement, à cause des impayés des entreprises publiques, des entreprises privées en difficulté, mais aussi de certaines entreprises en bonne santé aussi. Concernant sa participation au «Spring Meeting», du 21 au 23 avril à Washington, Mme Zeribi a précisé qu'elle aura des réunions avec le FMI, la Berd, la BM, l'administration américaine représentée par le secrétaire d'Etat aux Finances. Il y aura également la discussion d'un important programme sur lequel la Tunisie s'est engagée dans le cadre du G20 en Allemagne, qui est «Compact with Africa». La Tunisie a été sélectionnée parmi cinq pays africains, qui vont présenter leurs programmes de réforme afin de solliciter l'appui du G20, soit avec de l'assistance technique ou des appuis financiers substantiels. D'autres réunions se tiendront également avec l'organisation américaine l'Usaid et certains pays.