Son geste artistique évolue de la figuration libre à une abstraction lyrique pleine de grâce. Graphiste de formation, voyageur sans bagages autour des villes et des musées du monde, ami et collaborateur de jazzmen tunisiens...le plasticien Walid Zouari n'arrête pas d'étonner et de détonner. Sa dernière exposition Errances, organisée dernièrement à la Galerie de la Médina, démontre toutes les nuances de la richesse intérieure de l'artiste, mais également plusieurs dimensions de la liberté de son geste, qui évolue de la figuration libre à la grâce de l'abstraction. De prime abord, ses têtes, qu'il baigne dans une pluralité d'univers chromatiques, du rose au bleu, et du blanc au rouge, en passant par les ors, les orangés et les verts, attirent le regard du visiteur. Un thème et un graphisme récurrents chez lui, avec lesquels il aime à jongler à souhait, multipliant les superpositions, les alignements, les transparences et les rythmes. Ici les frontières entre l'humain, l'animal et le végétal deviennent poreuses. D'un tableau à l'autre, ses figures, inspirées d'une Aphrodite phénicienne, entraperçues au musée du Bardo, peuvent ressembler à de microscopiques spermatozoïdes, comme à des grenadines automnales, comme à des avatars de régents autoritaires. L'humour, qui traverse son travail sur les têtes, devenues modules estampillées de la signature et de la marque de leur auteur, est comme une forme de politesse du désespoir... Mais c'est l'abstraction qui donne toute sa liberté à Walid Zouari. Cette abstraction dont il tire l'inspiration de la fraîcheur de son regard sur le monde et sur les choses : l'architecture, un fragment de mur, un bout de porte ou de fenêtre, des lignes sur un cahier d'écolier, la nature...est d'abord un geste pour l'artiste. La primauté d'un instant également. Dans ces tableaux-là, les graphismes sont légion. Leur origine ? «Les chiffres, les lignes, les signes, les graffitis qui ont fleuri sur les murs de la ville à la faveur de la révolution», avoue l'artiste. Parce qu'il voyage dans l'océan de l'abstraction sans aucun jalon, libre de tout frein, démuni de tout sens du temps, il lui faut souvent une barrière soulignée dans ses tableaux par un trait pour arrêter l'avancée de l'œuvre. Des points et des lignes droites canalisent souvent la circulation du regard dans ces no man's land. L'autre aventure de Walid Zouari se situe au niveau des souffles de la musique. «Je suis en quête de fusion entre peinture, graphisme et sonorités musicales», chuchote Walid Zouari. Ses amis Anouar Braham et Dhafer Youssef lui ont confié les jaquettes de leurs CD. En 2014, il sort un nouvel Art book de 200 planches sur le thème du dernier album d'Anouar Braham, «Souvenances». Au contact de la musique, ses abstractions deviennent alors lyriques.