Si leurs parents biologiques ont pu les abandonner depuis leurs premiers mois de naissance, le village SOS les a accueillis. Choyés par leurs familles «adoptives», ces enfants reçoivent au quotidien l'amour et l'affection dont ils ont besoin. Ils étaient plus d'une vingtaine d'enfants, mignons comme tout, prêts à accueillir les invités de cette visite spéciale à leur village. Ils gâtaient l'assistance en interprétant des chansons patriotiques et d'autres enfantines. Il s'agit des enfants du village SOS Mahrés, (gouvernorat de Sfax) , ces centaines d'enfants qui ont été abandonnés par leurs familles biologiques, pour une raison ou une autre, et qui ont été placés dans ce village. Si leurs mère et père biologiques ont eu le courage de les quitter depuis leurs premiers mois de naissance, le village SOS les accueille. Entourés par une famille «adoptive», ces enfants reçoivent chaque jour une bonne dose d'amour et d'affection auprès de leurs mamans adoptives, ce qui comble le manque affectif qu'ils risqueraient d'avoir. Et ce n'est pas tout, car ces enfants ont l'avantage d'avoir plus qu'une mère, plus qu'une dizaine de frères et de sœurs de cœur.... L'événement qui a marqué leur week-end dernier ? Une visite programmée par les représentants des médias, des bénévoles, des célébrités (Miss Moyen-Orient 2017) au village SOS Mahrés, en après-midi. Des liens d'amour sincère se sont tissés au fil des années entre les enfants et toute l'équipe du village qui veille jour et nuit à leur sécurité et à subvenir à leurs besoins. Ces centaines d'enfants, nourris, logés, accompagnés et bien encadrés ne manquent de rien ! «Nous acceptons ici les nouveau-nés, les enfants, les adolescents. Nous les accueillons et nous les aidons à bien grandir, nous leur apprenons toutes les valeurs humaines qui unissent les êtres humains et ici, ils se sentent heureux d'avoir à la fois plusieurs frères et sœurs, plusieurs mamans et plusieurs tantes !et ils vivent tous ensemble, sous le même toit, sans complexe, sans tension et sans conflit», explique Amira Manaï Karkni, directrice du jardin d'enfants SOS Mahrés et psychologue. Et de renchérir : «Ce village a été créé dans les années 2000. Appartenant bel et bien à l'Association nationale village d'enfants SOS, il contient 13 maisons familiales qui abritent les enfants sans soutien familial et quatre foyers de jeunes filles et garçons. La superficie du centre s'étale sur un hectare. En plus d'un grand jardin qui entoure l'espace, il y a une salle polyvalente pour pratiquer différentes activités de loisirs. Chaque maison du village contient quatre chambres et une capacité d'accueillir huit enfants, des deux sexes jusqu'à l'âge de 13 ans avant de les placer, une fois qu'ils ont dépassé leurs 14 ans, vers les foyers de jeunes filles et de jeunes garçons. Une "mère SOS" s'occupe d'eux, assure leur confort avec l'aide d'une psychologue qui veille sur leur santé mentale et psychologique. L'équipe comprend en tout 13 mères SOS et 5 tantes, une psychologue permanente, un assistant social qui traite les dossiers et œuvre pour le programme de renforcement de la famille pour la prévention et la prise en charge. Actuellement 70 enfants et 42 jeunes vivent dans le village et nous œuvrons à aider nos enfants à s'intégrer dans la société». Une relation fusionnelle Hinda Mansour, une maman SOS âgée de 45 ans, s'est orientée vers le jardin SOS dès son ouverture. Cette maman, qui a fait des études en langue et littérature anglaises, a suivi une formation spécialisée en accompagnement psychologique et social de l'enfant et elle se charge d'une unité (maison) dans ce village qui accueille 8 enfants. Et elle assume à la perfection sa mission. Elle nourrit ses enfants, elle fait le suivi de leurs études, elle gère les conflits entre eux, leurs problèmes à l'école et elle assure toutes les tâches ménagères, etc. Elle remplace à merveille leur famille biologique et assure le rôle d'une mère idéale ! «S'occuper de huit enfants à la fois, tous âges confondus, s'avère une mission difficile, mais avec le soutien de toute l'équipe, on s'en sort bien. Ces enfants «traumatisés» me tiennent à cœur et j'essaye à chaque fois de panser leurs blessures d'enfance, de les réconforter et répondre à leurs questions si jamais leurs vraies mamans ne veulent pas les revoir ou s'ils ne savent pas qui est leur père biologique. Je suis mamans de plusieurs enfants depuis 17 ans déjà et jour après jour je réalise que j'ai une relation fusionnelle avec mes fils et filles que j'ai vus grandir sous mes yeux», raconte la mère SOS. L'amour, l'attachement, l'affection nous lient Sabrine, une jeune fille âgée de 17 ans a intégré le village SOS depuis l'âge de 2 mois. Actuellement elle est inscrite en deuxième année secondaire, section sciences, au lycée qui se trouve à quelques kilomètres du village. Elle a été élevée avec sept autres enfants et a appris depuis son jeune âge que ceux-ci sont ses frères et sœurs de cœur. La jeune fille, le sourire aux lèvres, se souvient qu'elle a passé son enfance à se bagarrer avec ses autres sœurs et frères mais qu'elle les aime tous tant ; d'ailleurs, elle avait un frère qui a déjà quitté le village l'année dernière et qu'il lui manquait déjà énormément. «Ici c'est l'amour sincère et l'affection qui nous lient l'un à l'autre, moi j'ai la chance, non seulement d'avoir 7 frères et sœurs, mais une centaine. Nous formons tous une seule famille ici et on s'aime tant, même si on se dispute, nous sommes unis pour la vie ! Quant à notre maman SOS elle est formidable ! Quand j'ai été accueillie ici, j'étais la plus jeune de mes frères et sœurs et j'étais la plus gâtée... actuellement, j'ai quitté la maison familiale et j'ai intégré le foyer de jeunes filles qui se trouve juste à côté. Plus mûre et responsable, je devrais maintenant tenir les rênes de la vie toute seule, mais je rends visite quotidiennement à ma mère et à mes sœurs et frères. Et même ceux qui sont déjà partis pour construire leur vie nous rendent visite de temps à autre et prennent de nos nouvelles. Aujourd'hui, dans le foyer de jeunes fille ou je me suis installée, une autre éducatrice, sympathique et gentille nous aide à bien mener notre vie .Quant à ma mère biologique qui m'a abandonnée très tôt, je ne l'ai connue qu'à l'âge de 14 ans et cela n'a pas marqué ma vie négativement. Oui je suis une enfant «illégitime» et cela ne me pose pas de problème du moment que j'ai une autre famille qui a su prendre soin de moi et a rempli ma vie. Je n'ai pas l'intention de quitter ma propre famille qui m'a aidée à être ce que je suis aujourd'hui. Tout ce que je savais sur ma mère biologique, c'est qu'elle ne s'est jamais mariée, qu'elle travaille dans une ville du Sahel et que je n'ai pas d'autres frères ou sœurs biologiques du côté maternel alors que du côté paternel, je n'en ai pas la moindre idée d'autant plus que je ne connais pas toujours qui est mon père biologique et si j'ai parfois l'envie de le connaître vraiment, je ne compte pas partir d'ici car je n'ai aucun sentiment envers eux tous les deux ! Je n'ai qu'une seule mère ici et plusieurs frères et sœurs, ceux et celles avec lesquels j'ai passé mon enfance», témoigne Sabrine. Ils ont donné un sens à ma vie Dans ce jardin, Ayda, s'occupe de deux faux- jumeaux âgés de 6 mois. Abandonnés, elle prend soin d'eux jour et nuit, elle s'occupe de la maison El Imen. Cette jeune fille, qui a fait des études supérieures, et a dû travailler dans le village pour éviter le chômage, a songé à un certain moment à quitter son boulot de tante SOS qu'elle trouve difficile et inadéquat mais, la seule chose qui l'a retenue, c'est l'attachement qu'elle voue à ces enfants. «C'est humain, je n'ai pas eu le courage de partir et de les laisser tomber ! Contrairement à leur mère biologique et je ne comprends toujours pas d'ailleurs son attitude ! Mes enfants, et surtout ces jumeaux, sont toute ma vie et je ne compte pas les abandonner !», dit-elle avec beaucoup d'émotion. Chaque maison dans ce village comprend quatre chambres occupées par huit enfants et dont l'une d'elles est réservée à la maman SOS, une cuisine équipée, deux douches et deux WC, une salle à manger et un salon équipé d'une télévision. Idem pour les foyers à la différence qu'ils sont aménagés avec le système de bloc. Ici, c'est la bonne conduite, la propreté et l'hygiène qui règnent. Chaque chose est rangée dans l'ordre et les mamans, les éducatrices n'épargnent aucun effort pour apprendre à leurs enfants le savoir-faire et le savoir-vivre. Certes, dans le village SOS, ce n'est pas le lien de parenté qui les lie les uns aux autres, c'est plutôt l'amour, l'affection et la fraternité qui les unissent tous... Un amour-baume qui panse leurs blessures et les rend plus forts et plus confiants !