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Par Mohamed MEDDEB
Peut-on prétendre réformer l'administration sans s'attaquer profondément au volet personnel ?
Publié dans La Presse de Tunisie le 29 - 07 - 2017

Dans son intervention à l'ARP le 20 juillet, le chef du gouvernement nous a présenté, il est vrai dans les grandes lignes, la stratégie du gouvernement dans sa guerre contre la corruption. Cette stratégie comprendrait, entre autres, la réforme de l'administration qui, telle qu'exposée, devrait porter sur les deux axes suivants :
- La simplification des procédures administratives (environ 2.000),
- L'administration électronique (l'informatisation de l'ensemble des procédures administratives). Mais sans la moindre allusion au volet personnel.
D'abord, il est à noter que ces deux mesures ont toujours figuré dans les programmes de réforme annoncés par la plupart des gouvernements depuis 2011, si ce n'est même avant cette date. Quant au fond de la question, la simplification des procédures et l'informatisation de l'administration, quoiqu'elles contribuent en partie à juguler le fléau de la corruption, elles seules et sans s'attaquer au volet personnel de l'administration, ne permettent pas de gagner la guerre déclarée contre la corruption.
Aucune stratégie de lutte contre la corruption en rapport avec l'administration n'a la moindre chance d'aboutir, si elle ne s'appuie pas en premier lieu sur la révision de la politique de gestion des ressources humaines. Et ce, pour les raisons évidentes suivantes :
la corruption est un phénomène comportemental et un état d'esprit du personnel de l'administration dans ses rapports avec les citoyens d'une part et le service public de l'autre ; et ce, quels que soient les procédures administratives adoptées et les outils informatiques ou autres moyens mis à leur disposition ;
La corruption n'a jamais été un résultat direct de la complication des procédures administratives ou le manque d'informatisation de ces mêmes procédures. Il suffit d'aller voir combien l'administration tunisienne est riche en systèmes d'information évolués, en moyens informatiques, en applications informatiques validées mais délaissées, en moyens techniques de gestion et de contrôle de toute nature, et pourtant ces moyens n'empêchent pas leurs utilisateurs, hautement qualifiés par ailleurs, de s'en détourner ou tout simplement de les mettre hors service au vu et au su de tout le monde pour accomplir leurs sales besognes. La corruption est plutôt la résultante de la conjugaison d'une multitude de facteurs et de l'action de nombreux acteurs où l'agent de l'administration occupe une position centrale. Pour cela, ce même agent doit être au centre de gravité de toute stratégie de lutte contre la corruption et de là au centre de toute réforme de l'administration.
Les procédures sont appliquées par les agents de l'administration, les systèmes d'information, eux aussi, sont mis en œuvre et exploités par ces mêmes agents. Nombreuses sont les administrations qui ne manquent ni de systèmes d'information évolués, ni d'informaticiens qualifiés, ni de matériels informatiques et autres, et pourtant elles baignent dans la corruption.
Ainsi, l'agent de l'administration, les ressources humaines étant au centre du phénomène de corruption, doivent être de même au centre de toute réforme de l'administration et de là de la stratégie de lutte contre la corruption et la première priorité de celle-ci, chose qui n'apparaît malheureusement pas ainsi dans le volet «Réforme de l'administration» de la stratégie du gouvernement de lutte contre la corruption, du moins telle que présentée le 20 juillet à l'ARP par M. le chef du gouvernement.
La réforme de la politique de gestion des ressources humaines dans l'administration devrait porter, à mon avis, sur les mesures suivantes :
Faire valoir dans la gestion des ressources humaines le principe de «la méritocratie et rien que la méritocratie», depuis les concours de recrutement, à la formation, aux promotions, aux désignations dans les fonctions, à l'attribution de tout type d'incitations, primes, médailles ... Garantir la méritocratie présuppose nécessairement justice dans l'objectivité et la transparence. Adopter aussi le mécanisme des concours pour toute désignation. Ne jamais hésiter à récompenser, gratifier la probité, l'effort et le dévouement, en même temps, sévèrement sanctionner les récalcitrants et bien sûr les fraudeurs... Ne jamais hésiter à renvoyer ceux qui enfreignent la loi, qui portent préjudice à l'administration, à l'Etat, à la collectivité et au pays. c'est cela la vraie justice ! Traiter tout le monde de la même manière (kif ellyyekhdem kif elly ma yekhdemch), pour je ne sais quelle raison (!) et les mettre sur un pied d'égalité mène inévitablement à la corruption, au délitement de l'administration et à la faillite de l'Etat ;
Valoriser, à tous les niveaux, les organes de contrôle internes et externes et les responsabiliser, leur fixer des objectifs et leur demander des comptes ; naturellement leur donner les moyens d'accomplir leur mission et cesser de s'en servir pour y regrouper ceux dont le chef n'en veut pas (!) L'agent ne peut avoir que deux positions, en situation d'exercice normale ou l'objet de mesures disciplinaires ou judiciaires, mais en aucun cas entre les deux ! Cela va de la crédibilité même de l'administration et de l'Etat même.
Développer dès la formation à l'école le sens de la responsabilité à tous les niveaux et inclure le critère « l'exercice de sa responsabilité et de contrôle envers ses subordonnés » parmi les critères d'évaluation de chacun des cadres. Tout agent et cadre est aussi responsable du bon fonctionnement et de tout ce qui se passe dans la cellule, service ou administration qu'il dirige. On n'est pas responsable seulement de ses actes personnels, mais aussi de ceux de ses subordonnés, il faut contrôler leur travail et leurs comportements et prendre les mesures nécessaires et selon le cas, récompenser, sanctionner ou en proposer. Les cadres de l'administration doivent cesser de faire «le spectateur neutre» vis-à-vis de ce qui se passe au sein du service dont ils sont les chefs.
Adopter un système d'avancement « normalisé » : avancement par concours réels et non seulement sur dossier, et ce pour ne pourvoir que les postes vacants et pas plus. Considérer la promotion au grade supérieur, d'une part, une récompense pour l'effort fourni dans le grade actuel, de l'autre un investissement dans les potentialités de l'agent concerné dans le grade et la fonction supérieurs. Les promotions de masse, ne tenant compte d'aucun critère objectif de rendement des promus, est la meilleure façon de garantir la déconfiture de l'administration et ... Pour cela, il y a lieu de faire arrêter l'organisation et les besoins réels en personnel de chaque service et administration pour identifier les déficits à combler et les surnombres éventuels à éviter.
5. Accélérer la mise en place d'un système permettant le départ volontaire et/ou obligatoire anticipé du personnel en surplus des besoins réels de chaque administration et service. Cela améliorera le rendement des agents en exercice et de l'administration en général, car le surnombre n'est pas facteur d'une meilleure productivité, bien au contraire. Par ailleurs, une telle mesure renforcera forcément la lutte contre la corruption. Un jour ou l'autre, l'Etat sera contraint de mettre en question les nombreuses dizaines de milliers de recrutements non justifiés réalisés au titre de la Révolution (!), sans cette révision point de salut. Reporter cette opération n'est que perte de temps au détriment de l'intérêt du pays.
Adopter au sein des services sensibles de l'Etat qui sont en rapport direct avec l'application de la loi en général, tels que les corps paramilitaires, forces de sécurité intérieure, douanes, justice, organes de contrôle, services d'achat, services financiers ...mais pas seulement ; adopter donc et généraliser le principe des mutations et du roulement périodiques dans les postes et les responsabilités. A quoi peut-on s'attendre de la lutte contre la contrebande par exemple dans une région où l'écrasante majorité des fonctionnaires des corps paramilitaires chargés de faire appliquer la loi dans ce domaine se trouvent originaires de cette même zone ? Les mutations géographiques et le roulement dans les postes sensibles et de responsabilité contribuent non seulement à la consolidation de la formation et de l'expérience du personnel et à l'équitable répartition des charges du travail dans les zones reculées et services particuliers, ces mouvements organisés du personnel brisent les réseaux de corruption et rendent leur reconstitution plus difficile. Bien sûr, ces mutations doivent toucher tout le personnel, selon une périodicité étudiée, pas plus de trois à cinq ans maximum au même poste. Quant à la continuité du service, elle devra être recherchée au niveau de la cellule, du service et de l'administration dans son ensemble, mais jamais au niveau de l'agent même. L'immobilité des agents dans leur poste et service est synonyme de démotivation, de routine, puis de négligence et de productivité en décroissance continue.
Aussi, faut-il accorder une attention particulière aux conditions matérielles, surtout au niveau du logement, de certaines catégories des agents de l'Etat exerçant dans des conditions particulières, tels que les corps paramilitaires et autres exerçant dans les zones reculées du pays, surtout pour faciliter leurs mutations dans les différentes régions selon les besoins réels de l'administration.
Telles sont quelques pistes à considérer pour réformer la politique de gestion des ressources humaines dans la fonction publique et à inclure dans le programme de réforme de l'administration. S'il faut réformer l'administration, c'est d'abord au changement de l'état d'esprit des agents qu'il faut s'atteler, aux moyens ensuite. Il faut bien sortir l'administration publique de l'esprit du « bélic », du salaire garanti indépendamment de l'effort fourni et du rendement et faire valoir les concepts de méritocratie, de probité, de dévouement, de rendement et de rentabilité... Sans une telle réforme, où le personnel constitue le centre d'intérêt et d'effort, toute stratégie de lutte contre la corruption n'est que peine perdue. Naturellement, s'agissant de personnel et de changements importants, de telles mesures n'auront certainement pas que des supporters. La réforme de l'administration reste incontournable non seulement pour gagner la guerre contre la corruption, mais aussi pour tirer le pays du bourbier socioéconomique où il se trouve. Cette réforme est à mener sous la devise « Méritocratie – Justice - Transparence ».
Que Dieu garde la Tunisie.


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