« Braquage politique » pour les activistes de Manich Masameh, « putsch constitutionnel » pour les partis de l'opposition, les inconditionnels de la non-réconciliation promettent une recrudescence des mouvements d'opposition à la loi adoptée au Parlement mercredi dernier. Mardi dernier au centre-ville, le lendemain devant l'ARP au Bardo, les meneurs de la campagne « Manich Msameh » vont redescendre, cet après-midi, à l'avenue Bourguiba pour protester contre l'adoption « forcée » de la loi organique sur la réconciliation administrative, votée par 117 voix dans une atmosphère tendue. L'appel à la marche d'aujourd'hui a été lancé depuis le siège du Snjt, où une conférence de presse s'est tenue, hier matin, au cours de laquelle les jeunes révoltés ont défilé leur chapelet d'acerbes critiques contre le camp des votants et leurs alliés partisans. L'itinéraire de la manifestation aura, ainsi, lieu à partir de la place de l'Indépendance, la statue Ibn Khaldoun comme point du départ. Requête pour inconstitutionnalité de la loi Avec pour slogan « persistance face au règne des mafieux ». D'emblée, la parole a été donnée au député du Mouvement du peuple, Zouhaier Maghzaoui, qui n'a point hésité à déclarer la guerre contre cette loi et ses faiseurs, qualifiant la plénière de mercredi dernier de manœuvre frauduleuse improvisée. Soit un passage en force fomenté aux dépens d'autres priorités constitutionnelles, comme combler les postes vacants au sein de l'Isie, voter le Code des collectivités locales... «La bataille, déjà entamée en été 2015, date à laquelle fut annoncée l'initiative présidentielle portant initialement sur la réconciliation économique, bat, désormais, son plein. », assène-t-il, sur un ton menaçant. Et d'ajouter qu'il y a encore du temps pour se rattraper. Surtout qu'une pétition a été signée par 35 députés pour contester la constitutionnalité de la loi en question. Dans ce sens, indique-t-il, un recours sera bientôt émis auprès de l'Instance provisoire du contrôle de la constitutionnalité des projets de loi. « L'histoire de la Tunisie démocratique commence aujourd'hui», estime-t-il. Et M. Maghzaoui n'y va pas quatre chemins pour tout remettre en cause : « L'adoption de cette loi est une forme d'oppression, voire un dessein malsain de putsch constitutionnel et révolutionnaire à peine voilé...», fustige-t-il en conclusion. Début de mobilisation dans les régions Quant au jeune leader de « Manich Msameh », Sami Ben Ghazi, il l'a considérée comme un véritable hold-up sur les acquis du peuple et de la révolution. Une sorte de « braquage politique », selon son expression. Ce qui contredit, poursuit-il, la déclaration de Youssef Chahed selon laquelle son nouveau gouvernement sera un gouvernement de guerre. « De quelle guerre parle-t-on, si pareille loi, aussi suspecte, blanchira autant de corrompus, sans jugement aucun, ni des comptes à rendre», s'étonne-t-il, évoquant qu'une telle loi de réconciliation a été vivement dénoncée par plusieurs organisations nationales, en l'occurrence l'Ugtt et l'Ordre des avocats. Il a relevé que l'étape à venir exige bel et bien de resserrer les rangs de l'opposition. «De notre part, nous ne céderons jamais. Le combat continue», martèle-t-il. Sabra Chraifia, un des membres actifs, a juré de ne pas reculer face aux agressions et d'actes de harcèlement dont ont fait l'objet les jeunes de ladite campagne. D'ailleurs, souligne sa collègue Khaoula Sliti, les manifestants ont commencé à agir dans les différentes régions. « L'élan de protestation contre cette loi va gagner en ampleur », dit-elle. La manif d'aujourd'hui serait-elle le fer de lance ?