A l'image d'une saison agitée, les demi-finales de la coupe de Tunisie surviennent dans un climat tendu où les acteurs ne semblent pas épargnés Demain, on connaîtra donc les heureux élus de Dame Coupe pour l'apothéose du 12 mai prochain. Si vous demandez à cette diva capricieuse à l'envi si le classico ESS-CA sera une nouvelle fois au rendez-vous, elle vous répond malicieusement: «J'en sais rien !». Dire que la logique veut que nous retrouvions ces deux clubs dans l'acte final tient très mal compte tenu des ambitions adverses, notamment d'un Club Athlétique Bizertin capable, dimanche dernier, d'infliger dans un avant-goût la première défaite au club de Bab Jedid depuis neuf rencontres de championnat. Les copains de Seddik Mejri et Zied Ounalli, les buteurs du week-end précédent, annoncent la couleur. Ils prennent de la sorte un avantage psychologique non négligeable, et promettent «l'enfer» (façon de dire, bien sûr) à leurs hôtes dans la fournaise du stade Hmida-El Moujahed de Menzel Abderrahmane où ils ont fini par prendre leurs aises. Ambiance d'autant plus surchauffée que le président cabiste a cru bon d'y ajouter du sien. Franchissant toutes les lignes rouges, et selon une recette fort improbable qu'il a cru devoir révéler devant les téléspectateurs ahuris de la chaîne Attassia, il a évoqué un arrangement secret entre des parties prenantes politiques (rien que ça !) en vertu duquel le Club Africain remporterait la coupe de Tunisie en échange de son silence pour classer le dossier du jeune supporter clubiste Omar Laâbidi, retrouvé mort noyé à l'Oued Meliane, à quelques centaines de mètres du stade de Radès. En matière de science-fiction, on ne peut pas aller plus loin... Bien entendu, sa sortie médiatique risque de coûter cher au premier responsable cabiste, lequel a été auditionné par la fédération et risque des poursuites pénales. L'adversaire du jour, le Club Africain, se présentera à Menzel Abderrahmane dans une nouvelle configuration. Du neuf dans du vieux, en somme, puisque Kamel Kolsi revient aux affaires suite à la séparation avec Bertrand Marchand. C'est comme si la stabilité instaurée depuis l'avènement du technicien français était appelée à ne pas durer. Comme si une malédiction s'abattait sur le club de Bab Jedid, le condamnant à ne jamais connaître la paix. A ne jamais faire les choses comme les autres. Marchand a remis le club rouge et blanc sur les rails. A un certain moment, on ne jurait que par son nom. On a commencé à lui chercher noise en sacrifiant à des leçons d'analyse sémantique. Du genre: que veut-il dire par «J'ai pris le CA alors qu'il était à l'avant-dernière place ?». Le coach français a-t-il menti ? On sait qu'une fois tombé dans ce jeu-là, on n'en ressort plus...Pourtant, on a vu par le passé pire au CA: un entraîneur limogé alors que son équipe était première au classement (le Néerlandais Adrie Koster). La leçon n'a pas servi. L'histoire est un éternel recommencement produisant un incroyable gâchis. Sauf que cette fois-ci, nous pensions qu'avec une équipe dirigeante aussi jeune, tout à la fois efficace et discrète, ce genre de conflit d'orgueil et d'ego ne pouvait plus arriver. Dans quelles dispositions va se présenter le tenant du titre dans la coquette cité de Menzel Abderrahmane ? Ce qui est certain, c'est que les Nordistes, définitivement débarrassés de la hantise de la relégation, vont vendre chèrement leur peau. Quitte à aller jusqu'à l'épreuve des penalties, laquelle a fini par passer pour leur exercice préféré... Cela ne leur ressemble pas ! L'affiche du stade olympique de Sousse paraît plus déséquilibrée d'autant que l'Etoile Sportive du Sahel compte sur la coupe pour sauver sa saison. L'arrivée de Kheireddine Madhoui a mis de l'ordre dans la maison. La lucidité, le bon sens et le pragmatisme du technicien algérien peuvent mener les copains de Hamza Lahmar très loin. Le retour de blessure d'Alkali Bangoura, Ammar Jemal et Rami Bedoui offre de nouvelles solutions au champion d'Afrique 2014 à la tête de l'Entente Sportive de Sétif. Aussi bien en valeur technique qu'en vécu et expérience, les locaux partent favoris. On peut certes compter sur Skander Kasri, de retour à la Zliza pour trouver la parade. Sauf que les copains de Halim Darragi se trouvent en butte à d'insolubles problèmes financiers qui les poussent régulièrement à faire la grève. Avec la JS Kairouan, la Zliza reste le premier club à avoir observé cette saison le plus de grèves des entraînements. Rien que mercredi, un sit-in a été organisé pour protester contre l'absence de soutien financier que ce soit de la part des autorités régionales ou des mécènes. Le Groupe chimique tunisien a déjà tout donné. Conséquence: récemment, on n'était toujours pas certain de pouvoir aller en stage à Monastir. Le président officieusement démissionnaire Ghassène Marzouki et son bureau sont impuissants. Les caisses du club sont à l'agonie. Dans une atmosphère aussi tourmentée, que peut bien faire l'Avenir de Gabès pour démentir les pronostics et braver la logique ? Les supporters gabésiens craignent que leurs favoris se contentent de faire de la figuration, dimanche, à Sousse. Mais on sait que cela ne ressemble pas vraiment ni au club rouge et noir bâti sur les valeurs de défi et d'obstination, ni à son coach friand de challenges. Accéder pour la première fois de l'histoire du club du Sud-Est en finale de Dame Coupe: un tel cadeau ne se refuse pas !