La bonne gestion des ressources hydriques est une nécessité pour mieux exploiter leur potentiel afin de le préserver pour les générations futures Les pluies des derniers jours ont élevé les espoirs quant à une saison pluviométrique prometteuse surtout avec les problématiques liées à l'approvisionnement de l'eau, que ce soit pour l'agriculture ou pour l'eau potable. Un souci qui n'est pas nouveau, mais qui a été relevé essentiellement ces dernières années avec la baisse importante de la pluviométrie. Le stress hydrique est bien une réalité en Tunisie. On l'estime à 450 m3 par habitant par an, ce qui est au-dessous du seuil mondial. L'eau est certainement un facteur de développement des pays. Il a toujours été au centre de toute politique de développement économique vu son impact sur la croissance et aussi étant un élément essentiel de la souveraineté d'un pays. La Tunisie est ainsi directement concernée, étant un pays où l'agriculture contribue pleinement au PIB. La bonne gestion des ressources hydriques est une nécessité pour mieux exploiter leur potentiel afin de le préserver pour les générations futures. Mais pour gérer cette situation, il est fondamental d'investir davantage dans les infrastructures hydrauliques. Un effort qui a été consenti depuis l'indépendance avec la construction de plusieurs barrages, servant actuellement à stocker les eaux pluviales et à assurer la distribution pour l'agriculture et pour les communautés. En fait, les barrages constituent une composante stratégique du système d'approvisionnement de l'eau. Mais ces dernières années, ils n'arrivent pas à retrouver la moyenne de stockage des années précédentes. Une question qui nécessite une réflexion globale sur la question de la gouvernance de l'eau. A ne citer que le barrage Sidi Salem au Nord du pays, le plus grand du pays, qui a enregistré pour la période du 1er septembre 2017 au 22 août 2018 des apports de 186,321 mètres cubes contre 142,738 mètres cubes à la même période de la saison précédente alors que la moyenne de la période est de 399,751 mètres cubes. De même, le stock enregistré pour la journée du 23 août 2018 est de 117,439 mètres cubes contre 124,045 à la même date en 2017. Transfert des eaux En juillet dernier, Abdallah Rebhi, secrétaire d'Etat aux Ressources hydrauliques et à la Pêche, avait déclaré que le taux de remplissage total des barrages n'a pas dépassé la moitié de leurs capacités. On estime également que le manque d'eau est estimé à environ 632 millions de mètres cubes, soit la quantité minimale pour subvenir aux besoins en eau. Il a ainsi affirmé que le taux de remplissage des barrages dans le Nord-Ouest et le Nord-Est est de 79%, zones qui collectent la plus grande majorité des eaux pluviales. L'Oued Majerda, qui apportait, en temps normal, un milliard de m3 par an, ne parvient plus à mobiliser des quantités suffisantes. Il s'avère que cet effort de mobilisation au niveau des barrages doit s'accentuer davantage surtout en ce qui concerne le transfert des eaux dans les zones arides à sèches, principalement au centre et au sud du pays où les ressources souterraines ne parviennent plus à subvenir aux besoins des populations. 20 MDT ont été ainsi consacrés, selon le ministère de l'Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, au transfert des eaux de l'extrême nord du pays. Une autre problématique est celle de la prolifération des forages illicites qui engendre une surexploitation de la nappe souterraine avec ses conséquences imprévisibles. Pressions Du côté de la Société Nationale d'exploitation et de distribution des eaux (Sonede), l'heure est grave. Elle est en train de distribuer 650 millions de m3 par an, tablant sur des augmentations de 3% par an. D'ici 2030, le volume distribué pourrait atteindre un milliard de m3 par an, selon la Sonede. Dans le milieu rural, ce manque a poussé certaines familles à recourir à l'eau potable pour l'irrigation et l'alimentation du bétail, ces dernières années. Ce qui a représenté une pression supplémentaire sur le réseau d'eau potable et sur les Groupements de développement agricole (GDA). D'autant plus que la Sonede a quelques difficultés à recouvrer les sommes qui lui sont dues par certains GDA ayant des difficultés financières. En juillet dernier, le secrétaire d'Etat avait annoncé que la Sonede a effectué plus de 88 opérations de forage de puits, surtout dans les régions du centre, pour pallier le manque d'eau. Le dessalement de l'eau de mer est aussi une alternative à laquelle le ministère a accordé une importance cruciale. La station de Djerba est déjà entrée en exploitation en début mai 2018, avec une capacité de 50 mille m3 par jour, extensible à 100 mille m3. Ajoutons à cela des projets de stations de dessalements à Zarat (Gabès), avec une capacité de production de 50 mille m3 par jour, extensible à 100 mille m3. Il s'agit également de la station de dessalement de Sfax, avec une capacité de 200 mille m3 par jour avec une première phase de 100 mille m3, et un coût d'environ 900 MDT et aussi de la station de Sousse pour desservir la région du Sahel et celle de Kerkennah, d'une capacité de 8 mille m3. En attendant, il faut dire que la question de la gouvernance de l'eau est un souci au cœur des politiques de développement. Afin d'assurer une bonne gestion des ressources hydriques, l'approche à moyen et long terme est fondamentale afin de gérer les périodes de sécheresse et de pluviométrie. Si cette saison s'annonce prometteuse, il faudra profiter de l'occasion pour mieux cibler les défaillances qui grèvent le système de gestion de l'eau en Tunisie et trouver des solutions adéquates pour chaque région.