Par Jalel MESTIRI On pourrait soustraire les problèmes de forme qui ne cessent de marquer le quotidien du football tunisien, mais les questions essentielles pour l'avenir du sport roi restent toujours sans réponses. Il semble entendu que les valeurs sportives et toute la signification, qui s'y rattache, n'ont plus de sens ou de raison d'être ni pour les joueurs, ni pour les dirigeants, ni pour le public. C'est à ce titre qu'ils réagissent chaque dimanche et toutes les fois où ils se retrouvent sur le terrain. Le modèle tunisien, tel qu'il est revendiqué, est affecté par des considérations et des arguments qui n'ont aucun rapport avec le sport. La remarque n'est pas anodine puisque la discipline, le fair-play ne font pas partie des priorités absolues des principaux acteurs. Tout cela dépasse largement le débat autour de l'idée que l'on se fait d'un match, d'un résultat, d'un titre. Depuis quelque temps, l'on ne cessait d'insister sur la nécessité de tirer les enseignements des dérives avant que ce ne soit trop tard. On doit admettre que le football tunisien ne peut plus être laissé au pouvoir de quelques personnes. Que ce soit sur le plan de fiabilité sportive, ou d'ordre structurel. On se rend compte aujourd'hui qu'il est tombé si bas et qu'on n'avait rien fait pour y remédier. La responsabilité de toutes les parties est totalement engagée dans la mesure où plus personne ne semble s'inquiéter de ce qui se passe dans presque tous les stades. Personne ne semble aussi s'inquiéter des débordements qui ont plus que jamais atteint une situation de non-retour. L'image donnée dépend beaucoup trop des déviations dans lesquelles le football est entraîné et dont beaucoup de parties assument visiblement une grande partie. Tout cela n'est pas lié uniquement aux joueurs et aux supporters. C'est sûrement pareil à d'autres niveaux d'investigations intenables. Une nouvelle génération de responsables se donne aujourd'hui le droit de se faire raison sur le terrain et ailleurs, de contester, de polémiquer et défendre à tort ou à raison ses clubs. Le football tunisien se serait ainsi installé sur une montagne de dérives. Trop risqués car soutenus par des responsables privés de discernement, d'imagination, d'initiatives et surtout de compétence. Ce qu'ils cherchent n'est pas tant d'être appréciés comme des dirigeants vraiment capables de tirer leurs clubs vers le haut et de leur donner un peu de grandeur, mais plutôt de se cacher derrière de faux alibis, des polémiques inutiles. Convaincus comme ils le sont toujours que le club leur saura gré de voir leurs limites s'exposer et défiler ici et là, ils ne s'arrêtent même pas lorsqu'ils réalisent qu'ils sont sur le point de déborder. Aujourd'hui, l'espoir fait place au doute et la discipline et le sens de la responsabilité sont en voie de congélation. Le football tunisien tourne le dos à la vie sportive, à la vie tout court. Les standards et les règles communément respectés sont bafoués. Il s'est avéré que se partager la médiocrité, c'est ce qu'on aime le plus dans le monde «merveilleux» de ces nouveaux responsables. D'ailleurs, rares sont ceux qui s'y retrouvent. Car plus personne n'est convaincu des raisons des choix des uns et des autres. L'impact est négligeable et les rôles sonnent faux. Pas dans le ton, pas dans le match. Pas bien dans leur peau aussi. Et trop tourné vers la médiocrité. Cela, personne ne semble aujourd'hui l'ignorer car sur les défaillances et le gâchis d'un football miné par un vide existentiel, se profilent depuis longtemps les dessous d'un avenir pas tout à fait rassurant. Il ne faut pas chercher ailleurs les raisons d'un vrai malaise et d'une profonde interrogation sur un milieu qui ne travaille plus suffisamment ses fondamentaux. Que ce soit sur le plan purement sportif, ou d'ordre organisationnel et structurel, il cumule les mêmes défaillances et les mêmes dérives. Le pire est que les différentes parties prenantes ont vraiment le sentiment d'avoir raison. Leur appréciation de la situation leur paraît juste. Mais le problème est qu'elles ont raison toutes seules. Le fait qu'il a longtemps oublié ses repères ne devrait pas pour autant empêcher le football tunisien de rebondir. L'on se souvient encore que l'une de ses principales vertus était dans le passé l'aptitude à se remettre en question au bon moment. Cette tendance constitue cependant une rareté, surtout dans les périodes où ça ne rigolait pas tous les jours. Il n'en demeure pas moins que la situation actuelle devrait soulever une réelle prise de conscience et entraîner une mobilisation de tous les instants. On espère que tout cela fera chaud au cœur de tous les amoureux du football. Et pourquoi pas servir de message à tous ceux qui ont porté, d'une manière ou d'une autre, atteinte à sa vocation, à ses principes et à ses valeurs.