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La vérité qui blesse
Opinion : Hôpitaux publics


Par Hamadi AMRI*
Peut-on assimiler à une pathologie incurable la situation de nos hôpitaux ? Si cela s'avère exact, notre tutelle est, en tout cas, le mauvais médecin. Bien plus et sur plusieurs tableaux, on peut même constater qu'elle est l'origine et le vecteur principal de cette maladie. Croyant bien faire en changeant le statut de l'hôpital d'établissement public administratif (EPA) en établissement public de santé (EPS), le ministère de la Santé publique n'a fait que prescrire le bon traitement pour le mauvais malade. Il faut rappeler qu'au lendemain de l'avènement de l'ère novembriste, une série de pseudo-réformes a envahi tous les secteurs économiques et sociaux du pays. La santé publique n'a pas fait exception et n'a donc pas échappé aux directives de la Banque mondiale et autres bailleurs de fonds internationaux.
Dès le départ, une espèce de copier-coller sur le système canadien de santé a été installée de force, abstraction faite de la réalité et des exigences de la société tunisienne. On est alors parti d'un credo favorisant la rénovation et la rationalisation des administrations, l'instauration du Système d'information de la gestion hospitalière (Sigh), l'amélioration de l'accueil et la prise en charge des malades. On s'est trouvé, en cette année 2011, devant une gestion en mode 1.0 (degré zéro du management), un système d'information obsolète et déficient, un taux d'insatisfaction élevé chez le commun des citoyens et les acteurs de la santé. Propagande officielle mise à part.
Héritant d'une situation qui apparentait l'hôpital public tunisien aux anciens hospices de l'époque coloniale (les efforts des années 50 et 60 ayant surtout ciblé l'éradication des grands fléaux d'alors), les stratèges de la santé publique en Tunisie ont affiché l'intention de se pencher enfin sur la gestion moderne de l'hôpital. Toutefois, et en le faisant, ils n'ont pas abandonné leurs vieux réflexes centralisateurs et paternalistes à la soviétique. Parmi ces réflexes, le système de la comptabilité publique (scrupuleusement suivi par les EPA) a continué à sévir, non par les nouveaux textes mais surtout dans les esprits et dans la plupart des démarches. On devrait souligner que ce mode longtemps appliqué dans le domaine de la gestion de la santé n'est pas dénué de rationalité ni de vertus. Mais s'il a obtenu certains résultats dans une conjoncture donnée, il a montré ses limites à travers le temps. Surtout lorsque l'on constate que les demandeurs de soins ont dépassé la médecine de masse vers une prise en charge plus spécialisée, donc qualitative. C'est pour cela que la nouvelle approche des soins a appelé de nouveaux modes de gestion.
En 1991, les professionnels de santé ayant su qu'il y avait une réforme en gestation, s'attendaient à une transformation en profondeur touchant surtout la gouvernance et la conception même de l'hôpital public.
Des débats interprofessionnels qui ont eu lieu durant la décennie 1980-1990 ont abouti à des recommandations appelant à une remise en question et à un nivellement par le haut de tout le secteur de la santé. Mais dès la promulgation des premiers textes instaurant la nouvelle réforme, la déception (voire la sidération) fut générale. A commencer par le statut du nouvel EPS, qui a pris subitement une forme bâtarde et incompréhensible entre l'EPIC (1) et l'EPA (2). Un statut qui n'a fait que renforcer les anciens mécanismes de politisation, d'irresponsabilité et de centralisme bureaucratique. L'anachronisme était manifeste entre une société hospitalière mouvante, et un pouvoir figé dans sa logique ancestrale et ses « faits de prince ». Quant aux motifs invoqués pour justifier ce «diktat», ils furent, entre autres, l'incapacité de l'hôpital public de s'autogérer, de s'autofinancer et de s'autocontrôler.
Or, et contrairement à ce que la majorité de nos citoyens et certains de nos décideurs pensaient, nos hôpitaux ne sont pas uniquement des bouffeurs d'argent, ils contribuent réellement à la richesse du pays. Une richesse matérialisée par une valeur ajoutée qui se chiffre à des millions de dinars. Il suffit d'apercevoir le schéma de solde intermédiaire de gestion (3) issu des états financiers de nos hôpitaux publics, pour comprendre. A titre d'exemple, l'un de nos EPS les plus connus (4) a enregistré à la fin de l'exercice 1998 une valeur ajoutée brute s'élevant (en dinars tunisiens) à 7.143.225 MD. Chiffre comparable à ceux réalisés pour la même période par certaines entreprises publiques moyennes à vocation purement commerciale. Ceci sans compter un manque à gagner considérable dû aux défaillances du système et aux mauvaises négociations avec les organismes d'assurance-maladie.
L'hôpital est également capable d'avoir ses propres mécanismes de contrôle, avec un conseil d'administration représentatif et souverain, et aussi des organes actifs de contrôle de gestion et d'audit interne. Nous y reviendrons avec plus de détails à une autre occasion. Un contrôle gouvernemental supplémentaire peut accompagner ou suivre cette gestion sans l'entraver.
De l'autonomie financière et la personnalité civile
Comme nous l'avons dit, nos hôpitaux n'ont connu aucune autonomie financière ni administrative depuis la création des Etablissements publics de santé. Sur le plan financier, le budget d'exploitation censé être préparé en premier lieu avec les différents acteurs de santé au sein de l'hôpital, puis logiquement discuté et négocié avec la tutelle, n'a jamais, à notre connaissance, suivi cette démarche. On a seulement droit à un budget global à la clôture de l'exercice (encore un autre mal à gérer avec les blouses blanches) prédécidé par le ministère. Une sorte d'enveloppe automatiquement reconduite, quelle que soit l'activité réelle des services de l'hôpital. Les meilleurs peuvent se voir ainsi pénalisés, et les plus mauvais échapper à toute sanction.
Pour les budgets d'équipement ou d'investissement, c'est encore pire. Non seulement les critères de dotation sont inconnus de tous mais, et surtout, les crédits alloués sont centralisés et gérés (si le mot lui convient !) suivant des considérations clientélistes parfois, et très subjectives souvent. On assiste à ce niveau à une allocation des équipements en fonction des relations des chefs de services hospitaliers avec certains cadres de l'administration centrale, et non pas suivant les besoins de l'hôpital dans son ensemble. Par conséquent, et pour ces mêmes considérations, il n'est pas rare de trouver des services suréquipés et d'autres négligés et sous-équipés. L'hôpital n'intervient qu'à la toute dernière phase du processus. C'est-à-dire l'exécution de la tâche pénible de l'appel d'offres, l'impression et la publication d'une quantité de paperasse et l'affrontement des humeurs d'un fournisseur impayé. Car cette singulière cogestion entre la tutelle et la direction de l'hôpital aboutit, dans la plupart des cas, à une lenteur excessive au niveau des procédures. Aussi bien au sein de l'administration centrale qu'à l'échelle de l'hôpital, ces procédures génèrent un autre retard au niveau de la fourniture en équipements, donc un effet négatif sur la qualité des soins et le paiement des fournisseurs. Effet d'autant plus néfaste que le reste des opérations s'effectue selon le lourd et long système de la comptabilité publique. Il n'est donc pas rare de voir certains fournisseurs (surtout ceux dont l'assise financière n'est pas solide) menacés dans leurs trésoreries à cause de cette machine bureaucratique. Pour cela, l'un des objectifs de la réforme était, entre autres, de débarrasser les EPS du système public de comptabilité.
Sur le plan administratif, on n'a pas échappé à cette même approche centralisatrice. En fait, et contrairement aux dispositions réglementaires de la réforme, l'hôpital continue d'être un simple rouage d'exécution des ordres de l'administration centrale. La direction hospitalière, abstraction faite de son degré de compétence (on reviendra sur ce sujet), n'a pratiquement aucun pouvoir pour maîtriser ses moyens humains. Recrutement, promotion, redéploiement, motivation, grilles de salaires et sanctions sont toujours, dans le moindre détail, l'apanage exclusif des services ministériels si ce n'est du lointain Premier ministère. Même si une bonne partie de ce personnel est maintenant rémunérée sur les ressources propres de l'hôpital ! Ceci n'a fait qu'entraver l'instauration d'un vrai management et, par conséquent, détériorer davantage le fonctionnement interne de l'institution hospitalière.
Dans cette logique, la principale défaillance de cette réforme dans sa phase d'application réside dans sa négligence du facteur humain. La réforme aurait, certes, un bon impact sur n'importe quelle organisation, notamment sur le plan managérial, si on a tenu compte des hommes et des femmes qui vont la mettre à exécution. En amont, aucune consultation ni dialogue n'ont eu lieu avec les professionnels et acteurs de la santé lors de l'élaboration du projet de 1991. En aval, les textes régissant cette réforme ont plus ou moins touché tous les aspects gestionnaires, sauf celui des ressources humaines, restées soumises à ce vieux et inefficace statut général de la Fonction publique. (5)
Du système d'information hospitalier
Nul ne peut ignorer que l'activité de soins (principale activité de l'hôpital) génère un grand nombre de données et d'informations de natures diverses. La gestion et la communication de ces données par le personnel administratif, médical ou infirmier, s'avère de plus en plus complexe. Les données médicales proprement dites sont traduites en informations médico-administratives, d'autant plus que les directions hospitalières doivent disposer régulièrement d'indicateurs d'activité médicale afin d'orienter leur stratégie. C'est pourquoi l'informatisation et la gestion de ces documents sont tributaires du développement des Systèmes d'information hospitaliers (SIH). L'objectif de ce dernier est au moins triple (6) :
1) Optimiser la prise en charge de l'activité de soins en améliorant la gestion de l'information à l'intérieur de l'unité médicale.
2) Concourir à une meilleure coordination des tâches médicales, administratives et logistiques effectuées au sein de la structure hospitalière.
3) Respecter les objectifs du sommet stratégique (médecins et directions) de l'établissement lors de la définition des priorités.
Malheureusement, le système d'information introduit par le biais de cette réforme ne répond à aucun critère de système d'information généralement admis, c'est-à-dire qui converge vers le patient. En effet, et contrairement à ce qui aurait dû être fait au niveau du système d'information, ce dernier a été implanté sous forme de modules d'applications informatiques (des sous-systèmes d'informations tels que l'admission, la facturation, les soins, les finances, la comptabilité générale, la gestion des stocks, etc.) discontinus. Au lieu d'être installées et interfacées simultanément, ces applications ont vu le jour d'une manière sporadique et avec des intervalles de temps allant parfois jusqu'à cinq ans. Une pratique pareille ne peut que nuire au traitement des flux d'informations, à leur exploitation par les décideurs et à l'utilité même de ces informations.
Vingt ans après le démarrage de cette expérience, on assiste actuellement à un pseudo–système d'information inexploitable, qui n'est pas clos et intégré et ne traitant pas instantanément tous les flux d'informations financières et d'activité. En outre, ces modules ont été confiés au centre informatique du ministère de la Santé publique (Cimsp) (7). Alors qu'il était préférable de développer ce système par l'hôpital, qui est le mieux placé pour connaître et exploiter ses ressources en termes de matériels , logiciels, personnels, données et surtout procédures. En effet, l'expérience a montré que tous les «projets» pondus et imposés par la tutelle et ses parrains ont connu de retentissants échecs. Contrat par objectifs, contrat-programmes, plans directeurs, mise à niveau, qualité totale, santé pour tous, etc. : tout y était passé, avec des pertes de temps et d'argent conséquentes. Le système d'information n'a pas, hélas!, échappé à cette règle. On constate, d'ailleurs, qu'il y a une déconnexion totale entre le management de tête et les sous-systèmes d'informations.
Pour conclure, une question se pose : la réforme hospitalière doit-elle à son tour faire l'objet d'une réforme? La réponse est évidemment oui. Un diagnostic plus rapproché s'impose en cette période post-révolutionnaire. Les solutions déjà proposées ne concernent pas uniquement la gestion administrative et financière, mais l'ensemble des besoins médicaux, administratifs, logistiques et financiers. Et ce , pour une meilleure prise en charge des patients, une gestion rigoureuse et inventive des ressources, une optimisation du traitement des demandes/résultats d'actes et une révolution dans la gestion du dossier médical.
(1) Etablissement public à caractère Industriel et Commercial.
(2) Etablissement public à caractère administratif.
(3) Indicateur utilisé pour apprécier la gestion d'une entreprise de point de vue analytique.
(4) L'hôpital Habib Thameur
(5) Loi n° : 83-112 du 12/12/1983 portant statut général des personnels de l'Etat, des collectivités locales et des entreprises publiques.
(6) M. Fieschi, P. Dujols et R. Beuscart : Informatique Médicale et Stratégies Hospitalières Volume 6 – 1993.
(7) On s'est toujours demandé sur l'utilité de la création de ce centre comme de bien d'autres (Centre technique de maintenance biomédicale hospitalière, Centre pédagogique du MSP...) si ce n'est pour satisfaire un parent ou replacer un allié.


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