Ijaba vient d'envoyer un télégramme pour annoncer officiellement le maintien du boycott des examens du second semestre dans tous les établissements universitaires. Les membres de l'Union des enseignants universitaires et chercheurs tunisiens, Ijaba, ne veulent pas en démordre. Les enseignants universitaires qui ont boycotté les examens du premier semestre poursuivront, en effet, leur mouvement de protestation et récidiveront au cours du second semestre si le ministère de l'Enseignement supérieur poursuit sa politique de l'autruche et continue à ignorer leur principale revendication, à savoir la réactivation de l'accord de 2018. Le dialogue entre le syndicat et le ministère est rompu depuis le mois de novembre dernier. Le bras de fer et le dialogue de sourds n'ayant que trop duré, les enseignants avaient décidé alors de passer la vitesse supérieure en mettant en œuvre différentes formes de contestation allant du port du brassard rouge au boycott des examens, en passant par une grève administrative. Malgré la pression du syndicat de l'enseignement universitaire pour obtenir la satisfaction de leurs revendications, le ministère continue à rester de marbre. Cette attitude passive est loin de décourager les enseignants universitaires qui en ont ras-le-bol d'être sous-payés par rapport à leur ancienneté et leur compétence et qui estiment qu'il est temps de revaloriser la grille salariale en fonction de leur grade et de leur ancienneté. A titre d'exemple, un enseignant du supérieur titulaire d'un doctorat (Bac+10 minimum pour les ingénieurs) et ayant une ancienneté de quinze ans et plus perçoit en moyenne un salaire de deux mille dinars. «Non seulement nous sommes sous-payés par rapport à notre niveau, notre compétence et notre ancienneté mais nous ne percevons pas non plus de 13e mois et nous n'avons pas de Mutuelle de santé», s'indigne Nejmeddine Jouida, docteur ingénieur en télécommunications à l'Ecole d'ingénieurs de Sousse et coordinateur général du syndicat indépendant Ijaba. 5.000 docteurs au chômage La revalorisation salariale ne serait pas leur seule revendication. Afin de résorber la crise du chômage qui touche les doctorants, l'enseignant universitaire qui a pris part au dernier mouvement de protestation appelle le ministère à ouvrir de nouveaux postes pour les doctorants chercheurs sans emploi. «Cela fait trois ans qu'il n'y pas eu de concours pour le recrutement des doctorants. 5.000 docteurs sont aujourd'hui au chômage. La spécialité la plus touchée est la biologie. Afin de trouver une solution, le ministère a lancé le contrat chercheur pour dix mois qui permet de recruter des doctorants chercheurs à plein temps dans des centres de recherche en contrepartie d'un salaire de 300 dinars. Non seulement ce contrat ne garantit pas un emploi dans la durée mais le salaire proposé est dérisoire». Parce que leurs compétences sont souvent sous-estimées, plusieurs doctorants chercheurs se sont envolés vers d'autres cieux en quête de meilleures conditions de travail et d'un salaire respectable. Ils sont, en effet, plus de 4.500 universitaires à avoir migré en Allemagne et vers les pays du Golfe à la recherche de meilleures opportunités professionnelles, rappelle le coordinateur général, inquiet par cette fuite des compétences grises qui sont récupérées par des nations étrangères, réjouies de cette manne qui a contribué à stimuler et à promouvoir le secteur de la recherche dans plusieurs domaines clés. Pour l'heure, bien que conscients que 120.000 étudiants dans 72 établissements risquent d'être privés d'examens au cours du second semestre si le boycott est maintenu, le syndicat Ijaba ne pense pas, toutefois, baisser les bras et prévoit de poursuive la lutte pour défendre les droits des enseignants et des doctorants au chômage.