La sélection n'a, à quelques exceptions près, jamais bénéficié de l'apport des entraîneurs qu'il faut et à la place qu'il faut. L'opacité des faits laissait en suspens une question qui ne cessait de revenir : les entraîneurs qui se succédaient étaient-ils confirmés sur une durée conséquente, ou soutenus en attendant la suite? Minée par le doute, rongée par l'épuisement, aussi bien physique que moral, l'équipe de Tunisie avait laissé entrevoir, à travers les échéances et les épreuves auxquelles elle faisait face, un manque évident de classe et d'allure. Elle ne cessait, au fait, de mettre en évidence un profil et un rang de niveau de plus en plus bas, conformément à ce que ses responsables, techniques et administratifs, symbolisaient. Elle a chuté à un niveau jamais atteint, planant au-dessous de la concurrence. Sur la grande scène du jeu, il lui manquait le fond, le style, la cohérence, les constructeurs, les dribbleurs, les finisseurs et une capacité générale à gérer une série de matches avec aisance, astuce, variété et supériorité. C'était beaucoup, c'était énorme effectivement. Il y avait comme un turnover chez les responsables qui se succédaient à la tête de la fédération. Beaucoup d'entre eux, dont la plupart appartiennent au business, découvraient le football en arrivant à la fédération. Certains n'avaient-ils pas contribué, aussi bien par maladresse que par malveillance, à l'installation d'un climat d'instabilité et de doute. Aujourd'hui, la sélection, en quête d'une nouvelle reconstruction, devrait revendiquer de façon éclatante une véritable culture de jeu, une personnalité collective, une qualité supérieure de ses individualités, de ses prédispositions à un épanouissement collectif, une capacité à contrôler et emballer les matches. Bref, un équilibre parfait entre le physique, la technique, la création et l'efficacité, tout en sachant gérer n'importe quel événement offert à la planète du foot. Il ne fait pas de doute que ce qu'on peut appeler une conscience de soi devrait être aussi et surtout une conscience de relation et de tout un environnement. Dans le passé, il y avait sûrement quelque chose d'injuste d'être jugé par ceux dont on considère qu'ils ne sont pas plus compétents que soi. La sélection n'a, à quelques exceptions près, jamais bénéficié de l'apport des entraîneurs qu'il faut et à la place qu'il faut. L'opacité des faits laissait en suspens une question qui ne cessait de revenir : les entraîneurs qui se succédaient étaient-ils confirmés sur une durée conséquente, ou soutenus en attendant la suite? Le football avait en ce temps-là une fâcheuse tendance à se robotiser en dehors du terrain. En même temps, son organisation suivait un cheminement tout aussi regrettable dans la mesure où les entraîneurs qualifiés et compétents vivaient dans un monde où ils ne pouvaient pas dire ce qu'ils pensaient. Ne pas être hypocrite, ne pas être diplomate, voilà leur plus grand «défaut». Le pire, c'était que si on les mesurait avec ceux qui l'étaient, ils perdraient toujours à la comparaison. Il était difficile de parler d'avenir dans un métier aussi flou que celui de sélectionneur. L'avenir, on ne savait jamais de quoi il sera fait. Tout pouvait s'arrêter du jour au lendemain. Ce qui n'a jamais, cependant, changé, c'est la volonté initiale, de base, chez certains qui ont réussi à survivre à la médiocrité. Celle de rester des éducateurs et d'entraîner dans leur sillage des hommes et des énergies. Et c'est précisément parce que le métier d'entraîneur est quelque chose de particulier qu'il se doit d'être inaccessible à tel ou tel débordement. A un comportement de bas étage. S'énerver, hurler, c'est facile, mais est-ce la bonne méthode pour se faire un nom comme le prétendaient certains techniciens qui se reconnaîtront d'eux-mêmes... Ce n'est pas justement parce qu'on hausse le ton qu'on peut manifester plus d'autorité. Au contraire, savoir parler, savoir communiquer, ça oblige les joueurs à mieux écouter, à mieux réagir. Il y en a qui, par leur exceptionnel charisme, leurs intuitions, leur abattage, leur flamboyance, se sont entraînés au sommet et on ne peut leur contester le fait de disposer de ressort et de courage. Mais il y en a aussi qui, par le mensonge et la manipulation, se faisaient hélas descendre plus bas qu'ils n'avaient été hissés, bien sûr accidentellement!... Aujourd'hui, nous sommes heureux et surtout soulagés de voir un entraîneur comme Ammar Souayah bénéficier enfin de la confiance qu'il mérite, un entraîneur qui vit avec passion et profondeur son métier, ses relations avec les joueurs et le plaisir du devoir accompli. C'est ce visage-là, et ceux qui lui ressemblent, dont nous aurons désormais besoin. Quand on dit que l'on veut être fort, on doit savoir avec qui et conformément à quelles alternatives. Mais les mots, en la circonstance, ne restent que des mots, et la réalité du terrain de jeu, diverse, âpre, joyeuse, farceuse, rebondissante, est la seule qui tranche.