• L'horaire administratif dans la fonction publique se reprendra lundi son cours normal, mais à la réflexion, la séance continue, introduite il est vrai dans des circonstances exceptionnelles, comporte des avantages. Elle pourrait s'avérer positive si elle était adoptée dorénavant pour toute l'année Il s'agit d'un choix dont l'impact sera déterminant aussi bien sur l'organisation sociale que sur le bien-être des individus. L'aménagement de l'horaire administratif a fait l'objet d'un long débat ces dernières années au sein des instances gouvernementales et législatives. On parlait d'introduire la séance continue ou la semaine de cinq jours avec le samedi chômé. Les pouvoirs publics ont tergiversé et l'adoption d'un nouvel horaire est chaque fois renvoyée sine die. En 2007, le Premier ministère a commandité une enquête sur la séance unique. Sans suite ! Il y a huit mois, le dossier a été remis sur le tapis mais encore une fois niet, parce que le ministère de l'Intérieur en a voulu ainsi. Pourtant, la séance continue pendant toute l'année c'est tout bénef, résument des fonctionnaires : «Economie d'énergie, décongestion de la circulation, gain de temps et d'argent pour la communauté nationale, plus de temps consacré aux loisirs, une dynamique associative réelle surtout que la vie politique est moins guindée qu'auparavant et une meilleure activité commerciale». Des coûts socioéconomiques considérables Le régime de la double séance présente, notamment dans la capitale, de nombreux inconvénients qu'il serait très bénéfique à la fois au pays et aux citoyens de lui substituer celui de la séance continue couplée avec la flexibilité des horaires. A cet égard, on pourrait envisager un réaménagement des horaires où l'administration et les organismes assimilés accueilleraient le public, du lundi au samedi, sans interruption de 9h00 à 16h00. La flexibilité des horaires offrirait la possibilité de gérer librement son temps de 8h00 à 9h00 et de 16h à 18h00. Les formules peuvent être combinées : flexibilité des horaires de travail avec une plage fixe et une autre aménagée en fonction des contraintes individuelles, comme par exemple «les permanences pendant les pauses de midi à 13h00», indique R. Barouni, cadre au ministère du développement. Cette formule doit certainement contribuer à l'allègement des dépenses de l'Etat sur plusieurs tableaux. Pourtant, la double séance a toujours des défenseurs : «La double séance est indispensable pour maintenir une certaine cadence de rendement», avance un fonctionnaire. Or, il a été prouvé en Tunisie que le travail administratif est pratiquement au ralenti à partir de 16h00. Le reste du temps, soit 120 minutes, c'est une perte sèche en consommation d'énergie (éclairage, climatisation) et en frais superflus de téléphone… Sans oublier les coûts de transport, le gaspillage du temps libre en déplacements. Et quand on n'arrive plus à consacrer du temps à la vie familiale, on renonce à la vie socio-culturelle et aux loisirs. Chose nuisible à l'équilibre individuel. Il y a aussi la pollution dans les grandes agglomérations. Bref, la double séance, ce sont des coûts socioéconomiques considérables. «De toute manière, les recherches en matière de gestion des ressources humaines prouvent que les fonctionnaires travaillent effectivement pendant seulement 4,5 à 5 heures par jour», souligne un statisticien. Et il ajoute : «La séance continue est susceptible d'atténuer l'ampleur du retard et de l'absentéisme». De plus, le travail à distance offre une alternative intéressante dans la mesure où le problème temps ne se pose pas. Avec les moyens technologiques modernes, on peut même gagner en termes de célérité et d'efficacité. Temps libre et exercice de la démocratie Après la libération de la vie politique et sociale, l'ouverture à tous les niveaux est plus que jamais souhaitée pour exercer la démocratie au concret. Auparavant, il n'y avait aucune vie sociale, culturelle et politique. Tout était cloisonné, tout obéissait au pouvoir unique. Désormais, la voie est ouverte à tous pour introduire la dynamique nécessaire dans un pays qui a été réduit au silence pendant plusieurs décades. Désormais chaque citoyen doit faire entendre sa voix, participer à l'action, créer une atmosphère de vie. Bref, se prendre en charge. Désormais, il faut travailler mieux et plus, mais il faut aussi des opportunités pour entretenir un débat social. Cette action civique moyennant des moyens et des infrastructures devra être conduite en direction des jeunes qui réclament liberté et confiance. Ces jeunes dont on apprécie l'ingéniosité et la volonté ont un potentiel considérable à mettre en valeur. Raison pour laquelle il faut leur consacrer le gros des programmes. La femme représente aussi un partenaire de choix. Malheureusement, le principal handicap qui l'empêche d'accéder à des postes de responsabilité, de développer ses compétences et d'avancer dans sa carrière réside dans la difficulté qu'elle a à concilier son rôle familial entier et un poste de responsabilité. La mobilisation pendant toute la journée, de six heures du matin à vingt-deux heures du soir, les trajets entre le lieu de travail, le foyer et l'école, crèche ou jardin d'enfants, tout cela réduit à néant la disponibilité de la femme pour un développement individuel. Une cohérence s'impose tout de même entre un mode d'organisation du travail d'une part, la culture et les loisirs, d'autre part. L'aménagement du temps de travail aussi bien dans l'administration publique que dans les écoles apparaît comme un instrument pour réaliser cette cohérence. Les formules peuvent être combinées : flexibilité des horaires de travail avec une plage fixe et une autre aménagée en fonction des contraintes individuelles, comme par exemple « les permanences pendant les pauses de midi à 13h00 pour ne pas bloquer le travail», indique R. Barouni, cadre au ministère du Développement. Quand le travail se réconcilie avec la culture... L'investissement dans la culture, les loisirs et la protection de la famille doit devenir la marque de fabrique. L'animation de la ville profitera de cette formule horaire puisque les fonctionnaires pourront se consacrer aux activités culturelles et participer à l'amélioration de la qualité de la vie. Quand le travail se réconcilie avec la culture et les loisirs, la société atteint un haut degré de développement. Quand la vie culturelle fait défaut, c'est un indicateur suffisant de sous-développement. Bien entendu, l'adoption de la séance continue doit s'accompagner de mesures à caractère social pour aider les familles qui favoriseront le développement des structures et des métiers dans les loisirs et les prestations sociales, ce qui générera de nouveaux emplois. Toutes les résistances au changement ne doivent pas nous décourager ou nous détourner des objectifs fixés car l'immobilisme et les conservatismes sont toujours des facteurs qui freinent le progrès. Compte tenu de la nécessité de rationaliser le temps de travail pour l'adapter à la politique d'avant-garde de l'Etat tunisien et, afin d'éviter le maximum d'effets pervers, il est important de conduire une étude préalable. Vu la multiplicité des enjeux, notamment au niveau de la restauration qui s'en ressentira, cette étude devra porter sur les implications socioéconomiques (création d'emploi et productivité, infrastructures d'accompagnement).