Par Dr M.A. BOUHADIBA* La Tunisie disait Kaplan est unique parce qu'elle est le plus proche pays africain de l'Europe. Elle est aussi unique parce que sa population est constituée d'une classe moyenne éduquée et qu'il n'y a pas de divisions de la société car il n'y a pas de minorités et ni d'idéologies différentes. Aujourd'hui nous commençons à sortir d'une révolution qui s'est transmise comme une traînée de poudre à d'autres pays dont la Libye. Les heures du colonel Kadhafi sont comptées et la Libye sera un jour un pays libre et démocratique comme nous. Ce que laissera Kadhafi ce sera un pays détruit, vide, abandonné par les étrangers qui ont fui, incapable de fonctionner et une économie à refaire de fond en comble. Les démocrates libyens s'organisent déjà en pensant à l'après-Kadhafi, mais nous en Tunisie avons-nous pensé à l'après-Kadhafi ? Avons-nous fait des projections dans un avenir proche ? La Libye est la continuité de la Tunisie, nous avons une histoire commune, la même langue, la même religion, et les Libyens aiment la Tunisie. La Tunisie est aujourd'hui encore plus proche d'eux car nous les avons aidés à éviter une catastrophe humanitaire en ouvrant nos frontières aux réfugiés. Nous étions un seul pays d'un jour mais cela n'a pas duré à cause des dédales de la politique et des ruses politiciennes qui avaient fait échouer le processus. A l'époque cette union nous faisait peur, et l'entente entre un chef charismatique et un jeune colonel excité pouvait faire penser au mariage de la girafe avec le zèbre, mais aujourd'hui, entre deux pays démocratiques et égaux, les choses pourraient être bien différentes. La Tunisie a deux grands défis à relever, le chômage et la relance de l'économie. Les ministres du gouvernement de transition soutiennent qu'ils n'ont pas de baguette magique, cela veut dire que pour régler ces problèmes il faudra des années, c'est une réalité, la tâche est pratiquement impossible. De l'autre côté, la Libye regorge de pétrole et manque de tout, sa population est sous-éduquée, ses ressources mal utilisées et pour fonctionner le pays a besoin de milliers d'étrangers venus du Bangladesh, de Chine et d'Afrique. Ces mêmes étrangers ont quitté le pays et n'y reviendront pas avant des mois. Quant à nous, nous avons une frontière commune, une simple ligne à traverser. C'est un marché énorme qui va s'ouvrir dans quelque temps et de par notre proximité et nos similarités, nous devrions être prioritaires. Nos frères libyens auront besoin d'ouvriers, de professeurs, de médecins, d'infirmiers, d'ingénieurs que nous avons en grand nombre. Il y avait en Libye avant les événements un million d'Egyptiens et seulement 30.000 Tunisiens. Pourquoi cette différence ? Sans doute parce que les Egyptiens avaient su être plus convaincants que nous, mais imaginons l'inverse de ce ratio ou l'égalité, ce serait un million d'emplois pour nous et la fin de tous nos problèmes… C'est un fait les Libyens ont besoin de nous et nous avons besoin d'eux. Notre destin est lié, l'ignorer serait une erreur qui nous coûterait des années de retard. Une union sous n'importe quelle forme pourrait être aujourd'hui envisageable et n'aurait jamais été aussi opportune, la Libye étant la nouvelle «frontière» pour les jeunes Tunisiens. L'UMA n'a jamais marché, faisons un pas de deux, car nous sommes le meilleur atout l'un de l'autre. Ensemble, en moins de deux ans, nous pourrions sereinement atteindre la prospérité,