Edifié sur une montagne rocheuse à une altitude de plus de 1.000 mètres, le musée du patrimoine traditionnel de Kesra a vu le jour le 18 mai 2009. Cet espace culturel bâti sur une superficie de 436 mètres carrés est le second dans le gouvernorat de Siliana, après celui de Makthar. Il a été implanté au cœur du vieux village, juste au pied de ce qui reste d'une citadelle byzantine. Ce musée abrite 176 objets relatifs au vécu et aux rites de jadis dans cette région, classée parmi les cinq premiers villages berbères archéologiques en Tunisie. L'espace se compose de trois ailes consacrées chacune à un thème. La première aborde la vie quotidienne de la femme kesroise traditionnelle. Dans un coin fort semblable à une hutte, figurent des ustensiles de la cuisine traditionnelle : une «tabouna» (le four traditionnel servant à préparer le pain de même appellation si commun à la campagne tunisienne), des jarres et des gargoulettes en argile pour la conservation de l'huile d'olive, un moulin traditionnel, un tamis et une outre en peau de chèvre (chekwa), servant à la préparation du petit lait. Dans l'autre coin, sont exposés des matériaux relatifs à la toison des moutons, à côté d'autres servant à affiner la laine, produit essentiel pour la confection du burnous et de la kachabia, manteau à capuchon traditionnel pour se protéger contre le froid glacial qui règne pendant la saison de la neige, dans cette région. La deuxième aile est, quant à elle, réservée aux rites des Kesrois lors des grandes occasions et fêtes. La première vitrine donne à voir les méthodes susceptibles, selon les croyances populaires, de garantir la performance physique du nouveau-né. L'une de ces méthodes est la gmata, qui n'est autre que la bande de tissu servant à emmailloter le nouveau-né. A chaque événement ses coutumes. Après la naissance, il y aura la circoncision, un rituel autrefois célébré tel un mariage. Ce crescendo temporel orchestre la répartition des vitrines dans l'espace. Ainsi, celle relative à la circoncision contient des ciseaux, une djellaba et une chéchia. Des objets face auxquels les souvenirs s'éveillent pour des moments de pure nostalgie. L'autre vitrine aborde, suivant le même fil conducteur, le plus sacré des événements dans le vécu des habitants de Kesra : le mariage. On y repère les costumes des mariés : une djellaba pour l'homme et une sorte de sari oriental dit h'rèm, pour la femme. La sacralité de cet évènement social est encore traduite par les pratiques conçues pour éloigner le mauvais œil et bénir l'alliance du couple. Cela est représenté par divers textes et objets tapissant une partie du mur. Le thème de la mort et les rites qui s'y rattachent sont également représentés par des objets tels que le linceul, le savon et le parfum servant à la toilette funéraire avant l'adieu. La troisième aile du musée abrite divers modèles des bijoux que portait, autrefois, la femme de Kesra, pour s'embellir et pour indiquer son rang dans la société. Le musée a été pourvu d'une petite salle réservée à la vidéoprojection de films documentaires parlant de l'histoire d'une région qui a connu la succession de plusieurs civilisations. Et un étage destiné à abriter les conférences. Le musée du patrimoine traditionnel de Kesra draine des visiteurs de toutes les régions du pays. Et accueille parfois des touristes étrangers. Mais il n'a toujours pas réalisé le rayonnement escompté. Ce musée aurait pu être considérablement plus original s'il avait été bâti dans le quartier antique, «El hara», en utilisant des pierres authentiques, ou encore en restaurant pour s'y installer trois ou quatre maisons parmi les demeures désertées de ce quartier, tout en respectant leur spécificité architecturale. Car, tel qu'il se présente, il donne à voir une certaine divergence par rapport au tissu architectural et urbain du village. Ajoutons que certains des objets et pièces qu'il présente ne semblent pas de facture très ancienne.