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La démocratie a aussi ses périls
Opinions


Par Abdelbaki DALY*
On aura réinventé la roue si nous continuons à alimenter indéfiniment le débat relatif à la laïcité et de la nécessité de séparer l'Etat de toute religion.
Pour nous en convaincre, quand on est de bonne foi, référons-nous aux avantages objectifs enregistrés dès lors que ce choix rationnel a été formulé et qu'on a institué la laïcité. Précisons, à l'adresse de ceux qui rejettent l'idée que laïcité ce n'est pas et ne saurait être l'option de «l'a-religion» ni la doctrine qui s'oppose ou combat la religion. C'est simplement, laisser à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui Lui revient.
Le temporel et le spirituel
La simple logique pratique et non entachée de malfaisantes pensées politiciennes justifie la nécessité de distinguer le temporel du spirituel, perçu comme garantie fondamentale de la liberté de conscience, laquelle liberté est proclamée dans la quasi-totalité des Constitutions modernes. La plus parfaite consécration de cette liberté est affirmée dans le Coran, dont la lecture ne peut subir les distorsions dictées par des préoccupations piteuses qui reflètent une indigence intellectuelle pernicieuse. Il est rationnel que ce qui lie Dieu à l'homme ressort de l'intime conviction et le citoyen, ici, n'est comptable que devant son créateur exclusivement. C'est «la zone d'interdiction d'immixtion humaine». Restent les rapports des individus entre eux ou entre eux et les pouvoirs publics. Seulement, cet espace relève du temporel et pour cause ! Il faut bien établir les règles séculaires qui régissent ces relations. Le droit positif prend en charge ce rôle déterminant, pour assurer la paix sociale et la cohabitation de toutes sensibilités politiques, religieuses, sociales ou intellectuelles. Et si certains courants soutiennent le contraire, et luttent, bec et ongles, pour faire triompher les choix salafistes au nom d'un jihadisme hors du temps, c'est qu'ils s'inscrivent ouvertement dans la logique absolutiste et qu'ils rompent avec le sens basique de la démocratie.
L'obscurantisme n'est-il pas la négation de la liberté de pensée et l'antidote de la dignité de l'homme, puisqu'on lui confisque son humanité faite, au tout premier chef, de ses choix d'existence. Tant que ces options n'altèrent pas la liberté de l'autre.
Or nous voilà face au spectre qu'on croyait disparu, celui de la guerre non de clochers mais de minarets, dois-je dire. C'est grave et très menaçant que cette orientation et cette alternative qui nous sont offertes : ou la religion ou le chaos. Au nom de la liberté constitutionnelle, nous nous inscrivons en porte-à-faux contre ce douloureux dilemme.
A moins, bien entendu, qu'on annonce clairement la couleur, en reniant cette liberté axiale, dans le dispositif global des droits et libertés.
Sitôt sortie du placard, voilà la taupe (déferlante religieuse) qui n'hésite pas, et sans fausse pudeur, à sortir ses crocs menaçants. Puisqu'on déclare, sans ambiguïté, que ceux qui se réclament de la laïcité (qui n'est pas négation de croyance mais neutralité des pouvoirs publics) ne savent pas ce qu'ils disent. Accusation, à peine masquée, d'hérésie.
On ne peut trouver meilleure expression de l'extrémisme politico-religieux et plus éloquent fanatisme : si vous n'êtes pas avec nous, vous êtes contre nous ! Alternative réductrice de l'acception moderne de la liberté, de la démocratie et des rapports citoyens-pouvoir.
Celui qui se porte candidat à l'investiture suprême pour avoir en charge la conduite des affaires publiques d'une nation moderne, ne peut avoir l'arrogance de proclamer haut et fort que cette probable mission sera confiée à un parti religieux (ou d'obédience à peine cachée) sous bénéfice d'inventaire. Cet inventaire qui autorisera l'exil des «mécréants» et leur bannissement définitif d'une terre où la religion sera décrétée principal attribut de la citoyenneté.
Le paysage partisan semble, aujourd'hui, peu reluisant et peu rassurant . Il faut avouer que, dans ce périlleux apprentissage de la démocratie, le facteur organisation de la société se fait dans la difficulté et dans la douleur. Devant la nécessité de mieux préparer le citoyen à exprimer ses choix décisifs, les données du jeu électoral qui s'annonce sont floues et indécises.
L'échéance du 24 juillet 2011 c'est demain. Le temps incompressible nous harcèle. Or l'éclosion des partis, des associations (avec la nouvelle perception imposée par la perspective de transition démocratique) et des journaux, se fait à une cadence étourdissante et à un rythme inversement proportionnel au rapprochement de l'échéance électorale butoir.
La présence d'une Ugtt qui oscille entre tricherie et chicanerie n'est pas en reste dans le renforcement de cette confusion qui engendre de multiples imbroglios politico-sociaux.
La fatidique barre de 60 partis ne saurait tarder à pointer. Il faut observer qu'Ennahdha, se frottant les mains devant cet effritement de l'électorat, s'accommodera bien de cette performance parce qu'elle saura faire bon usage, à son avantage, de ce chiffre ô combien symbolique. Elle saura rallier à sa cause beaucoup de citoyens appartenant à la frange des indécis ou de ceux qui naviguent à vue dans ce paysage à la fois immense et méconnu.
Le jour J, les voix errantes seront happées par la séduisante idée de califat. La spirale religieuse ?… On peut prétendre la connaître et, c'est naturel, on se confie plus à ce qu'on connaît qu'à ce qu'on ignore. Il s'agit d'un réflexe prévisible. On ne craint pas ce qui est familier, or la nébuleuse religieuse a pignon sur rue, chez nous, et le risque d'inféodation est réel. En tout état de cause et quelle que soit la cote des partis, le bras séculier de la démocratie reste toujours l'urne et non la mosquée ni l'église ni la synagogue.
La ruche et la reine
Le référentiel religieux n'est jamais un travers, même en politique. Ce qui l'est, par contre, c'est la volonté d'imposer ce référentiel à tout prix. Pour étayer cela, référons-nous au cas d'Israël où les formations religieuses campent un rôle politique reconnu, mais n'ont jamais prétendu imposer leur diktat et leur hégémonie. Le parti Shass siège bien, et depuis longtemps, à la Knesset. Mieux encore, ses voix régulent parfois le jeu politique même si son statut demeure celui d'un outsider, son poids demeure fondamental dans les alliances. Il est une monnaie d'appoint, petite monnaie, certes, mais indispensable.
Si la foule de partis autorisés (s'y ajoutent ceux à venir) n'arrive pas à mettre de l'ordre dans cette auberge espagnole, ils se présenteront aux élections en rangs dispersés, voire en une véritable ruche d'abeilles besogneuses qui travaillent toutes au plus grand confort de la reine.
Le parti d'Ennahdha est la seule formation apte à assurer une confortable représentation au sein de la future Assemblée constituante. Ses atouts ne sont plus à montrer. A son actif, un capital expérience qui ne s'improvise pas, une large audience, un activisme qui ne s'est pas essoufflé et une capacité de combat soutenue avec en prime, une avantageuse structuration mobilisatrice.
Le grand, et non le seul, grief qu'on puisse lui faire, c'est qu'elle est animée par la vindicte et la soif de la revanche à prendre contre l'exclusion et la répression dont ses troupes ont été les victimes, jusque dans leur chair. Elle aura montré qu'elle est un tigre en carton, puisque ne s'inscrivant pas dans la logique démocratique. Son leader, qui semble assagi, a gagné en tolérance et en modération, grâce au contact, pendant près de deux décennies, avec l'une des plus grandes démocraties du monde. Le bilan de sa vie serait largement négatif, s'il ne rentabilisait pas la leçon démocratique qu'il reçut, gratuitement, aux frais de Sa Majesté. Ce qui est à craindre, à l'opposé, c'est que la vieille garde d'Ennahdha ne saura pas imposer la sagesse et la lucidité de l'action politique à leurs jeunes turcs.
La garde prétorienne d'Ennahdha risque de se faire remonter les bretelles par une jeunesse impatiente d'affirmer son plein statut d'acteur politique.
En attendant que les choses se clarifient et que les contours des partis soient plus nets, le jeu est en faveur d'Ennahdha, sans nul doute. Notamment que «le suicide commandé du RCD», a été prononcé dans la hâte, provoquant, pour le moment, un vide aux conséquences désastreuses. La messe est bien dite.
Au grand dam des faux-semblants des partis en place, le parti Ennahdha ne ratera pas le coche pour remporter les élections en juillet prochain.
Il ne faut pas jalouser Ennahdha, comme on ne peut lui faire grief de profiter du chaos provoqué par des partis francs-tireurs, pour séduire les urnes qui lui souriront bien volontiers.
Ce parti est capable de rééditer la victoire des religieux en Pallaestine, ce sera une victoire à la Hamas avec les garanties internationales des observateurs, toutes catégories confondues.
Victoire à la Pyrrhus
Parfaitement valide, le succès prévisible des islamistes l'aura été grâce au jeu démocratique en place.
Leurs partis seraient déchus de cette légitimité s'ils se retranchaient derrière le monolithisme idéologique, c'est-à-dire s'ils se dédouanent du devoir de respecter la pluralité. Ils se rendraient coupables du délit d'extrémisme suicidaire, à l'époque de la mondialisation qui témoigne de l'universalité des valeurs humaines authentiques et, à leur tête, la liberté démocratique qui signifie, nécessairement, diversité.
L'opportunisme, en politique, est largement admis et accepté, s'il ne s'érige pas en choix idéologique. Donc Ennahdha aura mis à profit l'éparpillement des voix pour faire sauter la cagnotte et rafler la mise. Le jackpot remporté aura montré la réussite purement technique de la transition démocratique, mais il ne sera pas mérité si le vainqueur proclamera la supériorité de ses choix, ce qui lui permettra de renier les principes fondateurs de la démocratie.
La démocratie suppose le respect des minorités, même si une majorité (unique ou composée) s'est dégagée des urnes. Autrement, on tombera dans la dictature hideuse de la majorité.
Ce subtil jeu des règles de la démocratie, les directions des partis dits extrémistes l'ont bien assimilé. La leçon est bien apprise à Hyde Park de Londres, emblématique autel des droits et des libertés.
L'impératif qui s'impose aux acteurs politiques est de procéder, dès maintenant, à des exercices de rapprochement, à des répétitions d'opérations fédératives. La stratégie des alliances se prépare et le temps presse.
C'est là une nécessité impérieuse pour donner à la démocratie la plénitude de son sens. Et aussi pour endiguer toute tentative d'inféoder le pays dans je ne sais quelle mouvance, qu'on s'obstine à assimiler aux paramètres identitaires fondateurs de l'authenticité arabo-musulmane, tout en occultant l'appartenance à l'espèce humaine tout court.
Les dangers de tels slogans nous ont été fournis par les déboires de certains extrémistes qui s'autorisent sans aucun scrupule à vouloir exhumer Bourguiba comme pour le punir de ses penchants laïcs, ou encore à bannir de notre hymne national les vers de Chebbi. Ces vers qu'on assimile aux versets sataniques de Selman Rochdi. Alors que ce vers «lorsqu'un jour le peuple décide de vivre, force est pour le destin d'y répondre» constitue, aujourd'hui l'âme des soulèvements arabes qui déferlent sur une partie du monde musulman.
Je ne pense pas que si Dieu ne cautionnait pas ces changements et s'il ne les bénissait pas, ils se seraient produits contre Sa volonté.
Dieu dit : «Dieu ne changera que les situations que le peuple aura décidé, par lui-même, de changer». Hors de toute rhétorique et de toute prétention pédagogique, ces rappels relèvent moins de la suffisance et du pédantisme, que de l'espoir qu'on n'instrumentalise pas, à souhait, la religion à des fins politiques donc temporelles. L'amalgame serait consommé dans de vilains desseins.
L'éventualité de déboucher sur des structures représentatives et capables d'initier à une vie politique pluraliste et en parfaite concordance, est une attente populaire. Comme l'aspiration de tout citoyen conscient que la diversité est un enrichissement, que l'uniformité est un appauvrissement et que la cohabitation dans la différence est l'unique garantie d'une vie démocratique méritée.
Sachant que l'opposition qui a été confectionnée par l'ancien président (rares exceptions faites des partis d'opposition réelle mais affaiblis par le contexte sociopolitique) n'a aucune chance de représentation. Ne s'était-elle pas parjurée elle-même par silence ou compromission. Elle se serait rendue, donc, coupable de cécité politique. Il n'est pas étonnant qu'elle soit discréditée et donc disqualifiée. Si on s'en tenait au scénario-catastrophe d'une victoire d'Ennahdha — épouvantail pour la démocratie — sans avoir de contrepoids ni de contradicteurs en face, on aura remporté une victoire à la Pyrrhus.
Tout ça pour ça !
Nos martyrs se seraient sacrifiés pour si peu.. Ils se retourneraient dans leurs tombes. On aura tout mis en branle pour, en fin de compte, aboutir à la consécration de l'extrémisme.


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