La Tunisie de l'après-révolution mise sur la liberté d'expression pour se frayer un chemin sur la voie de la réussite. En effet, seule la liberté d'expression est garante de la transition démocratique et de l'édification d'un Etat de droit et des institutions. Politique et presse ou encore politique et médias, autrefois c'était la discorde. Tyrannisée par un régime qui a tout fait pour restreindre ses champs d'investigation, la presse nationale était pour le moins aliénée et décadente par rapport à l'actualité socio-économique du pays. Aujourd'hui que les temps ont changé, peut-on aspirer à un paysage médiatique où pluralité, transparence et intégrité riment ensemble ? La problématique a été posée ,mardi soir, lors d'une rencontre-débat organisée par le parti politique (Afek Tounes) à Tunis. En les privant d'exercer conformément à l'éthique et à la déontologie de la profession, les journalistes tunisiens, à l'exception des volontiers complices du système de Ben Ali, ont été entraînés dans la facilité. D'où un grand nivellement par le bas donnant lieu à un discours médiatique pompeux, décadent, insignifiant et stérile. C'est ce qu'a confirmé la journaliste Olfa Belhassine dans son intervention «Le journalisme en Tunisie : un métier sinistré». L'intervenante a présenté un témoignage inspiré de son expérience professionnelle quand elle a parlé d'un quotidien qui a écrit dans son édito du 14 janvier, signé par son directeur : «Hier donc, la Tunisie a écrit une nouvelle page de l'Histoire et Ben Ali a fait une nouvelle entrée triomphale dans l'Histoire, inscrivant en lettres d'or les traits distinctifs d'un modèle sociétal, qui a toujours su faire face aux plus dures épreuves…». Elle a également évoqué une radio qui s'était penchée sur les inondations d'Australie alors que les victimes de la sauvagerie de Ben Ali se chiffraient à des dizaines un peu partout dans le pays. Des témoignages qui résument à eux seuls l'asservissement et la soumission des médias du temps de l'ex-président. Un asservissement qui n'a rien laissé au hasard, vu que l'on n'hésitait point à modérer les météos en fonction de la volonté des décideurs politiques. La journaliste a de surcroît rappelé que le secteur était étranglé par l'ancien conseiller de Ben Ali, Abdelwahab Abdallah. «Cet assassin de la liberté d'expression en Tunisie», comme aiment le désigner certains savait comme personne que les torts du régime Ben Ali seraient fort perceptibles du moment que les médias partent sur le terrain. Conforter les perspectives politiques prometteuses Par ailleurs, «de la qualité de l'information dépend la qualité de la démocratie et vice-versa». Cette expression d'Ignacio Ramonet, ancien directeur du mensuel «Le Monde Diplomatique», a été reprise par la journaliste afin de démontrer que la liberté et l'indépendance sont au journaliste ce que l'eau est à la rivière. La mutation qualitative marquant certains médias nationaux semble être fort significative pour conforter les perspectives politiques prometteuses. Toutefois, cela nécessite une volonté et une détermination commune de la part des décideurs politiques et des journalistes. Cela dit, les parties concernées sont appelées à faciliter la tâche du journaliste et à garantir sa protection contre toutes formes d'atteinte nuisible à la qualité de sa production. Tout autant que le journaliste est appelé à exercer dans le cadre du respect de l'éthique et de la déontologie de la profession, à commencer par la règle de proximité. C'est ce qu'a laissé entendre l'intervenant Anouar Moalla, expert en communication publique, avant d'ajouter qu'il est temps de réconcilier lecteurs et/ou récepteurs et supports médiatiques. Une réconciliation qui passe par l'amélioration de la matière médiatique présentée, et ce, en assurant aux journalistes des sessions de formation allant de pair avec leurs besoins. Abondant dans le même sens, l'intervenant a fait remarquer que l'on peine encore à distinguer entre information et communication, compte rendu et commentaire. Ce qui brouille les repères du lecteur et provoque sa frustration. Toujours est-il que le métier de journaliste est un travail artistico-littéraire. D'où la nécessité d'une culture aussi profonde que variée, d'une lucidité constante et d'un sens aigu de l'observation. Dans le même contexte, il a souligné que le métier de journaliste nécessite de l'audace et de la persévérance et qu'il n'est pas réservé uniquement aux hommes. Les femmes disposent plutôt des critères requis pour réussir de grandes carrières. Sachant que certaines journalistes femmes ont déjà fait leurs preuves, en tant que journalistes et en tant que responsables d'entreprises médiatiques. Partant, la journaliste Olfa Belhassine a donné l'exemple d'une rédactrice en chef actuelle d'un quotidien qui exerce avec beaucoup de professionnalisme et conformément au code de la bienséance.